Réchauffement, fonte des glaces, acidification, érosion de la biodiversité marine, tous les indicateurs sont dans le rouge depuis des dizaines d’années, sans que nous parvenions à renverser la tendance. Mais à y regarder de plus prêt, il semblerait bien que pour certains, cette nouvelle ne soit pas si catastrophique ! La calotte glaciaire fond, oui, mais cela représente de nouvelles perspectives de croissance que tous les pays se préparent déjà à exploiter. Dans cette nouvelle bataille économique qui s’annonce, il semblerait même que la France soit particulièrement bien placée, avec Saint-Pierre et Miquelon aux premières loges de ces nouvelles retombées économiques…
Quand fonte des glaces rime avec opportunités économiques
Le 20 juin, le Canard Enchaîné a laissé passer dans ses réseaux la nouvelle information selon laquelle Ségolène Royale allait être nommée Ambassadrice chargée de la négociation internationale pour les Pôles. Une information qui a rapidement fait le tour des réseaux où les moqueries sur une ancienne ministre relayée à la banquise ont été particulièrement nombreuses.
Pourtant, la situation est loin d’être drôle et cette fonction catalyse beaucoup plus d’enjeux qu’on ne voudrait bien le croire. La fonte de la calotte glaciaire est devenue le nouveau centre d’attention, non pas à cause de la catastrophe environnementale qu’elle représente, mais bien pour les enjeux économiques colossaux qu’elle va permettre. Tous les pays se préparent actuellement à l’exploitation des ressources qui seront bientôt libérées par la fonte des glaces et aux nouvelles voies maritimes qu’il sera possible de dégager.
Les climatologues sont unanimes, la fonte des glaces est de plus en plus inquiétante. Pour nombre d’observateurs, les jeux sont faits ! Notre incapacité à remettre en question notre modèle économique aurait déjà scellé le sort de la planète pour les décennies à venir. Jean Jouzel, climatologue, expliquait lors d’une interview donnée à Alternatives Economiques l’ampleur de ce phénomène :
» Un indice important à observer est l’étendue de la glace de mer à la fin de l’été dans l’Arctique : il y en avait 10 millions de km2 en 1950. Aujourd’hui, cette surface s’est réduite à 4 millions de km2 et un océan Arctique libre en été à l’horizon 2040 est une perspective très probable. Cette évolution est assez bien connue et prévisible. En revanche, ce qui a surpris les scientifiques fin 2016, c’est la lenteur à laquelle se sont reformées les glaces d’hiver dans l’Arctique, et la rapidité avec laquelle elles ont diminué autour de l’Antarctique, alors que jusqu’ici la banquise au pôle Sud ne diminuait pas. Au total, il « manquait » en novembre-décembre derniers entre 2 et 3 millions de kilomètres carrés de banquise et ce déficit, exceptionnel pour l’hémisphère Sud, se prolonge en ce début d’année 2017. »
L’Arctique se réchaufferait en fait deux à trois fois plus vite que le reste de la planète. Et ceci fait les affaire des mêmes industries qui sont les premiers responsables de ce désastre. Une bonne nouvelle pour ces industriels aux dents longues lorsque l’on sait que que la région recèlerait 13% des réserves mondiales de pétrole et 30% des réserves de gaz. L’argent n’ayant pas d’odeur, certains n’attendent plus pour mesurer l’ampleur des opportunités économiques que représente le phénomène.
La France dans le peloton de tête
Et dans la course au profit, il semblerait que la France ne soit pas en reste. Pour Mikaa Mered, Chercheur Arctique-Antartique et co-fondateur du Cluster Polaire Français, l’archipel Saint-Pierre et Miquelon représente le meilleur atout de la France pour profiter des retombées de cette future économie, à horizon 2025. Pour le chercheur en économie arctique, c’est maintenant qu’il faut se positionner pour tirer profit de cette nouvelle possibilité de croissance pour l’hexagone.
Cet archipel en poste avancé serait donc une chance pour l’économie arctique de la France, et pour s’assurer une place géopolitique stratégique. Comme il l’avait expliqué dans une tribune du Huffington Post, » Situé à seulement 1600 kilomètres de New York, au sud, comme des mines d’uranium groenlandaises, au nord, (l’équivalent d’un Berlin-Moscou), l’archipel est consacré dans le Livre Blanc de la Défense 2013: « Saint-Pierre-et-Miquelon se situe aux débouchés des routes maritimes arctiques et atlantique Nord, et dans une zone riche en hydrocarbures » . En effet, Saint-Pierre est idéalement placée au départ du Passage du Nord-Ouest, et à l’arrivée sud du Arctic Bridge. Dit autrement: l’Amérique du Nord n’appartient pas qu’à Washington et Ottawa! »
Des perspectives qui annoncent de nouveaux rapports de force entre États et une modification des influences politiques dans la région et, par ricochet, dans le monde. Pour le chercheur, la France se doit de se positionner dès à présent dans la bataille, afin de pouvoir bénéficier, grâce à Saint-Pierre et Miquelon, du statut d’acteur « crédible » en Arctique. Dans la logique de marché global, de guerre économique totale et de soumission au dogme de la croissance, il semblerait que la seule solution venant à l’esprit de nos experts économistes soit la fuite en avant productiviste. Comment ne pas rester dubitatifs devant tant d’enthousiasme face à une catastrophe climatique planétaire.
En effet, comment croire encore que le monde s’efforcera vraiment de rester sous la barre des 2° de réchauffement lorsqu’on s’aperçoit que nous sommes déjà en marche vers ce nouvel eldorado économique tant convoité ? La transition écologique et énergétique n’est pourtant pas si inintéressante en termes de considérations économiques et les solutions existent bel et bien pour limiter les dégâts environnementaux. Le climatologue Jean Jouzel, résume parfaitement ce paradoxe en démontrant qu’il ne s’agit que de choix et de priorités politiques : » Un exemple : pour être à la hauteur des enjeux climatiques, il faudrait investir dans l’efficacité énergétique 600 milliards de dollars par an à l’échelle mondiale. En face, selon l’OCDE, les Etats dépensent 550 milliards de dollars par an en subventions à la consommation et à la production d’énergies fossiles. Je n’ai pas de baguette magique pour inverser ces flux, mais ces ordres de grandeur nous disent bien que le changement est possible. »
Un changement qui devrait rester une priorité aux yeux de nos dirigeants, lorsque l’on sait que l’océan est responsable de la moitié de la production de l’oxygène que nous respirons. Mais pourquoi s’entêter à vouloir respirer quand nous pourrions générer plus de profits, de croissance et de pouvoir d’achat ? Partout à travers le monde, les électeurs semblent avoir fait leur choix.
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