Soucieux de comprendre les différentes facettes de l’agriculture urbaine, Arthur, Guilhem et Hugo, étudiants en agronomie et en sociologie, partiront la semaine prochaine traverser l’Asie du Sud Est à vélo pour documenter différentes initiatives. Présentations.
C’est dans la perspective de s’intéresser aux schémas de production alimentaire et à l’avenir de la production agricole qu’Arthur, Guilhem et Hugo ont décidé d’enfourcher leur vélo pour sillonner les villes d’Asie du Sud-Est. Au programme : Chine, Vietnam, Thaïlande et Cambodge. Les trois étudiants sont soutenus dans leur démarche par l’association Agrovélocity, structure fondée en 2014 et dont l’objet est d’explorer les modèles agricoles contemporains.
Ces trois dernières années, les membres de l’association ont traversé l’Europe à deux roues ainsi que les côtes Est et Ouest des États-Unis. Cette année, les trois jeunes se sont associés à l’Institut national de la recherche agronomique (INRA) à qui ils remettront une étude technique à l’issue de leur périple. À leur retour, ils proposeront également un reportage vidéo afin de faire part de leur expérience.
Sérieusement menacée selon une étude faisant état du risque provoqué par le déclin de la biodiversité pour l’agriculture, la production alimentaire va être contrainte, dans les prochaines décennies, de s’adapter pour continuer à alimenter les populations humaines. D’une part des conséquences du changement climatique, d’autre part à la plus faible disponibilité des ressources énergétiques dont l’agro-industrie dépend lourdement, sans parler de l’artificialisation des terres.
Nous voilà face à un facteur de risque important qui participe aux migrations humaines forcées et à la déstabilisation géopolitique de régions entières. Une des réponses à ce défi de taille, pour les partisans d’une écologie profonde, est la relocation de la production, c’est-à-dire aux abords des lieux habités, voire au cœur des villes. Notons qu’avant le développement des hydrocarbures et des moyens de transport associés qui vont permettre une délocalisation accrue des productions, cette agriculture péri-urbaine a longtemps été une réalité partout dans le monde, y compris dans des villes comme Paris.
Le défi est d’autant plus important que selon les principales projections, non seulement la population mondiale va vraisemblablement continuer de croître dans les prochaines décennies, mais en plus la part des citadins va elle aussi continuer d’augmenter des conséquences d’un exode rural maintenu. Les Nations Unies estiment que d’ici 2050 deux tiers de la population mondiale vivra en ville ou dans un centre urbain. Face à la croissance rapide des villes, repenser les modèles d’approvisionnement devient inévitable. Dans ce contexte, l’agriculture urbaine permet une production locale en aliments frais, peut être source d’emplois et renforce la résilience régionale. Néanmoins, cette seule réponse n’est pas la panacée, puisque les phénomènes météorologiques extrêmes (températures, pluies, sécheresses) rendent toute production de nourriture de plus en plus délicate. On parle donc « d’adaptation » à une nouvelle réalité et non de « solution ».
Selon Hugo, l’agriculture urbaine est l’occasion de « réintroduire des végétaux et de la biodiversité, ne serait-ce que pour créer du lien entre les habitants ». Il insiste sur la dimension humaine des dispositifs et estime que « le principal avantage de cette forme d’agriculture n’est pas forcément la production, mais la création de liens entre producteurs et consommateurs ». Néanmoins, les experts estiment que la production alimentaire en ville peut jouer un rôle important dans l’absorption des chocs alimentaires à venir. Il faudra donc que chacun fasse preuve de tolérance et de raison envers l’agriculture urbaine, souvent conspuée par certains écologistes qui ne peuvent concevoir de production alimentaire en dehors de la campagne. Un manque de vision nuancée qui risque de coûter très cher en vies humaines tant il y a urgence.
Selon l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), « les jardins potagers peuvent être jusqu’à 15 fois plus productifs que les exploitations des zones rurales. Une superficie d’un mètre carré peut fournir 20 kg de nourriture par an. » Ainsi, dans les villes d’Asie on observe à la fois le développement de nombreux projets de ce type, comme des fermes urbaines de spiruline, et une agriculture vivrière, c’est-à-dire une agriculture essentiellement tournée vers l’autoconsommation là où vivent les populations. L’agriculture urbaine représente d’ailleurs aujourd’hui, villes et campagnes confondues, environ 20 % de la production alimentaire mondiale.
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