À San Francisco, ce n’est pas une maison bleue qui est adossée à la colline, mais un jardin partagé d’un hectare et demi : Alemany Farm. Un joli mélange de production de légumes, de vergers, ruches, vignes et zones sauvages, soutenu par le climat californien qui permet de cultiver toute l’année. L’année dernière, ce ne sont pas moins de 11 tonnes de fruits et légumes qui ont été produits sur place et donnés sur un marché gratuit ainsi qu’aux bénévoles qui participent à l’entretien du lieu. Nous avons rencontré François Gaudin, français résidant à San Francisco, tombé sous le charme de ce jardin, et qui a souhaité nous en dire un peu plus.
Un « simple » coin de verdure
« C’est un endroit assez fascinant: coincé entre une colline et une autoroute, on peut se perdre au milieu des plantes, des arbres ou entre deux rangs de tomates et substituer la fatigue mentale d’une semaine au bureau par une saine et relaxante fatigue physique. Assis dans la terre, on peut passer des heures à discuter développement durable ou à méditer en silence selon les jours », nous confie François. Et ce lieu, qui appartient majoritairement à la ville, est entièrement géré par l’association Friends of Alemany Farm. Des bénévoles actifs depuis maintenant 10 ans s’occupent de la gestion des cultures.
La première fois que François a entendu parler d’Alemany Farm, c’était il y a deux ou trois ans, lorsqu’il se renseignait sur les opportunités de jardins partagés à San Francisco. À l’époque l’enjeu pour lui, comme pour beaucoup d’autres, était de mettre en pratique les idées qu’il avait pu trouver dans des livres de permaculture ou sur internet. Il avoue avoir passé tellement de temps à la ferme cette dernière année, que l’équipe de Friends of Alemany Farm a finalement décidé de l’inviter à les rejoindre.
L’histoire d’Alemany Farm, c’est avant tout l’histoire de ses occupants et comment ils ont changé leur conception des choses au contact de la nature et des autres. Le but de l’association est double. Il s’agit bien sûr d’améliorer la sécurité alimentaire et de promouvoir l’éducation à l’environnement, à l’agriculture urbaine et au développement durable, le tout grâce à l’organisation d’ateliers. Mais, pour François, le gros de l’activité se trouve ailleurs, dans la culture de la terre à proprement parler, une reconnexion bien nécessaire.
« Plusieurs jours par semaine, des dizaines de bénévoles viennent aider à faire du compost, désherber, amender, planter et récolter salades, tomates, courgettes, haricots verts, etc. dans une ambiance bon enfant. Chaque weekend de nouvelles personnes viennent se mélanger aux habitués et il est intéressant de rappeler ce rôle de transmission que nous jouons. Ce que nous récoltons aujourd’hui a été planté par des inconnus des semaines plus tôt et le fruit de notre travail de la journée fera le bonheur de quelqu’un d’autre plus tard dans la saison. »
Un espace de partage à protéger et faire grandir
Ce coin de verdure en plein cœur d’une grande ville telle que San Francisco représente un véritable espoir quant à l’avenir des villes. Cette agriculture urbaine et familiale que représentent les jardins partagés sonnent comme une promesse individuelle et collective. Une promesse de partage, de solidarité. C’est ce qu’expose la philosophe Joëlle Zask, auteure du livre La démocratie aux champs, pour le journal Basta Mag.
« Cultiver la terre, c’est aussi se cultiver soi, et cultiver la communauté. Cette culture à trois étages forme un tout cohérent, satisfaisant humainement, à la portée de tout le monde, resocialisant, cicatrisant, très intégrateur, qui permet aussi à tous ceux qui ne maitrisent pas le langage de dialoguer avec leur environnement. Les mouvements actuels de permaculture sont animés par des considérations écologiques, mais ils s’inscrivent aussi dans ce paradigme de cultiver la terre en se cultivant soi-même et en formant une communauté. C’est une expérience que l’on retrouve un peu partout sur la planète. C’est intéressant de découvrir cette humanité commune du jardinage. »
Et si ces lieux sont synonymes de belles évolutions en ce qui concerne l’avenir de nos vies urbaines, il nous appartient de les défendre et de les rendre pérennes. François nous explique d’ailleurs que si Alemany Farm vit depuis 10 ans, ce n’est que depuis l’année dernière qu’une première employée a pu être engagée grâce aux subventions et dons reçus. Une belle avancée puisqu’une personne était indispensable pour s’occuper de gérer la ferme, d’encadrer des stagiaires et de développer les programmes associatifs de l’association au quotidien.
Pour continuer dans leur lancée et pour défendre l’avenir d’Alemany Farm, l’association lance d’ici la fin du mois d’octobre une campagne de financement participatif. La somme récoltée servira à pérenniser l’emploi et développer leurs projets. D’ici là, l’association poursuit sa mission d’éducation dans une logique de rencontres et de partages, avec notamment l’organisation d’un évènement ce 21 octobre, la fête de la récolte (Harvest Fest) et la lancement d’une récolte de fonds. Le tout est à découvrir sur www.alemanyfarm.org ! Vous pouvez également fonder votre propre jardin collectif dans votre région grâce à ce tutoriel.
Propos recueillis par l’équipe de Mr Mondialisation / Alemany Farm / Basta Mag
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