Malgré le malaise général qui a été exprimé à l’occasion des élections présidentielles françaises de 2017, la politique continue depuis mai son train-train ordinaire, sans véritable changement dans la méthode, si ce n’est une énième sous-représentativité des citoyens lambdas dans les instances démocratiques. Mais pendant que les candidats s’écharpaient sur les plateaux télévisés, Anthony Lepargneux et Guillaume Arnaud sont partis à la rencontre des citoyen.ne.s ordinaires, avec pour objectif de comprendre la frustration qui monte. Ils nous offrent aujourd’hui un documentaire qui fait raisonner les paroles enregistrées pendant leur périple avec les chiffres d’une abstention sans précédent, et nous invitent à réfléchir aux alternatives à mettre à place.
Les débats présentiels ont ils vraiment permis de répondre aux questions que se posent les français ? Face à la caméra, les citoyen.ne.s rencontrés par Anthony Lepargneux et Guillaume Arnaud expriment avant tout leur fatigue, leur méfiance et le sentiment que les politiques sont coupés de leur réalité de tous les jours. Ainsi, Pierre, un agriculteur auvergnais, explique qu’il « n’a plus du tout confiance dans nos politiques […] qui ne sont pas en contact avec le terrain ». Pourtant, cette méfiance généralisée n’est pas causée par un manque d’intérêt pour la chose politique, insiste Guillaume auprès de nous : « les français s’intéressent à la politique, c’est avec les représentants que le lien est coupé.«
« Ce film ne traite pas des partis politiques ou des Hommes politiques, mais des citoyens »
Néanmoins, d’autres structures sont également mises en cause par les interlocuteurs des deux réalisateurs, notamment les médias, régulièrement accusés de véhiculer l’idéologie économique dominante et de ne pas représenter la pluralité des opinions politiques. Pour cause, les principaux vecteurs d’informations sont aujourd’hui possédés par quelques milliardaires. Considérés comme jouant le jeu des politiques, ils participent à décrédibiliser ce qui appartient à la sphère publique. Et, au final, à qui profite la dépolitisation générale du débat ?
Les réalisateurs ont décidé de faire dialoguer les citoyen.ne.s qui expriment leur ressenti avec des chercheurs ou des personnes déjà engagées dans des mouvements citoyens. À certains égards, la démocratie représentative permet de « légitimer le pouvoir en faisant accepter [aux citoyens] ce qui a déjà été décidé » analyse ainsi l’auteur Loïc Chaigneaux pendant qu’Alexandre Jardin, fondateur des Maisons des citoyens, plaide pour un renversement dans la manière dont les décisions sont prises, du bas vers le haut plutôt que du haut vers le bas. Pour lui, notre démocratie vieillissante se doit d’être réinventée.
« Être citoyen, ce n’est pas une simple étiquette »
Guillaume Arnaud, avec qui nous avons échangé, a commencé à réaliser des films il y a 5 ans, d’abord sur la thématique du voyage. Plus récemment, il s’est intéressé plus spécifiquement à la politique et réalise alors « que la parole citoyenne est monopolisée par les instances dirigeantes et ceux qui véhiculent l’idéologie dominante ». En réaction, il a voulu faire un film « qui redonne la parole aux citoyens ».
Le documentaire a été réalisé avec Anthony Lepargneux, lui aussi membre des Compères. Il a été produit en collaboration avec Light the cave. Il est résultat d’une importante documentation sur le thème de la citoyenneté et de longues discussions au sein de l’équipe. « Avec Guillaume nous avons une vision parfois convergente des choses et parfois divergente, on le sait, on discute, on s’interroge, on refait le monde en observant ce qu’il se passe et c’est ce qui fait qu’on a tant à partager ! », raconte Anthony Lepargneux à propos du tournage.
Le film entend également « redonner ses lettres de noblesse au terme de citoyen ». Le concept de citoyenneté a progressivement été vidé de son sens, regrette Guillaume Arnaud, qui rappelle que la notion ne se résume pas au simple fait de voter. L’engagement citoyen, qu’il soit partisan ou non, revêt un sens bien plus large. Chacun doit pouvoir se rendre compte qu’il possède un certain pouvoir, estime ainsi Guillaume Arnaud, qui rappelle que le terme de citoyen « n’est pas une simple étiquette, mais un qualificatif qui résulte d’un comportement » : « tu es citoyens parce que tu t’impliques dans les décisions, que tu transformes ton quartier, que tu es actif d’une manière ou d’une autre dans ta cité ». Les représentants politiques pourront-ils faire la sourde oreille encore longtemps ?
« CITOYEN » est disponible gratuitement sur internet depuis le 15 septembre de cette année et publié en avant première sur la page Facebook de Mr Mondialisation.
Sources : Propos recueillis par l’équipe de Mr Mondialisation / Facebook
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