Le combat pour la sauvegarde des écosystèmes planétaires est difficile et souvent vain. Il arrive cependant qu’à force d’obstination les militants finissent par arracher quelques victoires retentissantes aux pouvoirs publics. Nous vous retraçons les dix plus belles réussites de la dernière décennie.

2013 : un projet de scierie géante stoppé dans le Morvan

En 2013, le groupe Erscia tente d’implanter une scierie géante associée à un incinérateur sur plus de 92 hectares de forêt. Très vite, les locaux s’opposent à cette construction et mettent tout en œuvre pour le faire capoter. Manifestations, pétition, occupation du terrain, les lieux se transforment même en ZAD (Zone à défendre). Après plusieurs actions en justice, le Conseil d’État enterre le projet.

La situation du Morvan symbolise parfaitement la politique désastreuse de la France en matière de forêt. Adepte des coupes rases, l’hexagone saccage des hectares de feuillus, bénéfiques pour le climat et la biodiversité, pour les remplacer par des monocultures de résineux beaucoup moins résilients et intéressants écologiquement. À tel point que certains militants ont décidé de s’associer pour racheter les bois afin de les gérer correctement.

2014 : Fin des pesticides dans l’espace public

Début 2014, le parlement vote une nouvelle loi qui s’est depuis appliquée en 2020 et 2022 : l’interdiction des pesticides dans les espaces verts, puis chez les particuliers. Il s’agissait alors d’une très bonne nouvelle pour la biodiversité qui allait pouvoir souffler un peu.

En effet, ces produits sont la première cause du déclin des populations des insectes, eux-mêmes essentiels dans l’équilibre de notre écosystème. Cet enjeu concerne également la santé publique puisque l’on sait aussi que ces molécules sont dangereuses pour le corps humain. Hélas, dans l’agriculture, la tendance n’est pas à la baisse ; en valeur brute, la France est le troisième pays au monde qui utilise le plus de pesticides, avec 110 000 tonnes par an.

2015 : loi anti-gaspillage alimentaire

Les bonnes mesures issues du quinquennat de François Hollande ne sont pas très nombreuses, c’est un euphémisme. Mais celle-ci en fait partie ; à cette époque, l’assemblée vote une loi anti-gaspillage alimentaire.

Depuis lors, il est interdit pour les grandes surfaces de détruire de la nourriture encore consommable. Elles ont de plus l’obligation de faire don de leurs invendus à des associations venant en aide aux personnes précaires ou aux animaux. À défaut, les produits devront être valorisés en compost ou dans l’énergie.

Reste maintenant aux citoyens de surveiller leur consommation : les Français jettent en effet trente kilos de nourriture (dont sept encore emballés) chacun par an. Ce chiffre colossal ne représente pas moins de 67 € gaspillés par mois. Un drame lorsque l’on sait qu’un être humain sur neuf dans le monde se couche chaque soir avec la faim au ventre.

2016 : Interdiction du chalutage en eau profonde

L’histoire commence trois ans plus tôt avec une simple BD. Dans son œuvre, l’autrice Pénélope Bagieu alerte l’opinion publique sur les ravages écologiques du chalutage en eau profonde.

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Très vite, ces dessins font beaucoup de bruit et sont massivement partagés en ligne. Une pétition voit le jour et remporte un franc succès. Au bout du compte, après plusieurs années de lutte, l’Union européenne finit par céder à la pression populaire et fait interdire la pratique.

2017 : La bétonisation de décathlon déboutée

Depuis 2013, le village de Saint-Jean-de-Braye était sous la menace de la construction d’un centre commercial de sport Décathlon. Près de seize hectares de zones naturelles et agricoles devaient ainsi être bétonnées. Mais après quatre ans de lutte acharnée, les militants écologistes ont réussi à faire plier la famille Mulliez, sixième fortune de France, déboutée par le tribunal administratif.

Les lieux, qui contiennent notamment neuf hectares de zone humide, ont donc pu être préservés. Une bonne nouvelle pour la biodiversité et la fertilité de la terre. L’artificialisation des sols est en effet un drame pour l’humanité. En s’étendant toujours plus avec une urbanisation galopante, notre espèce réduit les espaces pour le vivant, mais perd également de rares champs cultivables.

2018 : La victoire de Notre-Dame-des-Landes

C’est sans doute l’un des combats écologistes les plus emblématiques mené et remporté en France. Cette perspective d’aéroport était un serpent de mer dans la région, puisque le projet remontait à 1963 ! Relancé par le gouvernement Hollande, il a d’ailleurs bien failli se concrétiser.

Mais c’était sans compter sur la création d’une ZAD en 2014. Plus de deux cents personnes ont ainsi occupé les lieux pendants des années, développant un véritable village sur place. C’est finalement en janvier 2018 que l’idée est définitivement enterrée par les autorités. Une lutte sans relâche de quarante années ! 

2019 : Une guerre de l’eau perdue par Nestlé 

Depuis plusieurs années, quelques grands industriels de l’eau minérale tentent de s’approprier des sources pour leur seul usage lucratif. C’est le cas à Vittel ou Nestlé puise pas moins d’un milliard de litres d’or bleu pour son usine.

Crée en 2018, le collectif Eau 88, a réussi a faire reculer le géant de l’agroalimentaire en 2019. Vittel projetait d’installer un pipeline sur ce réseau pour pomper encore plus d’eau, mettant en danger les réserves utilisées par les locaux. Un combat crucial lorsque l’on sait que l’accès à l’eau potable pourrait bien devenir l’un des enjeux majeurs de notre siècle.

2020 : Vague verte aux municipales

L’année 2020 démontra sans doute que les urnes peuvent parfois faire la différence. Lors des élections municipales de cette année-là, plusieurs grandes villes seront conquises par des coalitions écologistes. On note ainsi que Lyon, Bordeaux, Strasbourg, Grenoble, Besançon, Tours, Annecy, Poitiers ou encore Colombes sont tombés dans l’escarcelle d’EELV. On peut aussi citer Marseille, dirigée par une alliance de gauche.

Certes, cette nouvelle restait à prendre avec des pincettes. Les observateurs avisés du jeu politique ne sont en effet pas sans savoir qu’une bonne partie du mouvement garde une certaine complaisance avec le capitalisme. Les électeurs l’ont d’ailleurs finalement bien compris lors des présidentielles de 2022 en plaçant Jean-Luc Mélenchon loin devant Yannick Jadot.

Il fallait aussi nuancer ce résultat à cause de l’abstention et de son caractère exclusivement citadin. Néanmoins, on pouvait tout de même voir dans ce score une large prise de conscience de l’importance de la cause écologiste pour beaucoup de Français. On l’a constaté deux ans plus tard, puisque huit Français sur dix se disaient inquiets de cet enjeu. Indubitablement une bonne nouvelle.

2021 : Amazon recule en Loire-Atlantique

Il y a deux ans, c’est encore une vaste artificialisation des sols qui a été empêchée près de Nantes. 14,5 hectares de terrain devaient ainsi être bétonnés pour accueillir l’un des plus grands entrepôts Amazon de France. Mais des militants et des associations ont réussi à faire reculer l’entreprise d’un des hommes les plus riches du monde.

Une excellente nouvelle pour la terre et la biodiversité, bien sûr, mais également pour le climat. Et pour cause, le géant du cybercommerce pousse à la surconsommation et pollue énormément (transport routier, fret aérien, objets inutiles, destruction d’invendus…). Un entrepôt en plus aurait été une accélération supplémentaire vers la catastrophe socio-environnementale !

2022 : Fin du projet de la montagne d’or

Voilà une nouvelle fois un sujet qui a fait couler beaucoup d’encre.

Cette folie minière en Guyane entendait « exploiter 80 tonnes d’or primaire en creusant une fosse de 2,5 kilomètres de long et en recourant à la cyanuration dans une forêt à proximité immédiate d’une réserve biologique», décrivait à l’époque Reporterre.

C’est finalement le Conseil d’État qui a rejeté le projet souhaité par la société canadienne Colombus Gold. Il y a de quoi se réjouir lorsque l’on sait ce que peut provoquer l’industrie minière, comme nous vous l’expliquions récemment.

2023 : Interdiction définitive des néonicotinoïdes

La nouvelle vient de tomber récemment après plusieurs péripéties. Le pesticide surnommé « tueur d’abeilles » est bel et bien banni du territoire, comme l’a confirmé l’Union européenne. Pourtant, il avait été interdit sur le continent dès 2016.

Mais face aux lobbies du sucre, Emmanuel Macron avait accordé une dérogation en 2020, et ce malgré la dangerosité avérée de ces produits. Cette fois-ci, le chef de l’état se pliera bien à la décision. Et on espère le faire céder encore sur de nombreux sujets !

– Simon Verdière


Photo de couverture de Markus Spiske sur Unsplash

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