“Economie, mon Amour” : conférence gesticulée sur les rouages du capitalisme

Adrien Chaudot était cadre dans l’industrie. De sa rencontre avec Camille et par l’évolution de ses convictions économiques, il décide de tout plaquer et de revenir à la terre. Dans sa conférence gesticulée, il nous fait part de son expérience personnelle et de son savoir pour dénoncer l’illusion, l’absurdité et la futilité du système économique actuel.

Conférence Gesticulée : « La conférence gesticulée est un style de spectacle se revendiquant de l’éducation populaire, à l’intersection entre le théâtre et la conférence dont la propriété essentielle est de mêler le récit d’éléments vécus par les conférenciers ou conférencières (savoir Chaud) et des éléments de théorie (savoir froid). La démarche étant de donner des clés de compréhension de la société et de développer l’esprit critique des spectateurs. » (Wikipédia)

Un seul modèle économique pour tout l’Occident

Le modèle économique capitaliste repose sur quelques piliers distincts : Productivité, Compétitivité, Croissance, Profit. Si ces mots nous rabâchent les oreilles tous les jours, peu d’entre nous savent ce qu’ils désignent et ce qu’ils représentent réellement. Aujourd’hui, la plus grosse part de la richesse de l’Occident est bâtie sur l’Industrie. Suite au modèle fordiste, dont le principe est le travail à la chaîne, on vise sans cesse un meilleur niveau de productivité par tête. Le monde entrait peu à peu dans la consommation de masse.

« Le Fordisme », Wikimedia Commons

Lorsque Adrien était en école de commerce, on lui a également enseigné que le capitalisme avançait dans le but du progrès humain. Plus de croissance pour plus de richesses, et plus de richesses pour un meilleur niveau de vie. Pour un temps, ce fut vrai. Des privés accumulent des richesses réinvesties dans la productivité, le pays fait du profit, le niveau de pouvoir d’achat national augmente… Et tout le monde y gagne par ruissellement ? Pas forcément. Et c’est là que la “magie” du capitalisme opère.

“J’étais du côté des moutons”

La remise en question d’un modèle pré-établi

Dans son métier de cadre, Adrien est amené à déménager et rencontre Camille. C’est un véritable choc des civilisations. Mais de cette rencontre et de multiples prises de conscience, il va finir par mettre en doute et questionner ce qu’on lui a appris, et ce qu’on nous apprend à tous, pour revenir aux choses qui ont “une vraie valeur” à ses yeux.

Pour créer de la richesse, il faut créer de la Croissance. Au plus simple, la croissance, c’est l’augmentation du PIB d’un pays (Produit Intérieur Brut). C’est donc l’augmentation des richesses annuelles continue. En 2015, la France a créé deux milles milliards d’euros de PIB. Ceci équivaut à 30 000€ annuels par habitants, tout habitant confondu : personnes âgées, bébés, étudiants, salariés… Soit, théoriquement, 2500 euros par mois par individu.

Pour créer de la Croissance, il faut nécéssairement augmenter la Productivité chaque année. La productivité, c’est la capacité de créer plus (ou du moins autant) mais avec moins de moyens. Et ne soyons pas dupes : les “moyens” sont des humains. C’est ici que les ficelles du capitalisme redoublent d’efficacité : on a réussi à nous faire croire que pour réduire le chômage, il faut faire travailler moins de personnes. Ceci au profit d’une seule chose : la compétitivité. Car si les personnes ne travaillant plus, ou du moins travaillant à moins cher, ne sont plus dans notre entreprise, ou mieux, ne sont plus dans le pays, alors la question ne se pose plus ! Ainsi, avec le triomphe du capitalisme vient celui du chômage de masse.

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“Je gagne 3300€ par mois et mon métier est d’aller en Ukraine ou en Hongrie, chez nos fournisseurs, pour expliquer à ces gens qui gagnent entre 140€ et 300€ par mois qu’ils gagnent trop”.

“Ce dont je me suis rendu compte, c’est que le Profit entraîne toujours la Misère”

Le Profit, c’est l’argent qu’il reste à une entreprise une fois qu’elle a payé toutes ses charges. Cet argent revient directement aux propriétaires de l’entreprise (actionnaires). Il est donc investi dans des capitaux, et ne fait désormais plus que partie de l’économie spéculative, c’est à dire que cet argent ne circule plus, à moins d’une décision privée à l’investissement. Ainsi, si on prend 20% de profit aux richesses produites par une entreprise, au bout de la chaîne, il y aura forcément une personne qui ne gagnera plus suffisamment d’argent pour en vivre. C’est à partir de ce moment là qu’Adrien a eu de plus en plus de difficulté à croire en ce qu’il faisait, et à ce qu’on lui avait appris “le capitalisme favorise le progrès humain”. L’illusion ne tenait plus.

“J’ai réalisé que je ne faisais pas le bien que je croyais faire. En fait, je faisais le total opposé”.

Pour Adrien, le capitalisme n’est pas un choix foncièrement économique mais politique. L’accumulation des richesses ne sera jamais reversée équitablement. Il y a toujours des perdants et des gagnants. Toujours dans ce système, l’enrichissement des uns se fera d’un moyen ou un autre sur l’exploitation et l’appauvrissement des autres, ou leur maintien à un niveau de vie très bas.

À titre d’exemple concret, on compte aujourd’hui dans le monde près de 850 millions de personnes en sous-nutrition. Et près de deux milliards cent millions de personnes obèses. “On produit largement assez de nourriture pour tout le monde. Seulement certains n’ont pas assez d’argent pour se la payer”. Il ne manque donc pas de richesses. La France n’a jamais été aussi riche. Le problème réside dans la distribution équitable. Et pourtant, on continue de nous faire croire que nous ne produisons pas assez, que les systèmes sociaux coutent trop chers, que la solidarité collective est le problème. Il l’est, en effet, pour ceux qui cherchent à capitaliser davantage…

Exploitation Pétrolière. Source : Flickr.

Pourtant, on peut créer de l’argent. Mais les gouvernement Européens ont pris la décision depuis 2014 de ne plus créer d’argent. Ce pouvoir a été confié à la Banque Centrale Européenne, qui dorénavant supervise et contrôle des banques des États européens via le mécanisme de superviseur unique. Qu’est-ce que cela signifie ? Créer de l’argent, c’est créer de l’Inflation. C’est à dire que les prix augmentent. Cependant, ce que les grandes Institutions politiques et financières gardent bien de nous dire, c’est qu’il n’y a que 2 choses qui ne changent pas lorsque l’inflation augmente : la dette, et l’épargne. En effet, les prix augmentent, mais le pouvoir d’achat aussi, donc cela ne crée que très peu de différence pour la majorité d’entre nous, dans la vie quotidienne.

Mais pas pour les riches. Pendant les 30 Glorieuses, période de prospérité financière après la seconde guerre mondiale et de reconstruction économique du pays, le taux d’inflation variait entre 10% et 15%, avec une pointe à 17%. Aujourd’hui, la Banque Centrale Européenne a pour mission de maintenir le taux d’inflation entre 0% et 2%, indépendamment de toutes les politiques Européennes, peu importe s’il y a une crise économique. Adrien nous le confirme : “C’est ainsi très clair, l’inflation est réel problème… pour ceux qui ont de l’argent.”

Selon Adrien, le profit des uns ne se fait donc qu’au nom de l’exploitation des autres. Et l’exemple le plus remarquable et terrifiant est le pillage de l’Afrique, premier continent fournisseur de matière première, par l’Occident. Mallence Bart a d’ailleurs donné un édifiant discours à ce propos en 2015. Et si tout ce système continue de fonctionner, encore et encore, ce n’est qu’à coup de campagne publicitaire, d’illusions, et de la banalisation, de l’exploitation humaine au profit des banques, lobbyistes et autres personnalités les plus riches de ce monde.

Décider de tout plaquer pour revenir aux choses les plus simples.

La principale source de puissance du capitalisme, c’est sa capacité à faire croire qu’il n’y a que ce mode de fonctionnement possible. Et pourtant… Saviez-vous qu’au Bhoutan, on ne compte plus le développement du pays par le PIB, mais par le BNB : Bonheur National Brut ? C’est de cette façon qu’un petit pays d’Asie du Sud a décidé de renverser tous les codes, et d’établir son développement sur 4 piliers majeurs, dont le but est la croissance, non pas des richesses, mais du bonheur des citoyens : une économie durable, la promotion de la culture, le mode de gouvernance et la qualité environnementale. Certes, la situation du pays est unique en son genre et ne peut constituer un modèle à copier. Mais à l’heure où les scientifiques insistent sur les limites de la Croissance, n’est-ce pas un exemple à, au minimum, considérer ? Peut-on seulement s’autoriser à imaginer un autre monde sans sombrer dans la caricature ?

Actuellement, de plus en plus de personnes en Europe et en France font des paris fous comme l’auto-suffisance ou l’auto-production d’énergie. De même, il apparaît dans les sondages que la consommation de produits issus de l’agriculture biologique et locale tend à augmenter depuis des années. Une consommation donc plus réfléchie, raisonnée, souvent au détriment des grandes compagnies, qui ne cessent en retour de nous matraquer de campagnes publicitaires et autres appâts pour continuer nos destructions collectives par l’accaparement consenti de la force de travail de tous.

Mais comme Adrien, un réveil citoyen et un réveil personnel de chacun est entrain de se produire, et il n’en faut pas plus à Walmart, State Gride, Sinopec, Apple, Toyota (n.d.l.r : les 5 entreprises les plus riches du monde selon le Journal du net) pour paniquer.

La conférence

Moro

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Sources : Conférence Gesticulée de Adrien Chaudot / Mr Mondialisation

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