« Regarde ailleurs » : l’accueil des personnes réfugiées ou l’hypocrisie de la France (film)

Présent sur place pendant et après le démantèlement du camp de réfugiés de Calais, le réalisateur Arthur Levivier nous expose sans pathos les causes, les espoirs et les attentes qui ont poussé des dizaines de milliers de personnes réfugiées jusqu’en Europe. À travers leur regard et leurs maux, il raconte la politique française d’accueil et son hypocrisie. On y découvre un décalage glaçant entre la vision des français sur les réfugiés et la réalité du terrain. Son film Regarde Ailleurs, sortira le 13 février prochain. L’équipe de Mr Mondialisation le recommande vivement.

Immergé pendant plusieurs mois au cœur de ladite « jungle » de Calais, le réalisateur Arthur Levivier a suivi le démantèlement, sous le commandement de l’État français, des abris de fortune qui ont « protégé » des milliers de personnes pendant des années. Le réalisateur donne un nom, un visage, une voix, aux personnes qui, à l’automne 2016, sont expulsées du lieu sans autre perspective que de fuir sous les ponts et de se cacher dans les espaces délaissés. Ces personnes ont pourtant déjà parcouru des milliers de kilomètres depuis l’Afrique Subsaharienne et le Moyen-Orient et pour beaucoup, ce n’est pas la première fois qu’elles observent avec impuissance la destruction de leur lieu de vie. Mais en France, pays des Droits de l’Homme, elles sont une nouvelle fois poursuivies par la police et harcelées par l’administration.

Arthur Levivier met en perspective de manière crue le discours politique et la réalité de terrain. Car derrière les mots des décideurs et leurs prétentions humanistes, ce qui sautait aux yeux à Calais, c’est la précarité et la détresse à laquelle sont confrontées au quotidien les personnes exilées qui traversent la France et qui ne peuvent compter que sur le soutien sporadique du pays. Généralement en fuite, poursuivies, menacées par la guerre et la détérioration des conditions de vie dans leur pays respectif, elles cherchent à se construire une nouvelle vie, à apprendre la langue du pays et à s’intégrer économiquement. Souvent, ces hommes, femmes et enfants partagent le rêve de pouvoir retourner chez eux dès que cela sera possible. Un son de cloche qu’on entend rarement ailleurs. Mais est-ce étonnant ? Il est très rare qu’on leur donne la parole dans les médias classiques, ce qui les déshumanise encore plus aux yeux des spectateurs.

Crédit image : Arthur Levivier
Crédit image : Arthur Levivier

Le film indépendant Regarde ailleurs nous oblige à nous confronter à la réalité, à cesser de détourner le regard au motif d’arguments fallacieux qui aident à faire oublier le drame humain en cours. Le film nous sort des clichés confortables et commodes qui permettent à leurs partisans de faire oublier les raisons profondes pour lesquelles les exilés ont quitté leur domicile, leur famille, leur pays. Arthur Levivier nous rappelle, surtout, que les personnes réfugiées, ce sont des hommes, des femmes, parfois des enfants et que rien, non absolument rien, ne justifie la répression, la violence, la discrimination et la haine dont sont victimes ces êtres humains.

Mais nous regardons ailleurs.

Alors que la France durcit depuis plusieurs mois ses conditions d’accueil dans la continuité du démantèlement du camp de Calais, c’est désormais dans l’indifférence quasi générale que le pays se rend complice des milliers de noyades aux bords des frontières de l’Europe.

Vous êtes une association, un cinéma, une école et souhaitez organiser une projection dans le cadre de vos activités ? Vous pouvez contacter Arthur Levivier, qui intervient, en particulier auprès de jeunes publics, pour présenter son travail et échanger à propos de son expérience par mail : contact@filmregardeailleurs

Synopsis : L’Europe, États de droit et terres d’accueil ? Regarde Ailleurs dénonce ce qu’il se passe dans de nombreuses villes européennes en prenant l’exemple de Calais. De l’expulsion de la «jungle» en octobre 2016 jusqu’à la situation sur place un an plus tard, le réalisateur Arthur Levivier a partagé des moments de vie avec des hommes et des femmes d’origine soudanaise, afghane, éthiopienne, érythréenne et des habitants de Calais. En soulignant le décalage qu’il existe entre le terrain et les discours officiels, ce film nous montre la stratégie mise en place pour dissuader les exilés de rester. Avec des méthodes de tournage originales et son regard citoyen, le réalisateur a réussi à filmer le harcèlement étatique, les mises en scène médiatiques, mais aussi la force et l’humour des exilés.

Crédit image : Arthur Levivier

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