À Bagnolet, en Seine-Saint-Denis, le quartier des Malassis se distingue pour une raison bien particulière. Au pied des immeubles se trouve un espace, géré par l’association Sors de Terre, composé d’une bergerie et d’un hectare et demi d’espaces verts. L’occasion pour les habitants du quartier et leurs enfants de côtoyer des chèvres et de jardiner en plein cœur de la ville. Rencontre avec Gilles Amar, à l’origine du projet.
À Bagnolet, dans le 93, le quartier des Malassis est essentiellement composé de logements sociaux. Mais au milieu des HLM et du bitume se trouve un petit coin de nature avec des animaux. Il s’agit de la propriété de l’association Sors de Terre, créée en 2008 par Gilles Amar.

Âgé de 49 ans, ce dernier est né et a grandi en Seine-Saint-Denis. S’il a décidé de monter un tel projet, c’est pour combiner ses multiples passions : la nature, son quartier et les échanges avec les habitants. Gilles Amar nous confie :
« J’ai toujours été dehors, avant même d’être jardinier. J’étais un enfant qui jouait dehors, un ado qui était dehors tout le temps. J’ai une familiarité avec l’espace public et la rue. Ce projet est né à la fois d’une passion pour le végétal, l’animal et le bricolage, mais aussi de l’affection que j’ai pour ma banlieue, l’endroit d’où je viens »
Des chèvres dans le quartier
L’association possède une bergerie, qui regroupe actuellement 14 chèvres et des poules. Ce lieu unique est ouvert et accessible tous les jours et à tout le monde. La journée, Gilles Amar sort ses chèvres dans le quartier, pour le plus grand bonheur des habitants.

En plus de cela, l’association possède un terrain qu’elle entretient quotidiennement. Ainsi, les enfants et les habitants peuvent admirer de multiples plantes, des insectes, des animaux et jouer dans la nature au cœur de la ville.
« Je suis responsable de la bergerie, ce qui signifie que je suis chevrier, jardinier et animateur. Dans le quartier, on veut créer des paysages qui vont faire écho à l’histoire des habitants du quartier qui ont eu plusieurs vies et qui sont nombreux à venir de zones rurales. On est à la fois attachés à une culture qui se construit ici, à Bagnolet, mais aussi à une autre culture faite de plein de regards différents. Si je peux avoir des chèvres ici, les sortir dans le quartier, cela veut dire que beaucoup de choses sont possibles », nous a expliqué Gilles Amar.

La bergerie a tout d’une exploitation agricole. Elle contient un corps de ferme, où l’on retrouve les paysans, les animaux et le matériel, mais aussi les espaces verts qui appartiennent à l’association. En créant ce projet, Gilles souhaitait transformer le regard des habitants sur leur environnement tout en valorisant les espaces verts. Et c’est chose faite !
Une bergerie pour les habitants
Régulièrement, l’association organise des animations directement tournées vers les habitants. Ces derniers peuvent par exemple jardiner, planter des arbres ou entretenir des vergers. Ils peuvent également participer à des ateliers de construction de mobiliers en bois, qui sont ensuite installés dans la ville, à la demande de la population.
« Le mobilier urbain disparaît donc on ajoute des bancs et des tables en bois pour permettre aux habitants de se poser, de jouer ou de pique-niquer. On souhaite aussi renseigner sur l’histoire du quartier à travers l’urbanisme. En construisant des cabanes en bois, on fait des clins d’œil à l’histoire de Bagnolet, où il y a eu des bidonvilles et où beaucoup d’habitants vivaient dans des maisons en bois qu’ils avaient construit eux-mêmes. On joue avec des symboles valorisants pour les habitants, qui peuvent se les approprier à travers leur histoire », nous a confié Gilles Amar.

Si Gilles Amar tient à valoriser son quartier et ses espaces verts, il souhaite avant tout créer du lien entre les habitants et les faire s’unir autour d’un projet commun. Pour cette raison, l’association organise régulièrement des événements culturels comme le Festival des Malassis. Pendant quatre jours, des concerts ont lieu à la bergerie et sur les terrains de l’association. Tout au long de l’année, des artistes se produisent à la bergerie, à raison de deux fois par mois. L’occasion pour les habitants de se rencontrer, d’échanger et de partager leurs histoires.
« La bergerie est un endroit où l’on retrouve des enfants, des familles et des habitants du quartier, c’est très vivant. On veut montrer que des enfants qui vivent parmi les chèvres à Bagnolet, c’est réel ! On est la ferme du village. Il y a énormément de solidarité et de bienveillance de la part des habitants, qui sont reconnaissants qu’on ait mis en place un lieu qui fait du bien aux enfants et à l’atmosphère de la ville. On accueille plus de gens que n’importe quel autre espace vert public. Quand ils viennent ici, les enfants sont en sécurité, avec des adultes bienveillants qui leur apprennent des choses. C’est une grande famille. »
L’agrandissement de la bergerie
Pour la suite, Gilles Amar a de nombreux projets. Cet été, la bergerie devrait s’agrandir. En effet, l’association a été contrainte de déménager en octobre 2022 sur un terrain plus petit. Aujourd’hui, elle est installée sur un espace de 780 m2, mais Gilles espère regagner jusqu’à 2 500 m2 d’ici quelques mois. Des négociations sont actuellement en cours avec la ville pour gagner un maximum d’espace afin de « bien accueillir les gens, les enfants et les animaux ».
« On essaie de faire en sorte que notre activité ressemble au maximum à la vie. On essaie d’expliquer à la ville, au département et même à l’État, que l’on joue un rôle essentiel. On agit au quotidien. Donc nous avons non seulement besoin d’espace, mais aussi de financements à la hauteur du travail que l’on fait. On est sous-financés comparés aux enjeux sociétaux d’aujourd’hui », a déclaré Gilles Amar.

Avoir plus d’espace permettrait à l’association de mener de nouveaux projets comme la plantation d’arbres et la construction de cabanes en bois. Une circulation douce devrait également être mise en place pour faciliter la mobilité des habitants. Gilles Amar aimerait acheter un bouc pour agrandir son troupeau, avoir des naissances et produire du lait de chèvre. Enfin, une nouvelle bergerie devrait être créée pour accueillir tous les animaux.
Pour retrouver la bergerie des Malassis sur Instagram, c’est ici.
– Lisa Guinot
Photo de couverture : Gilles Amar















