Isaac Cordal est un artiste espagnol spécialisé dans un « Street Art » des plus originaux. Il dénonce, à l’aide de petits personnages de béton, les maux de notre monde moderne. Utilisant les espaces naturels et urbains, il souligne avec amertume la lenteur bureaucratique de nos dirigeants face à des sujets brûlants qui ne peuvent plus attendre. Un regard mélancolique sur nos sociétés modernes.
Il s’est fait connaître en 2011 grâce à son installation « Follow the leaders » (Suivez les dirigeants) exposée dans les rues de Berlin un mois pile avant que le Groupe d’experts Intergouvernemental sur l’Évolution du Climat (IPCC) ne s’y réunisse. Il tirait alors la conclusion que les gouvernements mondiaux ne font pas assez pour réguler le changement climatique. Cette œuvre (cliché ci-dessous) fut par la suite rebaptisée « Politiciens discutant du changement climatique » … 6 ans plus tard, difficile de ne pas lui donner raison. L’économie triomphante, et sa nécessaire croissance, semble toujours la priorité des décideurs partout à travers le monde.
Une impression de « déjà vu » qui risque tristement de se répéter à l’approche de la COP23 qui se tiendra à Bonn en Allemagne en novembre. Les dirigeants du monde entier vont débattre une énième fois sur les mesures d’extrême urgence à prendre en terme de protection de l’environnement et de préservation du climat, avec le soutien actif de diverses multinationales. Le problème reste entier, les objectifs fixé par la COP21, aussi ambitieux soient-ils, n’ont rien de contraignants et leur application reste à l’entière discrétion des gouvernements aussi nombreux que politiquement variés. C’est ce sentiment d’inertie que la bureaucratie déconnectée des réalités inspire aux populations que l’artiste Isaac Cordal cherche à exposer.
Par le biais de petits personnages anonymes de béton d’environ 15 centimètres, principalement des hommes d’affaires en costume-cravate, mais également des citoyens ordinaires, l’artiste met en lumière, par un habile jeu de perspectives, l’absurdité de notre société moderne et son inquiétude quant à l’avenir de notre planète. Par orgueil, cynisme, ou simple aveuglement, nous peinons à accepter l’ampleur du problème climatique, devenant des personnages sans pouvoir, attendant l’inéluctable.
Il explique que : « L’art devrait être le miroir de la société. Le grand problème, c’est que c’est un miroir sur lequel peu de gens sont prêts à réfléchir. Mon travail se veut une réflexion sur notre modèle de vie. Cela m’intéresse de travailler sur différents problèmes liés aux valeurs actuelles, et à la façon dont les plus défavorisés sont frappés brutalement par la crise. Nous vivons une époque de crise, ce qui arrive quand l’ancien régime ne veut pas mourir mais que le nouveau n’est pas capable de s’imposer. »
Parmi ses thèmes de prédilection, on devine à travers ses installations toujours éphémères : la montée des eaux, l’énergie, l’industrialisation, la pollution, la jungle urbaine, la consommation de masse ou encore la déforestation, mais aussi des thèmes plus « humains » comme l’immigration, l’isolement social ou encore le travail à la chaîne. Fragilité, engagement et humanisme transpirent de ses réalisations.
Isaac Cordal invite à poser un regard critique sur notre société à travers l’art qui est pour lui une véritable arme intellectuelle permettant d’aborder des thèmes graves par un langage universel compréhensible par tous. Un art urbain accessible et gratuit, qui pousse à la curiosité et facilite la rencontre, le questionnement et l’échange. Une invitation offerte aux citoyens de se réapproprier le débat, leur pouvoir de changement et d’action, plutôt que de remettre leur destin entre les mains des puissants.
Toutes les installations éphémères de l’artiste sont visibles sur son site internet.
Crédit photos : Isaac Cordal
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