À chaque nouveau scrutin, des millions de gens se rendent compte au dernier moment qu’ils ne pourront tout simplement pas voter. La raison ? Une radiation des listes électorales ou une inscription dans un mauvais bureau. Et certains d’entre vous pourraient bien se retrouver dans cette situation…

Alors qu’Emmanuel Macron pourrait bientôt être contraint de démissionner ou de dissoudre l’Assemblée nationale pour résoudre la crise politique, certains d’entre nous pourraient être privés de participation  pour des causes administratives. Un phénomène qui toucherait jusqu’à 12 millions de personnes.

Une part colossale de la population

En 2022, 35 millions de Français s’étaient rendus aux urnes pour les élections présidentielles. Et pourtant, il y a bien 67 millions de résidents dans le pays. Si l’on retire les mineurs et les individus sans la nationalité française et que l’on ajoute les citoyens majeurs de l’étranger, on parle alors d’environ 51 millions de votants potentiels. Le manque à gagner reste ainsi de près de 16 millions de personnes. Approximativement deux fois l’électorat de Marine Le Pen au dernier suffrage suprême.

Bien sûr, une bonne partie de ces personnes ne souhaitait tout bonnement pas prendre part au scrutin, pour diverses raisons. Mais d’autres auraient, en revanche, bien voulu le faire, mais n’ont tout simplement pas pu pour des causes administratives.

12 millions de concernés

3 millions sont tout simplement absents de tout registre électoral, malgré une inscription automatique à 18 ans. Certains citoyens se retrouvent en effet rayés des listes pour des raisons obscures parfois difficiles à comprendre. Il n’est ainsi pas rare de voir des Français dans l’incapacité de s’exprimer le jour du scrutin après avoir été radiés sans qu’ils ne le sachent.

« À ces trois millions, on peut également rajouter neuf autres millions d’individus « mal inscrits » »

À ces trois millions, on peut également rajouter neuf autres millions d’individus « mal inscrits », c’est-à-dire qui ne sont pas affiliés à un bureau de leur ville de résidence, mais dans une secondaire. Et si, pour certains, cette situation est volontaire et n’empêchera pas le vote de la personne concernée, d’autres n’étaient tout simplement pas informés ou sensibilisés à cet aspect.

Au gré de la vie et des déménagements, des études ou du travail, ce genre de conjoncture n’est pas toujours anticipé. Ne recevant aucun rappel, certains citoyens au parcours sinueux vont alors parfois jusqu’à oublier leur commune de rattachement.

Une situation à l’avantage de la grande bourgeoisie

« aucune lutte contre l’abstention n’est organisée »

Et tandis que cette situation perdure depuis de nombreuses années, aucun gouvernement ne semble se soucier réellement de ce problème. De fait, aucune lutte contre l’abstention n’est organisée, notamment par des mesures comme le vote obligatoire, mais il existe encore moins de campagnes de sensibilisation sur les inscriptions.

Or, si les diverses autorités libérales n’agissent pas sur ce sujet, il demeure de bonnes raisons de penser que cette inaction serait volontaire. En effet, les individus non inscrits ou mal inscrits appartiennent bien souvent aux classes populaires et surtout aux jeunes, en particulier les étudiants.

Des catégories qui votent massivement à gauche et qui s’opposent le plus aux intérêts de la grande bourgeoisie. À l’inverse, les plus âgés, dont la tendance est marquée à droite, sont généralement plus sédentaires et impliqués dans leur mises à jour administratives (temps libre, horaires flexibles, habitudes,..), ce qui leur épargne ce genre de configuration. Une aubaine pour certains partis. 

Des solutions existent

« Il est possible de vérifier son inscription en ligne en seulement quelques minutes ».

Dans ces conditions comment éviter de se retrouver dans cette situation aux prochaines élections ? Il est possible de vérifier son inscription en ligne en seulement quelques minutes. Si vous ne figurez pas sur la liste de votre commune, vous pourrez alors vous faire ajouter sur internet.

Mais attention, n’espérez pas vous enregistrer la veille du vote. En effet, il existe, de plus, une limite temporelle avant un scrutin. Pour les prochaines municipales de mars 2026, il vous sera par exemple impossible de vous inscrire ou de changer de bureau après le 6 février.

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La procuration comme ultime recours

Et si des présidentielles ou des législatives survenaient prochainement, le délai serait sans doute encore réduit. Raison de plus pour agir dès maintenant. Car si vous êtes pris de court et que vous n’êtes consignés nulle part, vous ne disposerez plus d’aucune solution. En revanche, en cas d’enregistrement dans une ville éloignée de votre résidence, vous pourrez toujours voter par procuration.

Il vous suffit pour cela de vous rendre dans un bureau de police ou de gendarmerie et de remplir un formulaire pour désigner quelqu’un qui pourra s’exprimer en votre nom. Il n’est pas nécessaire que cette personne soit inscrite dans le même bureau que vous.

Bien sûr, il est préférable de choisir quelqu’un de confiance qui respectera votre consigne, mais, si vous ne connaissez plus personne là où vous êtes inscrits, il est aussi possible de contacter des militants politiques de votre parti favori pour les solliciter. Ce genre de procédé existe souvent sur le site officiel des mouvements concernés ou au sein de communautés en ligne.

Le temps d’un autre système

De fait, toutes ces procédures administratives auront sans doute de quoi décourager les moins déterminés d’entre nous, ce qui pourrait cependant se payer cher au vu des politiques libérales exercées par les bénéficiaires de l’abstention.

Il existerait pourtant des processus pour enrayer ce phénomène. Il serait par exemple pertinent de mettre en place une inscription automatique sur les listes, plus seulement à 18 ans, mais directement lors de ses déménagements, notamment grâce aux impôts.

Plus simple encore : l’Australie, dotée du vote obligatoire, inscrit d’office tous ses ressortissants sur une liste électorale globale. Pas de registres communales comme en France, mais un fichier national qui permet aux citoyens de voter n’importe où au sein de leur État. Un modèle dont pourrait s’inspirer la France, à condition qu’une véritable volonté politique se manifeste enfin.

– Simon Verdière


Illustration d’entête @Edmond Dantès/Pexel

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