Alors que les effets de l’augmentation de la température globale provoquent déjà des épisodes de sècheresses intenses, des inondations et des incendies de plus en plus extrêmes à travers le monde, cette crise écologique pourrait prochainement se traduire par l’apparition de nouvelles épidémies, déstabilisant davantage la santé publique qui a déjà présenté sa fragilité lors de la pandémie du Covid-19. En Californie, à mesure que la crise climatique assèche les paysages, le nombre de cas enregistré de « fièvre de la vallée », maladie fongique, est en nette augmentation. Or, cette prolifération de champignons pathogènes peut se transformer en méningite, une maladie mortelle pour l’être humain.
En 2012, Rob Purdie a contracté une forme grave de « fièvre de la vallée ». Après de violents maux de tête, cette migraine constante s’est ensuite couplée d’une forte toux, des douleurs thoraciques, une infection des sinus et des essoufflements. Après de long mois de convalescence, cet américain est aujourd’hui coordinateurs des patients et du développement des programmes de rémission au sein de la Valley Fever Institute, en Californie.
« Cette malade a eu un impact énorme sur ma famille et ma santé. Nous avons tout perdu, toute notre sécurité financière et toute notre retraite », a-t-il déclaré au Guardian.
Dix ans après les premières contractions de cette maladie peu commune, la Californie pourrait bientôt faire face à une épidémie de fièvre de la vallée dont le développement et la propagation sont grandement favorisés par les effets du changement climatique. Cette maladie pourrait selon les experts s’étendre dans tout l’ouest américain.
La fièvre de la vallée, ou coccidioidomycose
La fièvre de la vallée, ou coccidioidomycose, est une maladie fongique endémique du sud-ouest des États-Unis. La maladie peut être contractée par la simple respiration des spores du coccidioide, champignon dont les spores pathogènes peuvent parcourir jusqu’à 80 km à partir du lieu de leur éclosion.
Les coccidioides se développent dans la terre sous forme de filaments qui se segmentent et se brisent s’ils sont perturbés. Ainsi, les spores pathogènes peuvent ne jamais être libérés. Cependant, de simples fouilles archéologiques, la présence d’un animal fouisseur, les activités agricoles ou les activités d’urbanisation peuvent participer à libérer les spores responsables de la maladie.
Pour survivre, ces champignons ont besoin de conditions climatiques chaudes et sèches. La Californie offre ainsi un climat parfait pour leur prolifération. Selon Morgan Gorris, chercheuse au laboratoire national de Los Alamos et spécialiste des relations entre la crise climatique et la fièvre de la vallée, à mesure que les températures se réchauffent et que les régimes de précipitations se modifient, une modification de la dynamique de la maladie pourrait se manifester.
« Il y a déjà aujourd’hui davantage de cas de fièvre de la vallée. Une grande partie de l’ouest des États-Unis est déjà très sèche. Quand on regarde les projections du changement climatique on s’attend à ce que ces conditions de sécheresse s’installent sur le long terme, ce qui favorisera le développement de cas de fièvre de la vallée », avertie-t-elle.
Selon une récente étude publiée par Gorris dans le magazine scientifique Geo Health, les zones endémiques du coccidioide changeront considérablement au cours des prochaines années. D’ici 2100, à l’occasion d’un scénario de réchauffement global élevé, les zones d’endémicité doublera, augmentant le nombre d’États touchés de 12 à 17, dont les états frontaliers au Canada, et le nombre de cas de fièvre de la vallée de 50%.
Une expansion déjà observée
Le comté de Kern au nord de Los Angeles, où vit Rob Purdie, a enregistré une augmentation substantielle de cas au cours de la dernière décennie. De 2014 à 2021, le nombre de cas de fièvre de la vallée a augmenté de 1000 à 3000 selon les données de la Valley Fever Institute.
En Arizona et en Californie, pas moins de 20 000 cas ont été signalés au Centre américain de contrôle et de prévention des maladies (CDC) en 2019, et une moyenne d’environ 200 décès par année est enregistrée depuis le début des années 2000.
Enfin, sans surprise, les personnes travaillant en extérieur seraient les plus à risque face à la contraction de cette maladie respiratoire. L’été dernier, à la suite des nouveaux épisodes d’incendies dévastateurs survenus autour des montagnes de Tehachapi, dans le sud-est de la Californie, trois pompiers ont développé une forme grave de la maladie.
L’essor de ces « nouvelles maladies » nous rappelle l’étendue des conséquences insoupçonnées du réchauffement climatique, et l’importance que l’atténuation des effets changement climatique représente pour l’avenir de la santé publique.
W.D.