Frappée par de nombreux phénomènes météorologiques extrêmes en 2023, l’Asie est restée la région du monde la plus touchée par les catastrophes liées au dérèglement climatique. Publié en avril dernier, le rapport sur l’état du climat asiatique est sans appel : les inondations et tempêtes ont causé le plus grand nombre de victimes et pertes économiques, tandis que les répercussions des vagues de chaleur se sont aggravées sur le continent.
« Les conclusions du rapport ne prêtent guère à l’optimisme », observe la Secrétaire générale de l’Organisation météorologique mondiale (OMM), Andrea Celeste Saulo. Alors que le continent asiatique abrite près du tiers des terres émergées de la planète et environ 60% de la population mondiale, il semble se réchauffer encore plus rapidement que le reste du globe, avec un taux de réchauffement ayant presque doublé depuis la période 1961-1990.
Tempêtes, inondations et sécheresses
Des steppes du Kazakhstan aux berges du Mékong en passant par les montagnes de l’Himalaya, l’Asie a été frappée par de nombreux phénomènes météorologiques extrêmes l’année dernière. « De nombreux pays de la région ont connu en 2023 leur année la plus chaude jamais enregistrée, ainsi qu’un déluge de conditions extrêmes, allant de périodes de sécheresse et de vagues de chaleur à des inondations et des tempêtes », détaille la Secrétaire générale de l’OMM.
Le rapport dénombre pas moins de 79 catastrophes associées à des aléas hydrométéorologiques dans la région. Les inondations et les tempêtes représentent plus de 80% d’entre eux, provoquant environ 2000 décès et touchant directement près de 9 millions de personnes.
Tout le continent est touché
Dans le nord de l’océan Indien par exemple, la tempête cyclonique Mocha a frappé la côte de Rakhine, au Myanmar, provoquant la mort de 156 personnes et causant des dégâts matériels considérables. L’Inde, le Pakistan et le Népal ont quant à eux connu un été plus que maussade, avec des précipitations extrêmes provoquant de nombreuses inondations et plus de 600 morts. Plus à l’ouest du continent, le Yémen, l’Arabie Saoudite et les Emirats arabes unis ont également subi de fortes précipitations, occasionnant des inondations généralisées.
En parallèle, des épisodes de chaleur extrême ont touché de nombreuses régions d’Asie en 2023, comme le Japon et le Kazakhstan qui ont vécu leur été le plus chaud jamais observé. « La Chine a enduré 14 épisodes de températures élevées en été. Ainsi, la température a dépassé les 40 °C dans environ 70 % des stations météorologiques du pays et des records de chaleur ont été battus dans 16 stations », complètent les experts.
Les glaciers de la région en net recul
Au delà des températures élevées et des évènements extrêmes, les experts se sont également penché sur la fonte des glaciers du continent. « Les hautes montagnes d’Asie contiennent le plus grand volume de glace en dehors des régions polaires, avec des glaciers couvrant une superficie d’environ 100 000 km2 », expliquent les chercheurs. Ces dernières décennies, la plupart de ces glaciers ont reculé, et ce à un « rythme accéléré ».
Le rapport fait état d’une perte de masse pour 20 des 22 glaciers dénombrés dans la région, notamment due aux fortes chaleurs et aux conditions de sécheresse intenses dans l’Himalaya oriental et dans la majeure partie du Tien Shan. L’OMM détaille :
« Au cours de la période 2022-2023, le glacier Urumqi N° 1, dans le Tien Shan oriental, a enregistré son deuxième bilan de masse le plus négatif depuis le début des mesures, en 1959 »
Un contexte de réchauffement global
Au moyen de ces indicateurs clés – la température de surface, le recul des glaciers ou encore l’élévation du niveau de la mer, le rapport met ainsi en évidence l’accélération du dérèglement de l’environnement à une échelle plus régionale et souligne les faiblesses structurelles du continent face à une telle menace.
« Le changement climatique a exacerbé la fréquence et l’intensité de ces phénomènes, avec de profondes répercussions sur les sociétés et les économies mais, surtout, sur les vies humaines et l’environnement dans lequel nous vivons », rappelle à ce titre la Secrétaire de l’agence onusienne.
Pour Armida Salsiah Alisjahbana, secrétaire exécutive de la Commission économique et sociale pour l’Asie et le Pacifique (CESAP), ce rapport est une preuve de plus de l’injustice sociale inhérente au dérèglement climatique. « Encore une fois, en 2023, les pays vulnérables ont été touchés de manière disproportionnée », regrette-t-elle dans un communiqué.
Une action politique nécessaire
Afin de prévenir et de limiter les impacts de telles catastrophes à l’avenir, la CESAP et l’OMM appellent à des objectifs plus ambitieux sur le climat et à l’accélération de la mise en oeuvre des politiques en la matière.
« Nous nous trouvons à un moment critique, où l’impact du changement climatique se recoupe avec les inégalités sociétales. Il est impératif que nos actions et nos stratégies reflètent l’urgence de cette époque », soutient Andrea Celeste Saulo, pour qui réduire les émissions de gaz à effet de serre et s’adapter à l’évolution du climat « ne sont pas seulement une option, mais une nécessité fondamentale ».
– Lou A.
Photo de couverture : Mékong. Flickr.