Ces dernières décennies, difficile de le nier, les femmes occidentales ont gagné en liberté et en égalité. Les femmes ne sont plus confinées par défaut à leur foyer, soumises à un rôle prédéfini par les dogmes du passé. Tout est devenu une histoire de choix, de liberté. Enfin, ça, c’est ce que la plupart des personnes pensent. Mais ce n’est pas si facile, car le monde marchand va rapidement s’emparer de l’image de la femme libérée pour en faire un produit de consommation, donc un nouvel outil d’oppression et d’exclusion. Nos comportements, eux, restent largement déterminés par ces influences de la société.

L’image de la femme entretenue par les « médias » contemporains peut laisser un mauvais goût dans la bouche. Hyper-sexualisation, banalisation du porno-chic dans la publicité et provocation systématique pour alimenter les buzz, pourquoi cette image ne reflète plus la liberté de la femme alors même qu’elle peine toujours à acquérir des droits dans le monde ? Est-ce l’expression d’une liberté ou la soumission à une logique économique pas moins patriarcale qu’elle ne l’était avant ? Comment exprimer sa liberté sans tomber dans les clichés médiatiques de la femme-objet ? Surtout, comment distinguer une liberté d’une « objectification » non assumée, parfois même dans nos propres comportements ?

Dans le reportage « Princesses, pop stars & girl power » signé Arte (2014), on découvre que c’est la logique capitaliste (patriarcale par essence) qui a profité de l’émancipation de la Femme, qui fut pourtant une véritable prise de liberté sur le patriarcat, pour en faire un pur produit de consommation. La liberté s’est ainsi confondue avec la marchandisation. Aujourd’hui, les codes de la beauté populaire flirtent avec ceux de la pornographie, notamment sur les réseaux sociaux type Instagram et Tiktok. Et ce n’est pas sans objectif économique. En titillant nos instincts primitifs, l’érotisme sert plus que jamais d’outil de vente aux pontes du neuromarketing.

Si les « marchands de rêves » surfent sur la confusion pour nous vendre leurs produits, les réactionnaires profitent adroitement de cette confusion pour fustiger l’amélioration des droits des femmes et réaffirmer d’anciennes croyances. L’affaire est cousue de fil blanc. Une fois encore, les femmes sont jugées fautives de leur situation. Ainsi, le coupable serait la femme et ses choix, et non pas les institutions politiques ou économiques. Ne nous y trompons pas, tout le monde perd à ce jeu des extrêmes, les femmes en tête. Car, dans la réalité, les femmes subissent de plein fouet les effets pervers d’une telle culture du déni : une pression psychologique sur les normes physiques à adopter, le phénomène du plafond de verre, des discriminations systémiques au travail et en société, le harcèlement sexuel dont les chiffres battent des records,..

Ce reportage d’Arte produit en 2014 est toujours vibrant d’actualité et ne devrait pas être oublié. Il nous propose un éclairage inédit, tout en en nuances de gris, sur la complexité du phénomène de l’émancipation féminine au cours de 20e siècle jusqu’à nos jours. On y apprend que ce n’est pas le processus de liberté en lui-même qui est responsable de la situation actuelle, mais bien l’instrumentalisation du mouvement d’émancipation par les institutions du marché. Et cette instrumentalisation de la « femme-objet » n’est-elle pas le signe d’un patriarcat latent au sein même de la logique marketing moderne ?

Le reportage

https://www.dailymotion.com/video/x6fd2t1

Synopsis : Devenu le symbole de cette pop culture mondiale, le rose est toujours empreint d’une certaine dose d’humour et d’esprit décalé. Cette culture a ses icônes (Barbie, Candy, les Dolls Bratts, Hello Kitty…) et ses codes vestimentaires, de la mode « princesse » des supermarchés à la haute couture « porno-chic » version Gucci ou Prada, jouant sans cesse entre innocence et provocation, petite fille et prostituée. Elle a aussi ses héroïnes fictionnelles, des romans de la « chick-lit » aux films et séries américaines (Sex in the city, Desperate housewives, Gossip girl…) ; ses blogs (« Little Miss Paris », « Pink Attitude ») et ses blogueuses (Margaux Motin ou Pénélope Bagieux en France, Fashion Bomb Daily ou The Sartorialist aux États-Unis, LesMad en Allemagne…). Elle a même généré des sous-cultures, telles les lolitas japonaises, et influencé certains pans de la culture gay qui s’est réapproprié ses codes. À travers un kaléidoscope des expressions de la culture girly, ce film s’attache à montrer comment, via le marketing, la société de consommation a construit les stéréotypes de la féminité, et comment aujourd’hui les femmes s’en emparent et les revendiquent. – Arte.


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