Strasbourg – Faire en sorte que des personnes venant d’horizons divers et de situations sociales différentes puissent se retrouver, partager et promouvoir des initiative individuelles et collectives artistiques, culturelles ou sociales, c’est le pari qu’ont fait les fondateurs de l’association Mimir lorsqu’ils ont imaginé ce projet audacieux il y a plus de six ans. Fermé le temps de se refaire une nouvelle jeunesse, Mimir est aujourd’hui sur le point de renaître de ses cendres. Découverte.
La maison Mimir est une bâtisse au style traditionnel située au 18 rue Prechter à Strasbourg vieille de près de 500 ans ! Construite en 1550, elle a été remarquablement reconvertie en centre social et culturel autogéré. En effet, en janvier 2010, trouvant « inacceptable que 10 500 logements soient laissés vides », des travailleurs sociaux et des personnes sans domicile se rencontrent et décident d’occuper cette ancienne bâtisse municipale abandonnée depuis onze ans afin de donner vie à un lieu d’habitation, de rencontre et de création. Certains y élisent domicile et de nombreuses autres personnes rejoignent rapidement l’aventure.
En 2013, après plusieurs rappels à l’ordre et menaces d’expulsion, un bail emphytéotique de vingt ans (jusqu’en 2033) est finalement signé avec la mairie de la ville, permettant au collectif de se projeter sereinement dans l’avenir et de garantir la pérennité du projet. Le squat improvisé se transforme étape par étape en papillon, véritable symbole culturel et social au cœur de Strasbourg. Chacun est le bienvenu dans cet espace de rencontre, de détente et d’initiatives. En six ans c’est plus de cinquante personnes aux origines différentes qui ont vécu dans la maison, se relayant au fil des saisons, avec toujours le même leitmotiv : « s’épanouir hors des sentiers battus et permettre l’accès à la culture pour tous ».
Photographie : Ludo Pics Troy
La maison Mimir est aujourd’hui autofinancée par des dons libres de personnes « qui viennent et apprécient l’endroit », mais également de citoyens qui organisent de nombreux événements tels que des repas, des spectacles, des concerts, des ateliers, des conférences, etc. Un bar associatif, Le Barakawa, pierre angulaire de l’activité de la maison, y est aussi tenu du mercredi au vendredi de 18h à 23h. On y sert des boissons sans alcool. Un service de bagagerie est également assuré pour les personnes sans domicile fixe et une friperie est tenue régulièrement (vide dressing et vide bibliothèque). Tout est à prix libre afin de « questionner le rapport à l’argent et ne pas conditionner les relations humaines au facteur financier » et l’entraide, le troc et l’échange sont mis à l’honneur. L’argent récolté est ensuite réinvesti dans la maison afin de la rénover, d’acheter du matériel, de la nourriture, d’organiser des événements, etc.
« La Maison Mimir souhaite être un espace à dimension humaine favorisant la rencontre, l’échange, la création et la solidarité, et mettre à disposition une partie de cet espace pour promouvoir les initiatives individuelles, collectives et associatives. » confient les responsables.
Six ans plus tard, après avoir accueilli plus de 2000 visiteurs par année, ainsi que des associations sociales et culturelles, et avoir assuré son service de bagagerie et de douche en libre service auprès de plus de 200 personnes sans domicile d’au moins vingt nationalités différentes, la maison Mimir est malheureusement fermée (même si elle demeure accessible aux membres et aux curieux) afin de réaliser des travaux de rénovation et de mises aux normes ERP (Établissement Recevant du Public). Le collectif espère pouvoir ouvrir ses portes à nouveau fin septembre 2016 pour assurer ses fonctions auprès des citoyens. En conséquence, en partenariat avec un collectif de jeunes architectes et après huit mois de phases de conception, de prises de décisions collégiales et de négociations avec la mairie, il a été lancé une campagne de financement participatif sur Ulule afin de récolter les fonds nécessaires à ce renaissance.
Il est également possible de participer physiquement en prenant contact avec l’organisation. De nombreux renseignements sont présents sont disponibles sur leur site internet, notamment le descriptif du chantier, la liste des matériaux, outils et accessoires nécessaires aux travaux et à l’aménagement du lieux, mais également des compétences recherchées ou des biens de première nécessité comme du sucre, du café ou des ustensiles de cuisine.
Afin de respecter les valeurs qu’ils prônent, nécessairement en lien avec l’écologie, le collectif a cherché à mettre en œuvre des solutions techniques performantes tout en restant solidaires et écologiques. « Pour limiter notre consommation et le gaspillage, nous récupérons au maximum ce dont nous avons besoin. » L’isolation du plafond et des murs se fera par exemple à partir de bouchons en liège collectés puis broyés en flocons (un très bon isolant) et d’isolant métisse (plaques de coton issues de vêtements recyclés).
Photographie : Alban Hefti
La rénovation se fera ensuite sous forme d’un chantier participatif entre les mois de juin et septembre auquel tout le monde pourra participer bénévolement (aussi bien en fournissant du matériel qu’en mettant ses compétences et sa force de travail à disposition). Le premier pallier de la campagne de financement participatif est pratiquement atteint. Il reste quelques jours pour participer et plusieurs semaines pour rejoindre l’équipe sur place.
Les lieux autogérés sont un patrimoine symbolique précieux. Et pour cause, ces endroits alternatifs de vivre-ensemble, de solidarité et d’initiative sociale et culturelle, qui ne soient pas soumis à la loi du marché, se font rares. Espace de référence pour le grand public strasbourgeois engagé, la maison Mimir est très certainement un exemple réussi d’autogestion, démontrant que le modèle est viable quand on se donne les moyens de le faire fonctionner.
Sources : Maison Mimir, Ulule / Photographies livrées par la maison Mimmir