Qui n’a jamais joué aux machines à pince qui abreuvent les Luna Park et fêtes foraines ? Et qui n’a jamais eu le sentiment que ces machines conspirent contre vous pour vous faire perdre ce superbe nounours que vous vouliez offrir à votre ami(e) ? Ce n’était pas qu’un sentiment, les machines à pince nous font effectivement perdre.
Quand j’étais plus jeune, je me souviens avoir gagné trois peluches d’affilée à une machine à pince. Attirant l’attention, un responsable est venu m’arrêter pour ouvrir la machine et y tapoter quelques boutons. Il fut par la suite impossible d’en gagner d’autres. Nombreux s’en doutaient déjà sans pouvoir le démontrer, c’est désormais chose faite : les machines à pince sont conçues pour vous faire perdre et la supercherie va plus loin qu’on l’imagine.
Ce n’est donc pas votre imagination, la puissance des princes des « machines à nounours » varie de manière sciemment étudiée pour faire perdre le joueur sans forcément susciter le doute. La supercherie fut détaillée par Vox, un média américain dont la chaine Youtube s’évertue à dévoiler certaines vérités. Ils révèlent ainsi que les machines à pince sont plus proches du ticket à gratter que du jeu de dextérité.
Et en effet, si on prend la peine d’observer les manuels d’utilisation que les fabricants remettent à leur client, on constate que les rouages technologiques pour vous faire perdre son infiniment complexes. Avant tout, il faut comprendre que la force avec laquelle la pince se referme dépend d’une basique intensité de courant. Une intensité qui se révèle variable en fonction d’une multitude de facteurs.
Sur les machines modernes, il est possible de fixer l’intensité de la pince en fonction de la zone de largage, du nombre de tentatives ratées ou réussies, du profit souhaité, d’un pourcentage de gain fixé. Il suffit d’entrer les données et la machine va elle même décider du nombre de gagnants dans la journée tout en variant légèrement le rythme de gain pour éviter qu’on puisse repérer la supercherie. Il est même possible de désactiver une pince pendant un transport réussi afin d’augmenter l’excitation du joueur et ce sentiment de « j’y étais presque ! » . Une manière de l’encourager à rejouer, alors que la notion même de jeu est dissolue.
Ainsi, les nombreux paramétrages assurent au propriétaire d’être toujours gagnant. Mais si la machine sait à l’avance que vous allez perdre, est-ce toujours un jeu de dextérité ? C’est là toute l’ingéniosité (ou perversité) d’un tel système. Il fait croire à celui qui joue que la réussite dépend de ses capacités ou son intelligence, alors qu’il s’agit avant tout d’un simple jeu de probabilité. Par facilité, l’exploitant peut entrer dans la machine la valeur moyenne de l’objet à gagner, le prix d’une partie et le profit souhaité. Envie de faire 1000 euros de bénéfice cette semaine ? La machine va s’adapter automatiquement pour atteindre cet objectif au détriment des joueurs dont certains gagneront malgré tout.
Chaque responsable peut donc paramétrer ses machines à sa guise et de manière totalement arbitraire. Certains préféreront placer la chance de gain proche de zéro pour engranger un maximum de bénéfices grâce à la naïveté des badauds; d’autres, plus rares, feront preuve d’éthique en donnant une chance raisonnable de gagner. Les paramètres peuvent évoluer en fonction des saisons et des périodes pour embrouiller les joueurs réguliers. Les machines les plus modernes peuvent communiquer sans fil avec un ordinateur affichant en temps réel les statistiques de gains avec la possibilité de modifier les réglages à distance en un clic de souris.
Ainsi, le consommateur se trouvant parfaitement ignorant des rouages du système, offre à l’entreprise la possibilité de réaliser un vol ordinaire et consenti. Une analogie au capitalisme de connivence mondialisé vous dites ? Si la fabrique du consentement repose sur l’ignorance, le savoir rend probablement libre. Maintenant, vous savez.
Source : web.archive.org / laboiteverte.fr