[ Reportage ] Global Sushi

Faute de poissons, demain nos enfants mangeront des méduses ?

28 millions de tonnes de poissons sont consommés chaque année dans les pays industrialisés. Nous consommons du poissons largement plus rapidement que la nature peut nous en donner. Résultat, un appauvrissement graduel mais réel des stocks. L’abondance actuelle serait alors temporaire. Une illusion impalpable qu’aucun de nous ne souhaite affronter.


Le cas du Sushi est alors révélateur des limites à la Croissance dans le domaine des ressources.
Voir la publication de Mr Mondialisation

On savait que le thon rouge était menacé de disparition, on découvre avec « Global sushi, demain nos enfants mangeront des méduses » que notre fringale de poisson risque de vider les mers de trois quarts des espèces… d’ici 2050.

« La pêcherie industrielle mondiale s’est développée sur la culture du profit à court terme, c’est une allégorie de la crise financière », remarque Jean-Pierre Canet, réalisateur et co-auteur du documentaire. (Voir la bande-annonce)

En prenant comme point de départ le sushi, ce symbole de la « world food » qui, dans une même bouchée, procure sensation d’exotisme et de nourriture saine, les auteurs s’assurent un effet maximal sur la conscience du consommateur.
« Manger moins de poisson mais mieux »

Si le film n’invite pas à ne plus manger de poisson, grâce à un détour par les méthodes de pêche (que ce soit à la senne ou au chalutier) et les cuisines des rouleurs de « california rolls », il coupe sérieusement l’appétit.

« On n’est pas là pour faire la morale », jure néanmoins Jean-Pierre Canet, qui revendique une « démarche engagée mais pas militante ». Le réalisateur voudrait nous suggérer de « manger moins de poisson mais mieux, c’est d’ailleurs ce qu’est le sushi traditionnellement, un plat de fête. »

L’échec collectif de cette culture mondialisée n’est pas à mettre entièrement sur le dos des pêcheurs. Même s’il y a de quoi enrager à voir le patron des pêcheurs sétois, qui autrefois alertait les autorités sur les risques de la surpêche, se jouer aujourd’hui des contrôles en mettant ses bateaux -dont l’achat a été subventionné à coups de millions- sous pavillon libyen.

Pour Jean-Pierre Canet :

« C’est un peu facile de s’en prendre aux pêcheurs alors qu’ils vivent une révolution accélérée, font un métier très dur et que certains font de réels efforts pour rendre la pêche durable, par exemple le label MSC. »

« Un lobby électoral »

Et si l’enquête ne parvient pas à trouver un responsable, c’est justement parce que, du fait de la mondialisation, il n’y en a pas vraiment. Si la France et l’Europe interdisaient le commerce du thon rouge, cela n’empêcherait pas d’autres pays de le pêcher, d’en faire commerce, et l’espèce continuerait d’être menacée.

Ainsi, insiste l’auteur, depuis que l’Europe a introduit des quotas qui contraignent nos pêcheurs, nos voisins méditerranéens viennent se servir (Turcs au premier plan, Tunisiens et Algériens également) :

« Comme la crise financière, la surpêche pose le problème de la gouvernance mondiale. »

C’est pourquoi le film refuse délibérément de taper sur les responsables politiques nationaux. Mais Jean-Pierre Canet précise aussi, pour éclairer la timidité de la position française :

« Les pêcheurs sont aussi un lobby électoral, par exemple en Languedoc-Roussillon, que la droite peut de nouveau espérer gagner depuis que l’affaire Frêche divise la gauche. »

► « Global sushi, demain nos enfants mangeront des méduses », un documentaire de 90 minutes de Jean-Pierre Canet, Damien Vercaemer et Jean-Marie Michel.

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