Avec des émissions proches de zéro, le vélo est l’un des moyens de transport les moins polluants. Si l’on peut donc se réjouir du développement du vélo en ville, le cycliste est tout de même à l’origine de certains déchets, malgré tout impactants à grande échelle : chaînes, chambres à air, pneus abîmés… Pour réduire au maximum l’empreinte écologique de ce moyen de transport, des filières de recyclage voient le jour. Faire de ces déchets des matières premières, c’est l’objectif que s’est donnée Bicloo. Le projet, financé en crowdfunding, vise à revaloriser les chambres à air usagées pour en faire des trousses, des portefeuilles ou encore des sacoches de selle. Le tout est fabriqué à la main en Belgique, à partir de matières premières locales !
En Belgique comme dans un grand nombre de pays européens, le vélo continue de s’imposer comme le mode de déplacement urbain privilégié. Selon les chiffres de l’Observatoire du vélo en Région de Bruxelles-Capitale, une tendance à la hausse est observée depuis 2010, avec 13% de taux de croissance annuelle moyen dans la capitale belge.
Si les vélos électriques sont ceux qui produisent le plus de déchets, les deux roues classiques génèrent également certains résidus qui ne sont pas moins conséquents à grande échelle. C’est toujours un moindre mal, mais rien n’empêche de s’y pencher aussi et d’en réduire l’impact. Présentation d’une initiative engagée.
Le caoutchouc, une ressource controversée
Au total, ce ne sont pas moins de 17 millions de tonnes de pneus en fin de vie qui sont jetés chaque année, issus en majorité de l’industrie automobile. La très grande partie d’entre eux finit incinérée ou enfouie dans les sols, or ces déchets constituent une opportunité de recyclage intéressante. Le recyclage du caoutchouc permet en effet d’éviter de recourir davantage à cette matière première qui constitue une ressource épuisable et controversée.
Le caoutchouc naturel est issu du latex des plantations d’hévéas. Aux côtés des exploitations d’huile de palme, ces monocultures sont souvent à l’origine de déforestations importantes, en Asie du Sud-Est notamment.
Le procédé de fabrication du caoutchouc synthétique, qui provient d’hydrocarbures, est quant à lui encore plus polluant. Les filières de recyclage de ce matériau trouvent donc toute leur utilité, et les déchets de caoutchoucs se retrouvent dans toutes sortes de produits du quotidien, comme certaines chaussures produites par des marques éco-responsable qui le recyclent. Aujourd’hui, c’est le recyclage des chambres à air qui fait l’objet du développement d’une nouvelle filière en Belgique.
Quand les déchets deviennent des matières premières
A l’origine de Bicloo ? Valentin, passionné de vélo depuis son enfance. S’il rêvait de devenir coureur cycliste professionnel, il a pu allier sa passion et son travail en devenant commercial pour un distributeur de vélos. Mais la vision purement capitaliste de cette industrie lui a sauté aux yeux, et il a donc décidé de se lancer dans ce projet plus vertueux, à l’origine duquel chacun pouvait participer via une campagne de financement participatif sur Ulule. Un succès.
Un biclou signifie une bicyclette en langage familier. Le mot est utilisé dans le jargon cycliste pour désigner une vieille bécane rouillée et cabossée qui roule encore plus ou moins bien. Cette image symbolise l’ambition première de Bicloo, qui est de réutiliser les résidus que l’industrie du cycle produit, à commencer par les chambres à air.
« Je vois en ces déchets des matières premières qui peuvent encore servir à d’autres applications, explique Valentin. Les chambres à air sont un matériau formidable pour créer de la maroquinerie et des articles de sport. C’est solide, flexible et résistant à l’eau. »
Ethique jusqu’au bout : des produits fabriqués à la main
Fabriqué à la main, chaque produit est unique et la marque, ou le pays d’origine de la chambre à air, sont même parfois visibles dessus. Avec de la chance, on peut même y deviner une rustine qui a réparé une fuite un jour.
Le nom de chaque produit Bicloo (sacoche de selle, trousse, portefeuille) correspond par ailleurs au poids en grammes de caoutchouc recyclé qui le compose. Les canaux de distribution sont par ailleurs profitables aux petits commerces. Les produits sont en effet vendus dans les boutiques de la région d’abord, et bientôt dans toute l’Europe grâce à un réseau de points de ventes. L’équipe a également lancé un magasin en ligne et une page Instagram sur laquelle suivre leurs aventures.
« Bicloo est le fruit de mon imagination associée à mon réseau. S’y combinent l’économie locale, circulaire et solidaire. En un an, nous avons valorisé une tonne de chambres à air et créé 4000 heures d’emplois dans une entreprise de travail adapté » se félicite Valentin.
Chaque produit est en effet fabriqué à la main dans une Entreprise de Travail Adapté, les Érables, située près de Tournai. Le travail y est considéré comme un moyen d’inclusion et chacun y trouve une façon d’intégrer la société. Loin des conditions difficiles des travailleurs sous-payés à l’autre bout du monde, les produits sont fabriqués avec fierté et le sentiment positif et inspirant d’agir pour un monde meilleur.
Economie locale, circulaire et solidaire.
En plus d’être issus de filières solidaires, l’ensemble des matières premières qui composent les produits Bicloo proviennent de l’économie locale.
La fermeture éclair, les accroches rigides et la doublure sont toutes fabriquées Belgique. En plus de réduire le transport, cela crée du lien social, des synergies et de la résilience dans le bassin économique. Les chambres à air sont ainsi récupérées dans les ateliers vélo de la région. Le projet a dépassé son objectif initial de 5000 euros, suffisamment pour lancer ses premières séries et acheter un vélo cargo. Chaque palier supérieur permet d’investir davantage dans l’entreprise, afin de notamment gérer la communication, d’améliorer le processus de fabrication, mais surtout de recycler des quantités toujours plus importantes de chambres à air.
L’upcycling ou surcyclage, qui désigne l’action de récupérer des matériaux ou des produits dont nous n’avons plus l’usage afin de les revaloriser dans des projets, est donc au cœur de Bicloo. Si le recyclage induit simplement l’action de réutiliser une matière sur le marché, l’upcycling ajoute à cette dimension une notion de détournement, afin de lui donner un nouveau sens, dans un rapport plus large à l’ensemble de sa nouvelle fonction dans le monde. L’upcycling rend d’ailleurs souvent évidente et visible l’origine de la matière sollicitée.
« On ne sauvera pas la planète mais c’est un bon début »
Pratiqué avant tout pour son impact positif sur l’environnement, puisqu’il permet en l’occurrence d’offrir une nouvelle vie et d’éviter l’incinération et l’enfouissement des déchets dans les sols, l’upcycling permet la création de modèles uniques et créatifs qui exigent, dans un souci de cohérence, des fabrications plus éthiques à échelle humaine.
Comme le résume Valentin, « en investissant dans un bicloo, vous n’achetez pas seulement un produit durable et éthique, vous votez aussi pour un monde auquel chacun aspire ». Un monde dans lequel on prend conscience de toute la matière qu’on a déjà extraite à grands frais pour la planète, et qu’on ferait bien de revaloriser à long terme, loin du tout jetable, au lieu de continuer notre production effrénée. Sinon, Bicloo est aussi une alternative de plus au cuir !
– Mr Mondialisation
Le site : https://bicloo.be/
Leur compte Instagram avec les infos et points de vente : @bicloo.upcycling