L’association militante pour la défense des animaux dévoile aujourd’hui une nouvelle enquête, et les images sont glaçantes. C’est dans un abattoir breton que l’horreur a lieu : plus de 2000 truies y sont mises à mort chaque semaine dans des conditions abominables. L214 réclame la fermeture urgente de cet abattoir qui fait partie des unités de production des Mousquetaires, marque bien connue du géant Intermarché.
Situé à Briec dans le Finistère, cet abattoir est spécialisé dans l’abattage des truies de réforme, aussi appelées aussi « coches ». Ces truies, qui ont passé leur courte vie dans un élevage intensif à donner naissance à des porcelets, sont ensuite envoyées à l’abattoir, où l’horreur continue. Ce dernier, qui se présente comme le « premier site Français spécialisé dans la première et deuxième transformation de coches », a pourtant déjà été épinglé dans un rapport des services vétérinaires en 2016. Cinq ans plus tard, rien ne semble avoir changé : les installations et pratiques du lieu demeurent non conformes à la réglementation et entraînent des souffrances extrêmes pour les animaux, en plus d’être dangereuses pour les employés.
L’élevage porcin français : un modèle maltraitant
Malgré une légère baisse enregistrée ces dernières années, le porc reste la viande la plus consommée par les français avec 33 kg par an et par habitant. Pour satisfaire une telle demande, la filière porcine du pays produit aujourd’hui près de 23,8 millions de porcs chaque année. La France se satisfait donc d’être complètement autonome en viande porcine, mais cela n’est pas sans prix. 95 % des cochons élevés dans nos régions le sont selon le modèle le plus intensif aujourd’hui : une vie sans paille ni accès à l’extérieur.
Les truies reproductrices, dont nous parlons aujourd’hui, sont quant à elles maintenues environ la moitié de leur vie dans des cages individuelles étroites qui ne leur permettent même pas de se retourner. D’abord dans des « cages de gestation », dans laquelle elles sont placées durant 4 semaines après la saillie puis 1 semaine avant la mise bas, et ensuite dans des « cages de maternité », durant la période de mise bas et d’allaitement des porcelets qui suit. Le reste du temps, la réglementation exige qu’elles soient gardées en enclos de groupe, rarement beaucoup plus confortables pour l’animal.
Des truies poussées à l’hyper production
En plus de ces conditions de vie déplorables, les truies sont poussées à l’hyper production de porcelets destinés à la consommation humaine. Alors qu’elles mettaient au monde en moyenne 16 porcelets par an en 1970, elles en donnent aujourd’hui 29. Pour parvenir à de tels chiffres, les porcelets sont sevrés toujours plus tôt, et l’intervalle entre le sevrage et la nouvelle saillie est sans cesse réduit. C’est ce qu’on appelle la zootechnie, soit un ensemble de techniques (sélection génétique, alimentation, modes d’élevage) mises au point pour améliorer les gains de productivités.
Dans cette optique, les animaux sont considérés comme de simples marchandises, dépourvues de toute sensibilité. Pourtant, plusieurs études démontrent aujourd’hui l’intelligence des cochons, mais aussi leur capacité à différencier les individus, à faire preuve d’empathie ou de sentiments et de se souvenir de certains évènements, voire à en anticiper d’autres.
L’horreur à Briec
Les truies, après 33 mois enfermées pour moitié du temps dans des cages individuelles, épuisées et blessées, ne sont ensuite plus que destinées à être mises à mort. Et c’est là que l’enfer se poursuit. Les images choc filmées en février 2021 révèlent l’horreur à l’abattoir SBA Briec dans le Finistère. Dans la vidéo commentée par Frédéric Lenoir, on distingue ainsi des truies qui n’arrivent plus à se déplacer, poussées à coups de pied et d’aiguillon électrique. Certaines reçoivent des coups d’aiguillon dans l’anus ou dans les yeux pour avancer plus vite. Plus tard, deux cochons se retrouvent totalement bloqués dans les couloirs, provoquant un mouvement de panique. Un des deux sera mis à mort sur place, avant de se faire piétiner par ceux qui attendent, sans le savoir, leur tour. Au poste d’étourdissement, c’est le chaos. Le box d’immobilisation est inadapté aux différents gabarits de cochons et dangereux pour les employés. L’opérateur se sert de la pince à électronarcose pour contrôler les animaux paniqués, alors qu’elle devrait être exclusivement utilisée pour l’étourdissement. Ils reçoivent alors des chocs extrêmement douloureux.
Ces pratiques scandaleuses ont pourtant déjà été révélées lors d’un contrôle des services vétérinaires effectué en 2016. En effet, c’est suite à plusieurs enquêtes diffusées par L214 en 2015 et début 2016, que le ministre de l’Agriculture de l’époque, Stéphane Le Foll, avait ordonné un audit généralisé de tous les abattoirs de boucherie. C’est dans ce contexte que les services vétérinaires ont inspecté l’abattoir de Briec. L’évaluation globale avait conclu à la note « B – Non-conformité mineure » et les inspecteurs avaient relevé nombre d’infractions qu’on retrouve sur ces images, cinq ans plus tard.
L214 porte plainte et dénonce l’inaction des autorités
Au vu de l’horreur des images, L214 porte plainte pour sévices graves commis envers des animaux auprès du procureur de la République de Quimper et demande à la justice de sanctionner sévèrement la direction de l’abattoir ainsi que les services vétérinaires du département. L’association introduit également un recours en responsabilité contre l’État pour manquement à sa mission de contrôle de l’application de la réglementation et demande la fermeture d’urgence de l’abattoir. Une pétition est adressée à Julien Denormandie, ministre de l’Agriculture, et à Michel Mahé, préfet du Finistère, pour appuyer cette demande.
Sébastien Arsac, porte-parole de l’association L214, déplore la violence de ces images et l’absence de réaction des autorités il y a cinq ans : « une nouvelle enquête, un nouveau scandale. La responsabilité des services vétérinaires et du groupe Les Mousquetaires à qui appartient cet abattoir est totale. Une fois de plus, on constate l’extrême souffrance des animaux pour la viande. »
Ce triste exemple nous rappelle encore une fois l’épouvantable réalité des animaux nés et mourants au sein de la chaine des élevages intensifs. Cette industrialisation du vivant pousse à une déshumanisation complète de la gestion des animaux, pourtant doués de sensibilité et d’émotions. Ils sont alors traités comme de simples marchandises, destinées uniquement à engendrer des profits. Combien de temps encore cette maltraitante du Vivant perdurera-t-elle ? « L’enfer n’existe pas pour les animaux, ils y sont déjà… » , disait Victor Hugo. « Avec cet abattoir de Briec en Bretagne, nous y sommes totalement », regrette Sébastien Arsac.