L’École Nicolas Tesla à Lyon se distingue : ici, les enfants choisissent librement leur emploi du temps ainsi que le contenu de leurs activités. Messodie, de la chaîne « Immersion »*, nous propose de découvrir le quotidien hors du commun des adolescents qui ont franchi la porte de cet établissement.
Depuis quelques années les « écoles démocratiques » alternatives, inspirées du modèle Sudbury, se sont multipliées en France. Inspirée de ce modèle, l’École Nicolas Tesla à Lyon a ouvert ses portes il y a trois ans. Cette école « hors contrat », qui n’a aucun lien avec l’éducation nationale et dont la gestion est autonome, bouleverse les codes. Ce qui implique que les frais d’inscription, calculés en fonction des revenus des parents, sont importants, afin de couvrir tous les frais de fonctionnement de manière indépendante.
Des élèves acteurs de leur apprentissage
Dans cet établissement, qui accueille des enfants de 6 à 18 ans « chacun décide librement de ses activités, dans une communauté auto-dirigée et stimulante », explique l’école. Autre particularité, « chacun peut participer aux décisions concernant la vie de l’école au jour le jour. Celles-ci sont votées démocratiquement et tout le monde a le même droit de vote. » L’école se distingue donc radicalement de l’organisation hiérarchique verticale qui caractérise généralement le système scolaire, et où la très grande majorité – si ce n’est l’ensemble – des programmes est imposée aux élèves.
Basée sur le modèle Sudbury, créé en 1968 aux États-Unis, il s’agit d’une méthode d’éducation qui pousse les enfants à être les acteurs de leur propre apprentissage. Sans professeur attitré, sans horaires imposés, ils décident eux-mêmes de l’organisation de leurs journées. Les encadrants accompagnent les enfants dans leur apprentissage, sans jamais les forcer à se pencher sur un domaine précis. Qu’en est-il de l’apprentissage de la lecture ou des mathématiques ? Les partisans de la méthode en sont convaincus, les enfants n’ont aucun mal à apprendre ces fondamentaux lorsqu’ils sont prêts à le faire. A contrario : pourquoi imposer ces matières à tous les jeunes en école primaire et au même âge, alors que certains n’en ont pas envie, et que dès lors des déséquilibres et des inégalités se créent entre les élèves ?
Et après ? Au retour dans le monde « réel » ?
Forcément, le reste de la société est formée à un modèle « classique » institutionnalisé. La question revient toujours : ces jeunes sont-ils pénalisés à la fin de leur scolarité ? Il n’existe pas encore d’études pour l’affirmer concernant les élèves ayant suivi ce parcours scolaire en France. Néanmoins, les partisans de la méthode citent volontiers un ouvrage publié aux États-Unis, The lives of Subdbury alumni (2005), selon lequel 80 % des jeunes ayant intégré une école Sudbury poursuivent leur parcours à l’université. Certains de ces élèves se distinguent même : c’est le cas de Laura Poitras, récompensée par un Oscar pour son travail de réalisatrice pour le documentaire sur Edward Snowden, CitizenFour. Cette forme d’apprentissage ne couperait donc pas du monde. Mais, comme dans toutes les écoles, l’échec reste envisageable.
« Il y a beaucoup d’écoles démocratiques qui se créent en France, mais le mouvement est jeune », explique Messodie, la réalisatrice, qui a choisi de se rendre à l’École Nicolas Tesla à Lyon, car l’établissement fait partie des plus anciens à appliquer cette méthode dans l’Hexagone. Selon elle, le modèle « inspire de la méfiance » : « la première crainte concerne l’avenir des enfants », observe-t-elle, et les parents se demandent si les enfants qui ont visité de type d’établissement « vont pouvoir travailler ». Et pourtant, rapporte la réalisatrice, « ce qui m’a marqué, c’est la maturité des enfants, qui sont pleins d’assurance et qui savent ce qu’ils veulent ». De quoi être inspiré par un modèle qui inverse le raisonnement : les élèves ne sont pas éduqués pour s’adapter à la société, mais décident librement de ce qu’ils veulent être, et donc former la société de demain. Un brin révolutionnaire ?
* »On rêve d’autre chose sans savoir à quoi cet autre ressemble concrètement » : Immersion ambitionne d’exposer la journée d’un lieu ou de personnes qui pensent différemment et qui ont mis en place un projet pour le bien commun. La réalisatrice de la série, Messodie, propose d’ « aller à la rencontre de ces gens-là et de partager leur quotidien », avec l’envie d’offrir au public d’autres visions du monde.
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