La disparition du sable, vaste programme. Dans leur dernière vidéo, tout aussi excentrique que les précédentes, le Professeur Feuillage et Sophie nous emmènent en bord de mer, afin d’aborder ce sujet encore peu médiatisé. Le sable est devenu une véritable mine d’or et il fait l’objet d’un marché juteux. On le trouve dans de nombreux objets de la vie courante depuis les cosmétiques jusqu’au béton. De quoi attiser les convoitises, malgré les enjeux écologiques qui se trouvent relayés au second plan.
Sous nos yeux, le « granulat marin » ou sable est en train de disparaître. Pourtant ce phénomène reste méconnu, bien que l’information commence à être relayée par les médias depuis quelques années. Dans l’imaginaire, le sable est infini. Et pourtant, il est le fruit d’une longue et lente érosion. Celui-ci est donc limité. Le documentaire réalisé par Denis Delestrac en 2011 « Le sable : enquête sur une disparition » avait permis d’introduire ce sujet dans le débat public. La raison de cette disparition ? Le sable est devenu une ressource indispensable pour le développement économique car il intervient dans la construction des bâtiments et des routes. Alors que depuis les années 1970 le « granulat alluvionnaire » (sable qu’on trouve dans les cours d’eau) est épuisé, c’est l’exploitation du sable marin, qui est aujourd’hui au centre des enjeux.
Le sable, ou la nouvelle ruée vers l’or
Pour comprendre la problématique liée à la surexploitation du sable, quelques chiffres s’imposent. 75 millions de tonnes de sable sont puisées chaque année dans le monde, ce qui fait du sable la troisième ressource naturelle la plus exploitée, après l’air et l’eau. Tous les jours, des milliers de bateaux spécialisés (les sabliers) sillonnent les mers et les océans pour draguer les fonds marins. Chacun d’entre eux récupère jusqu’à 400.000 m3 de sable par jour. Rien qu’en France, ce sont 3 millions de tonnes de sable qui disparaissent chaque année, annihilant toute vie sur leur passage. Denis Delestrac évoque déjà, très pessimiste, la « disparition des plages à l’horizon 2100 ».
Pourquoi une telle ruée sur le sable ? Parce que ce granulat est utilisé pour la fabrications de très nombreux objets de la vie courante : plastiques, verre, ordinateurs, cosmétiques…. et il entre surtout dans la composition du béton, constitué à 80% de ces granulats. Par conséquent, le marché du sable est florissant. A ce jour, les transactions mondiales sur le sable s’élèvent à 70 milliards de dollars chaque année. Le sable du désert ne représente quant à lui pas une alternative : en raison de ses propriétés particulières, il ne peut pas être utilisé dans la fabrication du béton.
En France, une plage sur quatre est concernée par la disparition du sable. D’ailleurs des projets d’extraction sont en cours de réalisation, notamment sur les Côtes d’Armor, et ce malgré l’opposition d’une partie de la population et des élus locaux. Au large de la commune de Lannion, le sable coquiller sera puisé en mer puis utilisé comme fertilisant par des exploitations agricoles. La problématique frappe donc à nos portes dès aujourd’hui.
Des conséquences environnementales inévitables
Ce n’est pas la disparition du sable en soit qui est inquiétante. Ce sont les conséquences environnementales de cette disparition. Or, le cycle du sable est très long et il ne constitue qu’une « couche géologique très mince ». De plus, le cycle du sable est interrompu par les barrages, qui empêchent le nouveau sable d’être déporté vers la mer via les cours d’eau.
L’extraction du sable cause d’importants dégâts écologiques. Le dragage des fonds marins détruit l’habitat naturel de nombreuses espèces. De surcroît, les sabliers rejettent à leur passage un « panache turbide » constitué d’éléments qui ne sont pas des granulats. Ce panache est particulièrement nocif pour la vie marine. En s’attaquant aux espèces situées en bas de la chaîne alimentaire, l’ensemble des espèces qui en dépendent sont mises en danger.
Et on en restera pas là. Le dragage du sable, participe à l’érosion côtière et accentue ainsi les dommages causés par la montée des eaux. En effet, le sable du bord des côtes vient combler les vides laissés par les sabliers. Ainsi, l’industrie du sable participe très directement à la disparition d’îles comme celles des Maldives ou en Indonésie. Inévitablement, cette pratique nous ramène aux activités humaines devenues irraisonnables et dont les coûts externalisés des conséquences ne sont pris en considération par personne.
Peut-on endiguer le phénomène ?
Malgré l’urgence, il est peu probable que l’on puisse trouver une solution rapide au problème. Comme l’indique Natura-sciences, « le sable est devenu en quelques années la source d’enjeux faramineux et d’une bataille méconnue que se livrent entrepreneurs, contrebandiers, écologistes, politiques et populations locales. »
De ce commerce juteux, ce sont les pays comme le Maroc, le Vietnam ou encore le Cambodge qui en font le plus les frais, par l’érosion particulièrement rapide de leurs côtes. Et malgré tout, ces activités illicites sont souvent couvertes par les États, qui ferment les yeux face à cette manne financière qui participe largement au PIB. Car des pays comme Singapour, dont l’espace territorial est minime sont contraint de déplacer des quantités astronomiques de sable pour créer de nouvelles îles artificielles.
Utiliser des alternatives au sable ? Peu envisageable en l’absence de régulation étatique, suggèrent Professeur Feuillage et Sophie, d’autant que les substituts au précieux granulat sont bien plus coûteux. Reste à espérer une modération volontaire et collective ou l’émergence d’une alternative plus efficace.
La vidéo
Sources : consoglobe.com / natura-sciences.com / planetoscope.com / rue89.nouvelobs.com