Chaque année, l’air du grand nord canadien s’emplit d’une odeur de sang. La banquise se teinte d’un rouge écarlate. Le sang de phoques innocents colore les glaces. Un carnage en pleine nature qui se perpétue d’année en année dans une indifférence relative. Cette année encore, le Canada donne son accord pour l’abatage de 400 000 têtes.
Plusieurs dizaines de milliers de phoques seront à nouveau abattus sur les vastes étendues glaciaires du grand nord Canadien courant 2015. La plupart des animaux tués ne sont encore que des jeunes phoques. Pas assez véloces pour s’échapper, ils tombent facilement aux mains des chasseurs. Leur peau est particulièrement appréciée de l’industrie textile de luxe.
Difficile d’imaginer cette pratique respectueuse de l’animal. La chasse au phoque est une industrie comme une autre. Elle n’a aujourd’hui rien de traditionnelle et ne peut prétendre à aucun justificatif en matière de bien-être animal. Les règles internationales en matière n’imposent pas de normes d’abattage sans cruauté. Ce vide légal donne une liberté totale aux gestes particulièrement cruels. Fusils, harpons, ou encore des gourdins de bois munis d’un crochet appelés hakapik, les techniques employées suggère un véritable massacre, le plus souvent éclair, qui laisse des traces visibles sur l’environnement local.
Image : nycanimalrights.com
En pratique, les chasseurs s’organisent pour pénétrer de manière rapide parmi un groupe de phoque surpris afin d’en abattre un maximum avant qu’ils ne puissent s’échapper. Outre le fait que 42% des phoques sont écorchés vivants, c’est bien l’image de jeunes phoques blessés errant sur la banquise en agonisant qui touche généralement le plus l’opinion publique. Une pratique jugée peu courageuse, voire ignoble, par les défenseurs des animaux.
Ce qui motive le pouvoir à conserver cette pratique ce sont les stocks de cabillaud. Les chasseurs persistent à dire que les phoques sont responsables d’une diminution des stocks naturels de poissons ce qui menacerait tout un pan de l’économie canadienne. Mais les objecteurs et associations estiment que le cabillaud fut décimé par des décennies de surpêche irraisonnée. La biodiversité, elle, se régule sans se soucier de l’activité humaine.
Utilisation d’un hakapik, arme de chasse. Crédit image © IFAW
La plus grande partie de la chasse aux phoques a lieu vers la fin des mois de mars et avril. Mais la peau n’est pas le seul motif à ces massacres. Certains chasseurs des Îles-de-la-Madeleine vont jusqu’à organiser des excursions où le touriste moyen est invité à abattre des phoques sauvages. Notons que la chasse aux blanchons est strictement interdite depuis 1987. Interdiction qui tentent aujourd’hui de braver certains chasseurs (source).
Pour les défenseurs de ces animaux, il existe une lueur d’espoir. On observe depuis quelques années un déclin inévitable de l’industrie de la chasse aux phoques. Si bien que la pratique doit être mise sous-perfusion économique par le gouvernement canadien pour survivre. Sans ces aides d’état, les chasseurs auraient déjà changé de secteur d’activité depuis longtemps. Si la chasse aux phoques est bien ouverte depuis le 14 mars aux Îles-de-la-Madeleine, aucun animal n’a encore été abatu. Le troupeau local s’est « dégolfé » du Saint-Laurent juste à temps…(source)
« La chasse aux phoques est vouée à disparaître. Depuis 20 ans, elle ne doit sa survie qu’aux subventions de l’État. Il n’existe plus aucun marché pour les produits issus de cette chasse aussi cruelle qu’inutile », tranche Céline SisslerBienvenu, Directrice d’IFAW France. « La question est simplement de savoir si le gouvernement canadien est enfin prêt à regarder la réalité en face et à trouver des alternatives économiques pour les chasseurs, ou s’il préfère continuer d’agir comme si ce secteur économique avait un avenir. In fine, seule l’opinion des électeurs de la région lui importe vraiment. »
L’UE et la Russie on notamment imposé des restrictions à l’importation des peaux de phoques. En raison de la demande insuffisante, signe que les mentalités évoluent en faveur des animaux, le quota est loin d’avoir été atteint l’année dernière. On a dénombré 59 318 phoques abattus en 2014 contre plus de 97 000 l’année précédente. L’évolution vers une « abolition » économique semble en bonne voie même si des organismes comme l’OMC dépensent des fortunes contre les interdictions jugées entraves au libre commerce. L’évolution des règles et des mentalités vont-ils faire baisser ce chiffre à zéro phoque tué ?
Sources : notreplanete.info / seashepherd.fr / ifaw.org / Image à la une Cape Breton Post