La course aux minerais, et en particulier aux métaux rares ne semble pas pouvoir s’arrêter tant l’humanité s’en est rendue dépendante. Or, plus le temps passe et plus le coût écologique de ces matières premières grandit. Personne n’ignore pourtant que l’extraction de ces marchandises provoque des dégâts incommensurables pour l’environnement. Décryptage.

En prétextant que l’industrie minière occidentale serait plus propre que celle des pays en développement, les gouvernements européens tentent de relancer l’ouverture de sites destructeurs sur le territoire européen. Or, ces projets ne sont pas meilleurs pour la planète que ceux déjà en place à l’autre bout du monde. Et les citoyens ne sont, une nouvelle fois, pas consultés.

Pollutions en cascade

Commençons par établir une évidence : une exploitation minière est toujours un drame pour l’environnement. C’est d’abord une pollution de l’air due aux machines utilisées, mais également aux particules libérées par le déroulement des opérations. On peut citer par exemple le plomb, l’arsenic ou le cadmium qui sont autant d’éléments potentiellement toxiques dont l’inhalation peut provoquer de graves maladies. La condition des travailleurs miniers est d’ailleurs particulièrement exécrable au niveau social.

Le phénomène est encore plus important en ce qui concerne l’eau. Non seulement les activités minières peuvent gravement contaminer les milieux aquatiques avec des métaux lourds, mais elles participent également à l’érosion des sols et l’acidification des sources.

En ce moment un scandale environnemental occupe d’ailleurs les scientifiques : le deep sea mining, autrement dit le fait de miner les fonds marins riches en métaux. Alors que la recherche appelle fermement au devoir de précaution, les industriels sont en train de passer en force en ce moment même au détriment de ces habitats fragiles, qui ont mis des milliers voire des millions d’années à se former.

Un désastre environnemental

Ces pollutions ont des conséquences sur les quatre principaux enjeux environnementaux de notre siècle.

Elle dégrade d’abord les terres, jusqu’à les rendre infertiles et instables. Elle perturbe ensuite le cycle de l’eau et met donc en danger les sources potables, ce qui est particulièrement dramatique dans les pays arides. Notons d’ailleurs que l’activité minière elle-même nécessite des quantités impressionnantes d’eau ; cette industrie en consomme autant chaque année que l’ensemble des États-Unis.

Exploiter des mines n’est pas non plus sans conséquence sur la biodiversité. Et pour cause, des grands mammifères aux micro-organismes présents dans les sols, de nombreuses espèces vivantes sont touchées par la destruction de leur habitat. Enfin, un tel déploiement d’énergie, couplé à l’extractivisme libérant le carbone stocké par les sols jusque-là, participe évidemment au dérèglement climatique.

 

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Escroquerie de la relocalisation et des mines vertes

Face à cette situation, les grandes entreprises du secteur se lancent dans des campagnes de greenwashing. Il existerait une possibilité d’ouvrir des « mines vertes », relocalisées en Europe dans « le respect de la nature et des travailleurs ».

Pourtant, on se rend compte que derrière ces beaux discours, la réalité est bien différente. De nombreuses exploitations françaises encore en activité ou abandonnées ont d’ailleurs laissé des territoires dans un état désastreux.

 

En Belgique, les « DoMineurs » face aux lobbies et au déni démocratique

Face à ces enjeux, le collectif citoyen belge « DoMineurs » mène la lutte contre les mensonges des industriels qui tentent de s’installer dans le plat pays. Il note d’ailleurs qu’il est « totalement illusoire de croire que le fait d’ouvrir des mines ici va en fermer là-bas ».

DoMineurs Belgique Tribune : Pour une démocratisation immédiate de la question minière en Belgique

L’association est, en outre, particulièrement inquiète de la rédaction d’un nouveau code minier pour la Belgique, à propos duquel elle a publié une Tribune citoyenne et explicative dans le média Le Soir : Pour une démocratisation immédiate de la question minière en Belgique. Et pour cause, ce dit code pourrait potentiellement élargir les pouvoirs des exploitations contre les droits du vivant et entraîner un véritable massacre environnemental.

Elle réclame par ailleurs « une information transparente sur la question de la relance minière ainsi qu’une concertation citoyenne la plus large et médiatisée possible ». Il faut dire que les riverains des exploitations de ce type ne sont jamais consultés et que les États pourraient passer en force, contre l’avis des peuples, ou en profitant simplement d’un climat de désinformation sur le sujet, dont l’aspect trop technique ou scientifique est souvent cultivé par ceux qui ont à y gagner.

Une fois de plus, les gouvernements européens ne semblent qu’obéir aux directives de l’Union européenne. En septembre 2022, le vice-président de la commission Maroš Šefčovič paraphrasait même Margaret Thatcher en assurant qu’il « n’y a pas d’alternative » à l’industrie minière en Europe.

 

Une société dépendante

Pour appuyer son propos sur la nécessité d’ouvrir des mines, le diplomate slovaque a décrit une économie « décarbonée et numérique » à laquelle nous « aspirons tous ». Si effectivement on ne peut que souhaiter une société qui atteint la neutralité carbone, on peut, en revanche, très largement remettre en cause notre modèle actuel.

Et pour cause, de jour en jour, nous nous rendons de plus en plus dépendants à l’utilisation de minerais et de métaux rares. Or, ces ressources ne sont pas infinies et nos modèles futurs ne pourront pas continuer à s’appuyer toujours plus sur elles, d’autant plus que les filons s’amenuisent d’année en année. Or, plus les minerais deviennent difficiles à trouver, plus leur extraction demande d’énergie et engendre de dégâts.

De fait, à l’heure actuelle, notre société utilise le métal absolument partout : construction, transport, énergie, emballages, cosmétiques, électronique, etc. Le numérique que l’on associe souvent à une « dématérialisation » nécessite lui aussi en réalité énormément de métaux, en câble, antennes, serveurs et autres centres de données.

Quelles solutions ?

Partant de ces constats, il devient indispensable d’engager une bifurcation écologique. Selon Aurore Stéphant, ingénieure spécialisée dans l’étude des mines, il faut ériger en priorité la « diminution drastique de la consommation métallique dans tous les secteurs possibles ». Autrement dit, il est urgent de se passer de cette ressource partout où on le peut.

Pour elle, le recyclage, bien qu’à valoriser, ne représente pas une solution d’envergure et ne doit être envisagé qu’en « dernier recours ». De plus, il importe sans doute de revoir nos rapports aux objets en cessant d’en jeter et en racheter constamment. Les États devraient, de ce fait, lutter plus ardemment contre l’obsolescence programmée et promouvoir la réparation et la durabilité des produits.

C’est, pour finir, toute une société qui devra être repensée. Mais passer de la surenchère technologique permanente qui nous est vendue aujourd’hui par le capitalisme, à un monde basé sur la low-tech risque de devenir de plus en plus difficile à accepter tant on s’évertue à entretenir un mirage. Et pourtant, rien n’y fera, une croissance infinie sur une planète aux ressources limitées ne restera toujours qu’une illusion.

– Simon Verdière


Montage de couverture Mine à ciel ouvert @MrMondialisation à partir de @Photothèque-Greenpeace/Flickr

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