À l’heure où la question climatique est de plus en plus prégnante, le sujet de la mobilité devient inévitable. Et pourtant, à contre-courant de tout bon sens, la plupart des autorités du monde entier continue de favoriser l’avion contrairement au train, alors que ce dernier est beaucoup plus propre en émissions de gaz à effet de serre.
Un rapport de Greenpeace expliquait en 2023 que prendre le chemin de fer coûte en France jusqu’à 2,6 fois plus cher que la voie des airs. Un constat dramatique lorsque l’on sait que, selon l’agence de la transition écologique, l’avion émettrait en moyenne 23 fois plus de gaz à effet de serre. Une absurdité contre laquelle les pouvoirs publics auraient pourtant la possibilité de lutter.
Des péages colossaux sur les trains
Phénomène peu connu du grand public, les opérateurs ferroviaires sont soumis à des péages. Autrement dit, pour pouvoir utiliser les voies ferrées, ils doivent s’acquitter d’une redevance. De ce côté, le réseau français est particulièrement mal loti puisqu’il est assujetti à l’une des taxes les plus fortes du continent.
Destiné à financer les infrastructures, ce montant se répercute cependant de façon spectaculaire sur le prix des billets. Ainsi, dans l’hexagone, le « péage » ne représente pas moins de 40 % du tarif d’un ticket de train à grande vitesse. Et non seulement l’État n’envisage pas de remédier à cette situation, mais il prévoit d’encore augmenter ce taux dans les années à venir.
Les avions épargnés
En plus de ce péage, les billets de train sont soumis à une TVA à 10 %, ce qui ne concerne pas les vols internationaux. De plus, pour fonctionner les voies ferrées ont besoin d’électricité, elle aussi taxée à hauteur de 20 %. Et dans le même temps, le kérosène des avions n’est, lui, pas taxé.
Le site novethic comparait, par exemple, deux trajets entre Paris et Milan, l’un en avion et l’autre en train. Dans le premier cas, le voyage revenait à 122 € dont 26 € de taxes, tandis que dans le second la note s’élevait à 278 € dont plus de la moitié prélevés par l’État. Mais ce genre de procédés ne concerne pas que la France, puisqu’un Barcelone-Londres a pu coûter jusqu’à trente fois plus cher en train.
L’austérité avant la planète
Si une telle situation existe, c’est bien d’abord parce que les gouvernements libéraux souhaitent faire passer les économies du budget avant toute chose, y compris les services publics.
Or, pour son fonctionnement, le chemin de fer demande bien plus d’investissements que le réseau aérien. En effet, le train a besoin de voies ferrées qu’il faut entretenir alors que l’avion se contente de circuler dans le ciel. En outre, les compagnies aériennes sont le plus souvent privées, à l’inverse des entreprises ferroviaires, qui pèsent donc sur les finances collectives.
Les libéraux, organisant la privatisation de tous les services publics, ne cessent d’ailleurs de réclamer l’ouverture à la concurrence et se plaignent des vingt milliards d’euros que coûte la SNCF aux contribuables.
Un choix pour l’avenir
En réalité, la France investit assez peu dans le ferroviaire, l’entretien des lignes reposant en grande partie sur la redevance colossale transposée au prix des billets. De plus, y compris en admettant que le « tout train » coûte a priori plus cher que l’avion aux Français, il faut cependant examiner avant tout le bien commun et l’intérêt de l’humanité.
En effet, même en prenant en compte la construction et la sauvegarde des infrastructures, le coût écologique de l’avion reste bien plus élevé. Or, face à un choix entre des dépenses supplémentaires pour les citoyens et la mise en péril d’une planète dont dépend la survie de notre espèce, la question devrait être facilement tranchée. D’autant plus que le désastre environnemental aura lui aussi un impact économique.
Faire payer les plus riches
De ce fait, investir beaucoup d’argent sur le train paraît la méthode la plus sensée pour limiter la catastrophe, d’autant plus que ce moyen de transport permettrait également de diminuer le nombre d’automobilistes. Or, les transports en commun sont plus que jamais une solution d’avenir qui doit prendre le pas sur les déplacements individuels.
Dans cette optique, rendre les transports les plus vertueux moins chers, voire gratuits, apparaît comme une évidence. Pour autant, ce financement public ne doit pas nécessairement reposer sur les épaules des classes populaires. Au contraire, compte tenu du fait que les plus riches sont les plus gros pollueurs de la planète, ils pourraient logiquement en avoir la charge.
La sobriété, aussi dans la mobilité
D’un point de vue plus global, notre mobilité en général devrait, elle aussi, sans doute être repensée. Si la sobriété et la décroissance sont les uniques solutions au problème environnemental, il est évident qu’elles doivent également s’imposer au domaine du transport.
Ainsi, les populations du Nord, qui se sont, petit à petit, habituées à tout avoir tout de suite devraient sûrement revoir leur rapport au temps. Se déplacer sans cesse sur de très grandes distances dans un laps de temps réduit n’est pas soutenable.
Que ce soit d’un point de vue professionnel ou pour ses distractions, le citoyen de demain ne pourra plus se payer le luxe de prendre l’avion pour un simple week-end de détente. Notre façon de voyager pourrait également évoluer en se déroulant lentement, sur une plus longue période. Des solutions qui passent sans doute par la réduction du temps de travail, mais aussi la valorisation de loisirs locaux. Et dans ce cadre, le train sera sans aucun doute un atout indispensable.
– Simon Verdière
Photo de couverture de Andrea Piacquadio. Pexels.