Le concept d’identité nationale, souvent accaparé par l’extrême droite, est généralement associé à des marqueurs religieux, ethniques, ou à une vision fantasmée du passé. Pourtant, l’histoire de France regorge également de symboles forts, issus de luttes sociales et porteurs de valeurs progressistes. Ces repères, ancrés à gauche, méritent d’être remis en lumière.

Quand on parle de la France, on peut bien sûr penser à son patrimoine matériel ou à ses traditions, mais il existe toutefois bien des trésors collectifs, comme la Sécurité sociale. Là-dessus, on entend cependant très peu l’extrême droite, qui évoque néanmoins constamment l’identité nationale.

Les vraies fondations de la France moderne : la révolution

Si la France est internationalement reconnue comme le pays des droits humains, c’est en grande partie grâce à son histoire révolutionnaire. La Révolution de 1789, inspirée par les idéaux de liberté, d’égalité et de fraternité, a posé les bases d’un modèle sociale tourné vers l’émancipation du peuple face aux privilèges.

Cette rupture historique a fondé une société basée sur la Déclaration des droits de l’Homme et du Citoyen, et non sur une tradition monarchique ou religieuse. Dès cette époque, le peuple a revendiqué l’égalité et contesté les privilèges, un mouvement de fond qui a traversé les siècles.

Les luttes sociales, le patrimoine français

Et depuis cette date, les insurrections du peuple contre l’iniquité et pour le partage et la solidarité n’ont cessé de se multiplier. On peut citer par exemple l’épisode de la Commune en 1871 qui représentait les prémisses d’une République sociale.

Mais on pense aussi aux grands soulèvements sociaux qui ont toujours secoué le pays pour plus de justice, comme les gigantesques grèves de 1936 qui aboutirent aux congés payés, mai 68 et son augmentation des salaires, ou bien encore plus récemment le mouvement des Gilets Jaunes ou Bloquons tout.

Un système que tout le monde nous envie

Pendant que les libéraux versent des larmes de crocodile sur les « prélèvements obligatoires » du pays, d’autres vantent le modèle français dans bien des domaines dont l’immense majorité provient des luttes et de la pression populaire.

Malgré les critiques récurrentes sur le niveau des « prélèvements obligatoires » , le modèle social français reste l’un des plus protecteurs au monde. Des dispositifs comme la Sécurité sociale, les retraites par répartition, ou les allocations familiales trouvent leur origine dans des luttes populaires, notamment celles du Conseil National de la Résistance poussé par le Parti communiste.

À cela s’ajoute un système éducatif public, laïc et accessible, qui permet un accès relativement peu coûteux aux études supérieures, en contraste frappant avec des pays comme les États-Unis.

Un modèle à travers le monde

Depuis l’époque des Lumières, la France a joué un rôle majeur dans la diffusion des idéaux de liberté, d’égalité et de souveraineté populaire. Si la Révolution américaine a été l’une des premières à mettre en œuvre ces principes, la Révolution française les a portés à un niveau universel, en affirmant leur valeur pour tous les peuples. Ce socle idéologique a ensuite inspiré de nombreux mouvements démocratiques à travers le monde.

Longtemps considérée comme un modèle en matière de droits humains et d’universalisme, la France conserve un statut diplomatique important, notamment en tant que membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU. Cependant, cette position d’influence est aujourd’hui largement remise en question.

Sur le plan intérieur, plusieurs organisations internationales comme Amnesty International ou Human Rights Watch ont dénoncé un recul préoccupant des libertés publiques, à travers la répression des mouvements sociaux, les violences policières ou encore les lois sécuritaires portant atteinte à la liberté de la presse et de manifester.

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À l’international, la diplomatie française peine à incarner une ligne humaniste cohérente. Son silence, voire son alignement sur des positions controversées dans des crises majeures — comme la guerre à Gaza — a entamé sa crédibilité, en particulier dans le monde arabe et en Afrique.

Si la France continue d’être écoutée dans certaines instances multilatérales, notamment grâce à son héritage et à ses capacités stratégiques, sa voix pèse aujourd’hui moins qu’auparavant sur les grands enjeux liés aux libertés fondamentales et à l’humanisme.

Des trésors en grand danger

Depuis des décennies, la Sécurité sociale, le système de retraites ou encore les services publics comme l’hôpital ou l’école subissent des coupes budgétaires et une dégradation progressive. Nombre de ces acquis sont aujourd’hui fragilisés par des politiques néolibérales ou autoritaires.

Parallèlement, l’extrême droite instrumentalise l’identité nationale sans jamais mentionner ces piliers sociaux, préférant recentrer le débat sur des thématiques identitaires, religieuses ou sécuritaires.

 

Un modèle qui perd en crédibilité

L’extrême droite a détruit des pans entiers de notre Histoire en s’attaquant constamment à l’humanisme et la fraternité, symboles français. Le gouvernement Macron, lui-même, servant de marchepied à ce courant, a largement contribué à salir l’image de « pays des droits humains » de la France.

Il a ainsi fait reculer la liberté de la presse, réprimer violemment les mouvements sociaux (en particulier les Gilets Jaunes), et s’est même montré incapable de s’opposer à la barbarie sur le plan international, comme tout le monde a pu le constater avec l’inaction face au génocide à Gaza.

Enfin, comment ne pas évoquer le joyau le plus précieux du pays, celui de la biodiversité, de nos forêts, des fleuves et rivières et des océans ? Autant d’espaces naturels sans lesquels le peuple français n’existerait pas et qui sont pourtant menacés par la catastrophe environnementale.

Désastres contre lesquelles les plus grands partisans de l’identitarisme ne font rien. Pire, ceux-ci vont même jusqu’à nier sa réalité. Et sur ces sujets, sans doute comme sur les autres, on ne se rendra peut-être compte de l’importance de ces richesses qu’après les avoir perdues.

La gauche face à l’identité nationale : un terrain à reconquérir

Par crainte d’alimenter les discours identitaires ou excluants, la gauche a longtemps délaissé le terrain de l’identité nationale. Pourtant, cette identité ne saurait être abandonnée à l’extrême droite. Elle peut et doit être redéfinie autour de principes universels : l’émancipation, la solidarité, la justice sociale et la préservation du vivant.

Il est temps de reconstruire un récit collectif où la Sécurité sociale, l’école publique, les grandes mobilisations populaires ou la protection de l’environnement deviennent les véritables piliers de l’identité française. Ce sont eux qui incarnent, aujourd’hui encore, les valeurs de fraternité, de courage civique et de résistance aux dominations.

Réinvestir ce terrain, c’est refuser de céder à la droite la définition même de la France. C’est faire de chaque hôpital défendu, de chaque forêt protégée, de chaque droit conquis, une part vivante de ce que nous sommes collectivement. Les forces progressistes ont là un levier puissant : non pour opposer, mais pour rassembler autour d’un projet national inclusif et tourné vers l’avenir.

Simon Verdière


Photo de Amy-Leigh Barnard sur Unsplash

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