Un rapport de l’ONG britannique Christian Aid a répertorié les 10 catastrophes climatiques les plus coûteuses en 2024. Si les pertes économiques sont généralement plus importantes dans les pays à haut revenus, les pays pauvres subissent en revanche des bilans humains plus lourds et peinent à se reconstruire.

Parmi les plus dévastatrices figurent notamment les ouragans Milton et Helene en Amérique du Nord, les pluies torrentielles en Chine ou encore le typhon Yagi en Asie du Sud-Est. Aucune région du monde n’a été épargnée par ces phénomènes météorologiques violents.

Le rapport souligne également la responsabilité du changement climatique dans l’augmentation de la fréquence et de l’intensité de ces catastrophes climatiques, nous rappelant plus que jamais l’urgence d’adopter des mesures d’adaptation et d’atténuation du réchauffement climatique.

Des coûts considérables

Cela fait plusieurs années que Christian Aid réalise ce rapport, et le bilan ne va pas en s’améliorant : alors que le coût total des catastrophes les plus importantes s’élevait à 168 milliards de dollars en 2022, il atteint près de 230 milliards en 2024. Ces estimations, basées principalement sur les pertes assurées de biens et d’infrastructures, ne comptabilisent pas les pertes moins tangibles, comme les productions agricoles, impliquant que le coût réel est encore plus élevé.

En tête du classement, pas moins de 46 tempêtes dévastatrices ont frappé les États-Unis, causant 88 décès et plus de 60 milliards de dollars de pertes économiques entre janvier et décembre. L’ouragan Milton, qui a principalement touché la Floride en octobre, arrive en deuxième position avec 60 milliards de dollars de dommages, devenant ainsi la tempête la plus coûteuse de l’histoire américaine. Quelques semaines plus tôt, l’ouragan Hélène balayait les Etats de Géorgie, de Caroline du Nord et du Sud, du Tennessee et de Virginie, ainsi que certaines régions du Mexique et de Cuba, provoquant des dégâts estimés à 55 milliards de dollars.

Joe Biden en visite en Floride après l’ouragan Milton, 13 octobre 2024. Source : Wikimedia Commons

Durant les mois de juin et juillet, la Chine a subi des pluies torrentielles, provoquant des inondations qui ont forcé l’évacuation de dizaines de milliers d’habitants des provinces de Guangdong, Guangxi et Fujian dans le Sud du pays. Dans le Sud-Est de l’Asie, c’est le typhon Yagi qui a ravagé les Philippines, le Laos, le Vietnam, le Myanmar et la  Thaïlande début septembre. Avec des vents dépassant les 200 km/h, Yagi a détruit maisons, usines et infrastructures sur son passage, entraînant des pertes estimées à 12,6 milliards de dollars.

Au Brésil, l’Etat de Rio Grande do Sul a été frappé par de fortes inondations entre fin avril et mi-mai suite à des précipitations records, trois fois plus élevées que la normale. Ces intempéries ont touché 2 millions de personnes dans la région et forcé le déplacement d’environ 422 000 habitants. Les dommages aux biens, entreprises et infrastructures ont été estimés à 2 milliards de dollars, sans compter les dégâts liés au secteur agricole touché par des pertes de bétail, de culture et de fertilité des sols.

Enfin, l’Europe n’a pas non plus été épargnée par d’importantes catastrophes naturelles en 2024, avec trois évènements classés parmi les plus coûteux: la tempête Boris qui a ravagé l’Europe centrale durant l’été, les inondations en Bavière (Allemagne) au cours du mois de juin et celles de Valence en octobre. Chacun de ces désastres a engendré des dégâts matériels estimés entre 4 et 5 milliards de dollars.

Les pays pauvres payent le prix fort

Si les pays riches subissent des pertes économiques plus importantes et plus facilement mesurables lors de catastrophes, en raison de la valeur supérieure de leurs biens, de leurs infrastructures et du coût de la vie, ce sont les pays pauvres qui paient le prix humain le plus lourd. Ces mêmes pays qui contribuent pourtant le moins au réchauffement climatique…

Le rapport de Christian Aid complète donc son analyse de 2024 en incluant 10 catastrophes qui, bien que n’ayant pas causé les plus lourdes pertes économiques, ont eu des conséquences dévastatrices dans des pays du Sud. Y figurent les glissements de terrain survenus aux Philippines en début d’année, les sécheresses qui ont frappé l’Afrique australe et la Colombie, ainsi que les vagues de chaleur à Gaza, au Bangladesh ou même en Antarctique où ont été enregistrées des températures de plus de 10 degrés au-dessus des normales saisonnières durant le mois de juillet.

Inondations au Bangladesh en 2010. Source : Afifa Afrin, Wikicommons

Le rapport mentionne également le cyclone Chido qui a frappé violemment Mayotte et le nord du Mozambique en décembre 2024.  Avec des vents excédant 220 km/h, il a dévasté des centaines de milliers de logements, dont plus de 110 000 habitations détruites rien qu’au Mozambique.

Les retombées des catastrophes climatiques touchent d’autant plus durement les populations défavorisées, disposant de moins de ressources pour s’en remettre, de peu d’accès aux assurances couvrant leurs pertes et bénéficiant de services publics limités pour les aider. À cet égard, Mohamed Adow, le directeur de Power Shift Africa expliquait à Christian Aid :

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« L’Afrique n’a peut-être pas les pertes assurées les plus importantes, mais nous subissons un terrible tribut humain en termes de vies perdues et de moyens de subsistance détruits. Le fait que nous contribuions à moins de 4 % des émissions mondiales mais que nous subissions le plus gros des conséquences montre bien pourquoi l’Afrique a besoin d’un soutien financier pour faire face à une crise provoquée par le monde riche. »

Des phénomènes amplifiés par le changement climatique

Le rapport fournit également des analyses de réseaux scientifiques spécialisés dans le climat et les évènements extrêmes (World Weather Attribution Group (WWA), Climameter et Climate Central) mettant en évidence le rôle du changement climatique dans l’amplification de ces évènements météorologiques.  Le réchauffement climatique augmente à la fois la fréquence et l’intensité de ces catastrophes climatiques, notamment par des précipitations plus abondantes et des vents plus violents.

Ainsi, les températures océaniques anormalement élevées ont contribué à l’intensification de l’ouragan Milton. Selon l’organisme Climate Central, le changement climatique a rendu ce phénomène 400 à 800 fois plus probable durant les deux semaines précédant l’évènement. Même son de cloche pour l’ouragan Helene qui a touché la Floride : la WWA indique que le réchauffement climatique a doublé sa probabilité d’occurrence, augmenté les précipitations de 20 à 30% et la vitesse des vents de 10%. Une autre étude de la WWA révèle que le changement climatique a également doublé la probabilité des inondations de Valence et intensifié les précipitations de 12%.

En bref, le lien entre le dérèglement climatique et l’augmentation des phénomènes météorologiques extrêmes est désormais bien établi. Ces événements risquent de devenir plus fréquents et violents si le réchauffement se poursuit, un constat qui nous rappelle encore une fois l’urgence de mettre tous les moyens en œuvre pour le ralentir.

L’inaction coûte plus cher que la prévention

Le bilan économique des catastrophes naturelles démontre clairement combien l’inaction environnementale nous coûte. Il souligne l’importance d’investir dans des politiques d’adaptation pour renforcer la résilience des populations, mais surtout dans des mesures d’atténuation pour freiner le réchauffement climatique et réduire l’intensité croissante de ces catastrophes.

En France, c’est ce qu’ont rappelé les associations de protection de l’environnement suite à l’adoption du troisième plan d’adaptation au changement climatique, qu’elles jugent insuffisant en termes d’ambition et de moyens, tout en soulignant son incohérence sans la mise en place de plans solides pour réduire les émissions de gaz à effet de serre en parallèle.

Nicolas Richard, vice-président de France nature environnement (FNE), déclarait à l’occasion : « La meilleure adaptation, c’est d’éviter le réchauffement climatique. En ce sens, le plan doit être une aiguillon très fort pour renforcer largement les politiques d’atténuation. C’est ce qui est important. Pour l’instant, tous les signaux sont plutôt mauvais ».

Le président de Christian Aid, Patrick Watt, le rappelle également, en insistant sur la nécessité de sortir des énergies fossiles :

« Les souffrances causées par la crise climatique sont un choix politique. Ces événements sont amplifiés par les décisions de continuer à brûler des combustibles fossiles, de laisser les émissions augmenter et de ne pas respecter les engagements financiers. En 2025, nous devons voir les dirigeants mondiaux agir en faveur des communautés qui s’adaptent déjà au changement climatique au niveau local, mais qui ont besoin d’urgence d’un soutien supplémentaire pour protéger leurs terres et leurs moyens de subsistance. »

Delphine de H.

Photo de couverture de Arek Socha sur Pixabay.

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