Selon le magazine Le Point, le Marineland d’Antibes aurait été pris en flagrant délit de pollution d’une rivière d’eau douce dans laquelle furent déversées les eaux sales des bassins du parc suite aux inondations d’octobre dernier. Des tests effectués sur prélèvements y ont identifié une présence anormale d’hydrocarbures et de chlorures. Une polémique de plus pour ce parc et son modèle à bout de souffle.

Si l’année 2015 s’est avérée cauchemardesque pour le Marineland d’Antibes et ses affaires, l’année 2016 ne semble pas lui sourire davantage. Le parc marin essuie depuis de nombreux mois une pluie de critiques suite au décès de deux de ses cinq orques captives : Freya, la matriarche du groupe morte à seulement 32 ans en juin dernier, suivie de son fils Valentin, à seulement 19 ans, une semaine à peine après les intempéries meurtrières qui s’abattaient sur le sud-est de la France.

Photographie © 20 Minutes

Le soir des inondations qui frappèrent la région, une vague de 3 mètres, polluée par le gasoil et le mazoute provenant des cuves des habitations et des voitures alentours, déferle sur les animaux captifs du parc. Il faudra attendre plusieurs jours pour que les installations et les systèmes de filtrage puissent être rétablis et commencer leur travail de nettoyage.

La qualité de l’eau dans laquelle nageaient alors les animaux alarme les organisations de défense animale locales. C’est finalement la Direction Départementale de la Protection des Populations qui constate la présence d’hydrocarbures dans l’eau des bassins suite à l’inspection du parc.

Photographie © 20 Minutes

La version officielle concernant le décès de Valentin, survenu une semaine après les inondations, avance une « torsion intestinale » sans rapport avec l’évènement. Mais le doute persiste quant à un lien avec la pollution des bassins et la situation de grand stress dans laquelle les animaux furent plongés. Sophie Béranger-Chervet, directrice du service de la préfecture des Alpes-Maritimes, expliquait à l’époque que la qualité de l’eau des bassins des cétacés serait un « point noir », mais qu’ « a priori », leur vie ne serait pas en danger. On connait la suite… Avec notamment le départ précipité du directeur du Marineland, Bernard Giampaolo.

L’histoire aurait pu s’arrêter là si le magazine Le Point, épaulé par l’antenne Sea Sheperd Nice, n’avait décidé d’effectuer des prélèvements à proximité du site du parc aquatique, dans l’eau d’une rivière locale, la Maïre. En effet, celle-ci traverse le parc animalier. Une situation géographique particulière que semble avoir exploité le parc. Le groupe d’activistes a relevé qu’un large tuyau provenant du parc, à l’époque en plein filtrage de ses bassins, rejetait des eaux usées dans la dite rivière, éveillant les soupçons de l’organisation.

Photographie © Le Point

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Après analyses, deux rapports établis par le laboratoire Carso, le plus grand laboratoire de France, confirment un rejet anormal d’hydrocarbures et de chlorures dans ce ruisseau, précisément à l’endroit où le cours d’eau traverse la propriété du Marineland. Les prélèvements révèlent ainsi un taux alarmant en chlorures de 408 mg/l alors que la réglementation nationale considère la qualité de l’eau comme étant « très mauvaise » au-delà de 200 mg/l. Quant aux hydrocarbures, elles sont de 31,5 mg/l.

Mais on pourrait argumenter que ces pollutions émanent d’une source située avant le parc. Afin d’être le plus objectif possible, des prélèvements ont également été effectués 300 mètres en amont du parc, dans le parc naturel de Vaugrenier, afin de pouvoir comparer les échantillons. S’il était constaté une absence de pollution de la rivière au sein du parc naturel, elle ne pourrait ainsi être imputée qu’au Marineland, les deux sites ayant subi les mêmes inondations. Le résultat fut indiscutable : l’eau prélevée en aval contient nombre de polluants absents en amont, dans la zone naturelle.

© AFP Photo / Jean Christophe Magnenet

En pratique, le bassin des orques du Marineland contient près de 40 millions de litres d’eau salée pompée directement à 70 mètres de profondeur dans la mer Méditerranée. Celle-ci est ensuite purifiée par des conduits puis rejetée en mer par le biais de canalisations souterraines. Mais que passe-t-il en cas de désastre naturel, lorsqu’il s’agit d’évacuer rapidement des eaux noirâtres, boueuses et visqueuses ? C’est précisément le cas de figure que les décideurs du parc ont du affronter.

Le parc s’est procuré dans l’urgence une pompe permettant de filtrer les boues résiduelles déposées au fond des bassins. Une question légitime : que se trouve-il dans cette eau souillée et où est-elle évacuée ? C’est dans le but de répondre à cette question que Sea Sheperd a tenté de s’approcher au plus près de l’appareil de pompage afin de suivre son parcours. C’est ainsi qu’ils vont observer que celui-ci mène directement à la rivière de la Maïre, débouchant elle-même sur la Brague, rivière qui termine sa course dans la mer, et qui compte sur son passage deux campings, des puits et de nombreux riverains.

Photographie © DR

Selon John Kershaw, directeur animalier du Marineland : « L’eau du bassin des orques a été désinfectée au chlore et à la javel, puis évacuée, sans les filtres, par notre système de pompage habituel, relié à la mer. La pompe dont on parle ici a servi à vider notre salle de filtration qui était sous six mètres d’eau apportés par la vague qui nous a frappés. Nous n’avons fait que rendre à La Brague [le fleuve voisin] ce qu’elle nous avait donné. » De toute évidence, les associations environnementales ne se satisfassent pas de ces déclarations, échantillons à l’appui.

Alors que la Fondation Marineland affirme « œuvrer à la conservation de la biodiversité marine et de son environnement », les militants de la cause animale considèrent que le Marineland d’Antibes, en plus de mettre quotidiennement en danger la vie d’animaux marins captifs (dont celle de l’orque Valentin) aurait pollué consciemment pendant au moins trois semaines l’environnement local et ses habitants, et ce en toute opacité.

© Photo reporter mobile / Taton

Le responsable politique du partie Europe Ecologie les Verts, Laurent Lanquar, a déclaré que « trop de scandales ont entaché la captivité commerciale des animaux du parc lucratif ». Il réclame « un audit complet et contradictoire de Marineland, autant sur les conditions de captivité des animaux, sur les enjeux environnementaux de cette activité lucrative, ainsi que sur les mesures prises suite aux inondations. » Selon lui, « il est nécessaire d’envisager la reconversion du site. »

Quant à Lamya Essemlali, présidente de Sea Sheperd France, elle résume finalement bien l’état d’esprit du parc antibois : « Quand on enferme des animaux dans des conditions contre-nature, il ne faut pas s’attendre à un grand respect de cette dernière. » La réouverture du Marineland d’Antibes est prévue pour le mois de mars 2016. Au programme, toujours pas de liberté pour les animaux captifs, mais « plus de pédagogie » selon la direction du parc, entre deux numéros de cirque.


Sources: lagazetteanimale.com /20minutes.fr / lepoint.fr / Photographie à la une Franck Fernandes.

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