« Les riches créent de l’emploi », « Les riches investissent », « les riches vont relancer  l’économie », « s’ils sont riches, c’est qu’ils ont travaillé », « les riches sont des modèles pour  la société », « vous êtes jaloux des riches », « il ne faut pas taxer les riches où ils vont  partir »… Combien de fois a-t-on entendu ce genre de sempiternels poncifs sur le rôle essentiel des grandes fortunes dans nos vies ? Pourtant, à la lumière des nombreuses années  d’exercice du libéralisme sur la majorité des pays occidentaux, ces préjugés semblent avoir de  plus en plus de plomb dans l’aile. Retour sur les principales idées reçues à propos des plus riches,  largement véhiculées par une partie des médias et de la classe politique. 

Poncif n°1 : les riches méritent d’être riches 

Le premier argument souvent opposé lorsque quelqu’un ose critiquer la fortune des plus aisés d’entre nous est celui du mérite : les plus fortunés auraient travaillé d’arrache-pied, tandis que les plus pauvres – ces assistés – flâneraient continuellement. Ainsi chacun serait à sa place dans le meilleur des mondes…

Déjà douteuse en soi, cette rhétorique du mérite a, par ailleurs, une fâcheuse tendance à culpabiliser les plus mal lotis. Les chômeurs seraient ainsi responsables de leur chômage, les malades seraient fautifs de ne pas prendre soin d’eux, et les moins instruits n’avaient qu’à travailler à l’école. Bien entendu, il ne s’agit pas d’affirmer que nos actions et nos efforts n’ont aucune importance ou aucune  influence, mais il convient pourtant d’établir certaines nuances. Car, en vérité, la prospérité financière d’un individu dépend de très nombreux facteurs sur lesquels personne n’a aucune  prise.  

L’affaire commence dès la naissance avec son propre code génétique. C’est un fait scientifique : nous ne sommes pas égaux à cet égard. Certains seront plus disposés à développer leurs capacités intellectuelles et seront donc mieux armés pour s’enrichir. Nos revenus seront aussi directement liés à notre sexe ; en moyenne, les hommes gagnent 23% de plus que les femmes. D’abord pour des raisons sociologiques, mais également à cause de discriminations. On peut  d’ailleurs étendre cette affirmation aux personnes racisées pour qui il est plus difficile de  trouver un emploi. En 2011, un universitaire américain affirmait même, étude à l’appui, que  les personnes très attractives physiquement gagnaient en général plus d’argent que les  individus à la plastique quelconque.  

En plus de cette donnée génétique, déjà cruciale, il faudra aussi faire face à des facteurs  environnementaux et sociaux. Et de fait, il existe un phénomène de reproduction sociale très  important : un fils de cadre a ainsi cinq fois plus de chances de devenir cadre qu’un fils  d’ouvrier.  

La réalité est très loin du mythe selon lequel les riches seraient originellement des pauvres qui  n’avaient rien et qui ont arraché leur fortune à la sueur de leur front grâce à leur génie et leur travail acharné.

Source Mr Mondialisation – voir la publication d’origine

Même si ce genre de cas existe parfois, il reste très marginal. Le plus souvent,  les ultra-riches disposaient déjà d’un capital financier important dès la naissance, de par leurs  parents. C’est d’autant plus vrai en France où 80% des milliardaires le sont devenus à partir d’un simple héritage comprenant irrémédiablement un réseau de contacts ou conseillers et des conditions éducatives privilégiées propices à le faire fructifier (quand c’est le cas).

Signalons, de plus, que ce ne sont pas les individus qui choisissent les domaines  financièrement valorisés par la société. Certaines filières s’avèrent ainsi assurément plus  lucratives que d’autres, ne serait-ce que par les débouchés qu’elles offrent. Un étudiant en droit aura sans doute plus de chance de trouver du travail qu’un étudiant en lettres. Un  diplôme d’ingénieur sera plus coté qu’un diplôme en sociologie. Et pourtant, qui peut dire que l’un mérite plus que l’autre ? Doit-on condamner des individus parce qu’ils ont été enclins à poursuivre une voie, aussi essentielle à la cité soit-elle, moins valorisée financièrement ? 

Pour finir, notre patrimoine sera également influencé par une série considérable de hasards.  Qui seront nos amis, nos contacts, nos conjoints ? Quels accidents, quelles maladies, quels  coups du sort subirons-nous ? Il suffit parfois de se trouver au bon endroit au bon moment pour que nos vies basculent explique le déterminisme. À l’aune de tous ces éléments, il paraît donc bien inopportun d’affirmer que les riches mériteraient nécessairement leur destin.  

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Poncif n°2 : critiquer les riches, c’est être jaloux 

Lorsque l’on critique les super fortunes, beaucoup se laissent à répondre que nous serions  simplement jaloux de la réussite et du travail des plus aisés. Or, il existe en réalité de  véritables arguments moraux pour s’opposer à de telles accusations. 

Rappelons d’abord une situation planétaire avec des inégalités sans précédent. Selon un rapport d’Oxfam, « les 10 hommes les plus riches du monde détiennent plus que les 3,1 milliards de personnes les plus pauvres ».

Et d’année en année, ces inégalités ne cessent de croître. Dans son dernier numéro intitulé « le livre noir du macronisme », le journal Fakir expliquait ainsi qu’en 1996, les 500 plus grandes fortunes françaises représentaient 6% du  PIB de l’hexagone.

En 2017, elles étaient déjà grimpées à 20%. Mais sous l’action d’Emmanuel Macron, elles ont à présent atteint la proportion stratosphérique de 43%.

À  l’heure actuelle, les cinq français les plus riches possèdent autant que les 27 millions les plus pauvres (source – La Montagne)

Certains diront « très bien, tant mieux pour eux ». Pourtant, il faut bien garder à l’esprit que les richesses produites par l’humanité ne sont pas infinies, et les ressources à disposition non plus. Ainsi, lorsque les très riches accaparent la grande majorité du gâteau, il ne reste plus que quelques miettes pour les plus pauvres. Autrement dit, l’extrême richesse des uns se fait bel et bien au détriment de l’extrême pauvreté des autres. Il ne paraît pas inutile de rappeler que la Terre ne jouit pas de suffisamment de ressources pour que chacun puisse mener le train de vie des plus riches d’entre nous. 

Alors que dix millions de Français vivent sous le seuil de pauvreté, un partage des richesses apparaît comme plus que nécessaire selon des principes de justice et de dignité humaine. D’autant que les chiffres de l’accumulation des plus  riches ont de quoi faire frémir : le patrimoine de Bernard Arnault, l’homme le plus riche de  France, s’élève ainsi à 168 milliards d’euros, soit 11 millions d’années de SMIC.

Outre l’accaparement des richesses, de telles fortunes se fondent également sur l’exploitation du travail de milliers d’employés. Que dire d’un monde où certains peuvent se permettre du tourisme spatial tandis que d’autres meurent de faim ?

D’un point de vue purement philosophique, enfin, quel intérêt d’accumuler plus d’argent qu’un Homme est capable d’en dépenser au cours de toute son existence ? De même, et ce quelle que soit son activité professionnelle, comment un Homme peut-il décemment monopoliser à lui seul 900 000 ans de SMIC en 15 minutes comme l’a fait Jeff Bezos, le patron d’Amazon, en février 2020 ? Et ce, rappelons-le, au détriment avéré de l’emploi, contrairement aux croyances qui souhaiteraient défendre coûte que coûte les avantages d’une telle concentration des richesses.

 

Poncif n°3 : l’emploi et l’économie dépendent des riches 

Pour bon nombre d’observateurs, il ne faudrait pas blâmer les ultra-riches d’accumuler autant  de richesses, car ils seraient les seuls à pouvoir faire tourner l’économie du pays et à nous délivrer du chômage. Dans les faits, cette affirmation est plus que discutable. 

Commençons par un constat évident : les riches n’ont jamais été aussi riches et pourtant, le chômage reste à son plus haut niveau. Et ce, même si les gouvernements néolibéraux s’acharnent pour diminuer artificiellement le chiffre officiel de chômeurs.

On sait par exemple, selon une étude américaine réalisée en novembre 2016 par l’Institute for Local Self-Reliance, qu’il y a « deux emplois supprimés aux États-Unis pour un emploi créé par Amazon ». En France, d’après un rapport du député et ancien secrétaire d’Etat au numérique Mounir Mahjoubiles activités d’Amazon ​auraient indirectement détruit 20 200 emplois dans le commerce de proximité ​(en équivalent temps plein), soit un déficit final de 7 900 emplois entre les créations et les destructions de postes que la multinationale a généré.

Amazon Envahit l’Inde
International Edition (Jan. 1, 2016) @Nigel Buchanan /Flickr

Malgré tout, pour ceux qui vouent un culte aux plus riches, la création d’emplois fait souvent figure d’argument massue. L’emploi existerait seulement par le bon vouloir des grandes fortunes qui, par leur bonté d’âme, feraient vivre des familles entières. Et pourtant, comme l’expliquait Frédéric Lordon dans le Monde diplomatique en 2014, ce sont en réalité les consommateurs qui créent l’emploi. 

Les entreprises dépendent, en effet, totalement de leur carnet de commandes, et sans eux, elles ne seraient pas en mesure d’offrir des postes rémunérés. Or, ces carnets de commandes ne peuvent se remplir sans la capacité des consommateurs à consommer.

C’est donc précisément,  entre autres, en offrant des salaires aux employés que les entreprises permettent une consommation populaire et leur propre enrichissement. Leurs carnets dépendent de même du fonctionnement global de l’économie. Et même les entreprises qui s’en tirent le mieux grâce à leurs innovations et leurs investissements restent malgré tout dépendantes de la santé  économique des consommateurs.

En sortant de la logique néolibérale, on peut d’ailleurs  constater que le grand patronnât ne peut survivre si la classe moyenne agonise. Ainsi, il est dans son propre intérêt et celui de l’emploi de partager une part conséquente de l’énorme gâteau dont elle  s’octroie déjà la majeure partie.  

Par là, l’argument de « l’entreprise créatrice d’emploi », à laquelle nous devrions tout céder,  s’effondre comme un château de cartes. En réalité, c’est la situation globale de l’économie qui permet à l’emploi de se développer. Les plus grandes fortunes ne l’ignorent d’ailleurs pas, et c’est pourquoi, elles ont toujours pris soin de laisser tout de même quelques miettes au commun des mortels. Mais sans doute le néolibéralisme a-t-il réveillé des appétits tels qu’il en a fait oublier à certains que pour s’enrichir, ils avaient désespérément besoin des consommateurs.  

Néanmoins, pour aller encore plus loin, admettons que l’emploi dépende effectivement des  investissements de plus riches. Admettons, en somme, la philosophie néolibérale pour mieux en démontrer son absurdité. Car, celle qui nous est imposée comme la seule et unique vérité depuis près de 40 ans produit tout sauf les effets annoncés.

Ainsi, de nombreux dirigeants, et notamment en France, ont selon ces principes allégrement cédé au chantage des grandes firmes avec une flopée de cadeaux aux plus aisés : du CICE à la suppression de l’ISF en passant par  l’instauration de la flat tax, les super fortunes de France ont eu l’occasion de faire gonfler leur pactole de manière considérable. En 2019, ces cadeaux fiscaux représentaient ainsi pas moins de 30 milliards d’euros dans la poche des plus aisés. Les intérêts d’une immense partie de la  dette publique française viennent d’ailleurs également grossir les plus grandes bourses du  pays. 

Or, d’après la fameuse théorie du ruissellement, ou comme préfère l’appeler Emmanuel  Macron celle « des premiers de cordée », ce capital aurait dû être réinvesti par les plus prospères d’entre nous. 

Problème : plusieurs études ont démontré l’inefficacité de cette méthode. Et pour cause, les riches investissent très peu au regard de l’argent engrangé. France Stratégie nous apprenait,  par exemple, que depuis l’instauration de ces mesures fiscales l’investissement dans les PME avait même été divisé par trois. 

Aveuglées par leur dogme, les administrations néolibérales n’ont pourtant cessé d’abreuver les plus riches en subventions et autres allègements fiscaux. Pire, ces « cadeaux » n’ont jamais eu aucune condition. Sous le mandat d’Emmanuel Macron, on a ainsi pu assister à bon nombre de suppliques du gouvernement auprès du grand patronat.

En août 2021, Bruno Lemaire, ministre de l’Économie, réclamait : « J’attends des chefs d’entreprise qu’ils embauchent massivement des jeunes, des apprentis. Il faut aussi une meilleure rémunération  pour ceux qui ont les salaires les plus faibles ». Des vœux pieux qui n’ont jamais été suivis d’une législation. Pourtant lorsqu’il s’agissait de juguler l’argent public alloué aux plus pauvres, les néolibéraux n’ont jamais manqué d’imagination, par exemple lors de la réforme de l’assurance chômage.

Plus loin encore, durant la campagne des présidentielles de 2022,  Emmanuel Macron et Valérie Pécresse n’ont pas hésité à proposer que les bénéficiaires du RSA fournissent une activité professionnelle en échange de leurs aides sociales. Une mesure qui légaliserait tout simplement le travail payé en dessous du SMIC. 

Au vu des sommes engagées, le bon sens aurait cependant voulu que ce soient les coups de pouce répétés aux entreprises qui soient assujettis à des conditions d’investissements dans l’économie réelle. Or, c’est plutôt la bulle spéculative qui a massivement été alimentée par les plus aisés. Il y a même de quoi se demander en quoi certaines compagnies soutenues par l’État avaient besoin d’aide pour investir alors qu’elles distribuaient déjà des milliards d’euros de dividendes. Personne n’a d’ailleurs oublié le fiasco absolu du CICE qui permettait de sauvegarder à peine 100 000 emplois par an, pour un coût exorbitant de 20 milliards d’euros, soit 200 000 euros par emploi ! De quoi douter de la sincérité de ce gouvernement, surtout  lorsque l’on sait que les principaux bénéficiaires de cadeaux ont largement contribué à  l’élection de ces divers dirigeants, grâce à leur puissance financière et médiatique. 

En tout état de cause, le fait que la plupart des riches n’investit pas dans l’emploi  volontairement semble établi. Comme l’expliquait d’ailleurs brillamment l’avocat Gilet Jaune François Boulo : 96% des transactions qui s’opèrent sur les marchés financiers concernent des activités purement spéculatives.

 

Poncif n°4 : il ne faut pas taxer les riches, où ils partiront 

Pour beaucoup de nos dirigeants politiques, tous les arguments sont valables pour ne surtout pas taxer les ultra riches. Depuis de nombreuses années, on ne cesse d’ailleurs de nous ressasser que la France serait un enfer fiscal pour les plus riches et les entrepreneurs. Il faudrait donc soulager les grandes fortunes d’impôts confiscatoires qui empêcheraient nos bons maîtres d’investir dans l’économie du pays. 

Comme on l’a démontré précédemment, nos récents élus, et en particulier Emmanuel Macron,  se sont acharnés à cette tâche. Dans le même temps, une partie du spectre politique français osait mettre sur la table le problème du partage des richesses. Dans cette optique, il devenait évident pour certains qu’il fallait massivement augmenter l’imposition des riches. 

Pour les adeptes du néolibéralisme et même de la droite conservatrice et réactionnaire, il n’en était pas question. D’après eux, la France taxerait déjà beaucoup trop les plus aisés, et utiliser ce levier n’aurait pour autre effet que les faire quitter le pays.  

Avant de valider ou de contester ce raisonnement, et même d’y apporter des solutions, il  convient d’abord d’en dénoncer la totale immoralité. S’en servir comme argument, c’est  reconnaître des privilèges aux plus riches dus à leur rang. Or, les plus fortunés ne devraient pas disposer de droits supplémentaires par rapport aux citoyens ordinaires. Accepter un telle logique équivaut à céder au chantage de Français qui s’estimeraient au-dessus de l’intérêt commun. D’autant, que comme on le sait, les maîtres chanteurs en réclament toujours plus. Lorsque nous aurons fait quelques cadeaux aux plus riches, ceux-ci n’hésiteront donc pas à revenir à la charge, comme le passé l’a déjà prouvé au fur et à mesure des privilèges accordés à cette minorité.

D’aucuns pourraient répondre cyniquement qu’ils approuvent ce constat, mais qu’il n’existe malheureusement aucun moyen de passer outre. Or, d’autres États ont malgré tout réussi à trouver des solutions face à de tels problèmes.

C’est par exemple le cas des États-Unis qui ont mis en place un impôt universel. Ainsi tout citoyen américain exilé à l’étranger a l’obligation de payer la différence d’impôts entre son pays d’origine et son pays d’accueil. En d’autres termes, si un Américain devait 2000 dollars aux Etats-Unis et qu’il n’en paye que 1500 dans sa nation d’exil, il devra alors 500 dollars au fisc américain. Ce fonctionnement a d’ailleurs fait des émules en France, puisque Jean-Luc Mélenchon l’a repris à son compte dans son projet politique. 

 

Poncif n°5 : les riches sont des exemples pour la société 

Elon Musk, milliardaire starifié, voire vénéré, malgré l’aberration de ses lubies élitistes et dystopiques.

Les jeunes Français devraient-ils rêver, comme le souhaitait Emmanuel Macron , à « devenir milliardaires » ? On pourrait le penser tant les plus riches sont toujours montrés par les médias  comme des exemples de succès absolu. Tantôt, on nous vante les mérites du « génial » Elon Musk, tantôt on se gargarise sur la fabuleuse réussite de Bernard Arnault, le Français le plus riche du monde. Dans ce contexte, l’argent est devenu le parfait synonyme d’accomplissement. 

Pourtant, à y regarder de plus près, les plus aisés sont très loin d’avoir des modèles de vie les plus vertueux. Pour en arriver à ce niveau d’accumulation, il leur a en effet déjà fallu  accaparer une immense partie des richesses produites par l’humanité. Et comme nous l’avons vu précédemment, les méthodes pour y parvenir sont loin d’être exemplaires. D’abord parce qu’elles entraînent nécessairement une fraction de la population dans la misère, mais aussi parce qu’elles consistent en une exploitation massive des travailleurs.  

Au-delà de ces procédés éthiquement discutables, de très nombreuses grandes fortunes « flirtent » également avec l’illégalité. Qui n’a pas, en effet, entendu parler des fraudes  fiscales monumentales perpétrées par de nombreuses personnalités et entreprises prospères ?

Selon certaines estimations, la fraude fiscale coûterait aux Français aux alentours de 80  milliards d’euros par an.  LuxLeaks, Panama Papers, Paradise Papers, ou encore Pandora Papers, les scandales fiscaux ne cessent d’ailleurs d’éclater au grand jour, dans l’indifférence générale de la plupart des responsables politiques. Et pour cause, certains d’entre eux semblent même impliqués dans certains de ces scandales.

On se souviendra de l’ancien membre du gouvernement Hollande, Jérôme Cahuzac, qui disposait d’un compte en Suisse. Mais on a pu récemment découvrir à travers les Pandora Papers,  que de nombreuses  personnalités jouaient avec le fisc. Parmi les accusés, on trouvait, notamment, l’ex premier ministre britannique Tony Blair, ou encore l’actuel président ukrainien Volodymyr Zelensky.

Sur cette question et depuis des années, l’État français semble d’ailleurs en voie de  capitulation. On a pu d’abord le constater avec un nombre décroissant de contrôleurs fiscaux. Ainsi, en 2018, un rapport syndical dénonçait déjà une baisse des effectifs de 3100 fonctionnaires en dix ans. À cette période, il ne restait alors plus que 10 000 inspecteurs en France. Évidemment, le nombre de contrôles a lui aussi chuté.

Autre symbole du renoncement volontaire de l’État : des ristournes accordées par le gouvernement aux fraudeurs défrayaient la chronique cet été. En effet, selon un rapport de la Cour des comptes,  l’État n’hésiterait pas à se coucher devant certains fraudeurs pour ne pas avoir à affronter leurs armées d’avocats. De cette manière, en 2019, la France avait abandonné 1,6 milliard suite à des arrangements trouvés à  l’amiable avec de grosses fortunes délinquantes.  

Le pire est de songer que ces contournements de la loi sont directement à l’origine de la  détérioration de nos services publics. Un rapide calcul permet d’estimer que l’argent de la fraude fiscale pourrait financer 2,2 millions de fonctionnaires supplémentaires à 2000 euros net par mois. Une situation d’autant plus compliquée à accepter que l’effort fiscal repose déjà  sur les épaules des classes moyennes à qui l’on demande de se serrer la ceinture.

Soulignons ainsi que l’impôt des 378 contribuables français les plus fortunés ne s’élève qu’à 2 %.

Mais cet argent, les milliardaires, exemplaires, redistribuent via la philanthropie ? A nouveau, l’hôpital se fout de la charité. Comme l’explique Vincent Edin qui décrypte dans son essai ceux qui prétendent exercer un rôle d’intérêt général tout en se soustrayant à l’impôt. Un thème également vulgarisé par l’équipe de DataGueule :

 

Pour finir, d’un point de vue environnemental, le modèle de vie des ultra-riches s’avère  destructeur pour la planète, donc indirectement pour nous. En février 2022, Oxfam et Greenpeace dénonçaient que les 63  milliardaires français émettaient autant de gaz à effet de serre que la moitié de la population de l’hexagone.

Bien entendu, les riches voyagent beaucoup plus, prennent bien plus souvent  l’avion, et possèdent une immensité de biens matériels au coût écologique non négligeable.  Leurs excentricités ont d’ailleurs parfois de quoi marquer les esprits. Entre les déplacements superflus en hélicoptères, les yachts vastes comme des immeubles, ou encore le tourisme spatial pour le plaisir fugace de Jeff Bezos, il y a évidemment de quoi s’insurger.

Cependant, c’est avant tout l’utilisation de leur patrimoine financier qui est incriminé. En investissant la majorité de leurs placements dans des entreprises polluantes, les plus riches contribuent de manière spectaculaire au désastre climatique.

Mais on peut également penser aux catastrophes écologiques tout aussi importantes que constituent la destruction des sols et l’effondrement de la biodiversité. Deux phénomènes largement favorisés par des procédés ultra-productivistes destinés à enrichir toujours plus leurs instigateurs. 

De fait, au lieu de glorifier sans cesse les plus aisés, certains devraient peut-être songer au vieux proverbe amérindien :

« Quand le dernier arbre aura été abattu, quand la dernière  rivière aura été empoisonnée, quand le dernier poisson aura été péché, alors on saura que  l’argent ne se mange pas ».

– Simon Verdière


Illustration de couverture « Musk Vs Bezos » @GOstamina/Flickr

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