Pour la première fois, le Fonds des Nations unies pour l’enfance (UNICEF) présente un rapport qui lie droits de l’enfant et crise climatique. Les conclusions de l’enquête révèlent que plus d’un milliard d’enfants, sur les 2,2 milliards que compte la Terre, vivent dans l’un des 33 pays classés « à très haut risque ». Et pour cause, partout dans le monde, la situation climatique actuelle menace directement la santé des plus jeunes d’entre nous, mais aussi leur éducation et leur sécurité. « Aucun enfant ou presque ne sera épargné », a déclaré Henrietta Fore, Directrice générale de l’organisation. Ce rapport, intitulé La crise climatique est « une crise des droits de l’enfant », constitue la première analyse détaillée de ces risques à travers le prisme de la jeunesse, et enjoint les gouvernements, plus que jamais, à agir pour un avenir meilleur.
Lancé en collaboration avec le mouvement Fridays for Future (« Les vendredis pour l’avenir ») à l’occasion du troisième anniversaire de la grève mondiale de la jeunesse pour le climat, le nouveau rapport de l’UNICEF publié le jeudi 19 août révèle qu’1 milliard d’enfants, sur les 2,2 milliards que compte la Terre, vivent dans l’un des 33 pays classés « à très haut risque » de subir des chocs climatiques importants. Pour le moment, ce chiffre ne concerne que les enfants déjà touchés par les effets du dérèglement climatique, le bilan risque donc de s’aggraver d’année en année, voire de mois en mois. « C’est la première fois que nous brossons un tableau aussi précis de la vulnérabilité des enfants aux changements climatiques, et celui-ci est extrêmement préoccupant. » alerte Henrietta Fore, Directrice générale de l’UNICEF.
Les enfants, premières victimes du dérèglement climatique
Si l’organisation s’intéresse de près au changement climatique aujourd’hui, c’est parce que celui-ci impacte d’abord et avant tout les personnes les plus vulnérables de la planète, soit les plus jeunes d’entre nous. En effet, par rapport à un adulte, un enfant a besoin de plus d’eau et de nourriture par unité de masse corporelle, résiste moins bien aux phénomènes météorologiques extrêmes et présente une plus grande sensibilité aux produits chimiques toxiques, aux variations de température et aux maladies, entre autres chocs liés au climat.
L’agence de l’Organisation des Nations Unies consacrée à l’amélioration et à la promotion de la condition des enfants ne peut donc qu’être alarmiste face au sort à venir de ces milliards de jeunes : « les chocs climatiques et environnementaux ont des répercussions sur l’ensemble des droits des enfants, de leur droit à un air pur, à de la nourriture et à de l’eau salubre, à l’éducation et au logement, à la protection contre l’exploitation, jusqu’à leur droit à la survie », explique la Directrice générale.
Et pour cause, le document affiche des conclusions dramatiques : 850 millions d’enfants (soit 1 enfant sur 3) vivraient ainsi dans des zones exposées à au moins quatre facteurs de stress climatique, et pas moins de 330 millions (1 sur 7) dans des régions où se cumulent au moins cinq facteurs majeurs. En d’autres chiffres, 815 millions d’enfants sont fortement exposés à la pollution au plomb, 820 millions d’entre eux connaitront ou connaissent déjà des canicules ou des « vagues de chaleur » assourdissantes, alors que 920 millions sont fortement exposés aux pénuries d’eau. Enfin, 1 milliard de jeunes à travers le globe font face à des niveaux extrêmement élevés de pollution atmosphérique.
« Aucun enfant ou presque ne sera épargné » : la menace pèse partout dans le monde
Tous les pays du monde sont ainsi classés par l’organisation selon le degré d’exposition des enfants aux chocs climatiques et environnementaux (comme des cyclones ou encore des canicules…) et leur degré de vulnérabilité à ces chocs, mesuré en fonction de leur niveau d’accès à des services essentiels. Le croisement de ces données permet la création d’un Indice des risques climatiques pour les enfants (IRCE), créé spécialement à l’occasion de la sortie de ce nouveau rapport. Celui-ci se fonde donc à la fois sur le corpus croissant des nouvelles données probantes sur le climat ainsi que sur les données concernant la vulnérabilité des enfants. Il rassemble dans ces deux catégories 57 variables afin de mesurer les risques existant dans l’ensemble des pays et régions du monde, et fournit ainsi le premier aperçu complet des risques climatiques pesant sur les enfants.
L’Islande apparait ainsi comme le pays le plus sûr de la planète pour les plus jeunes de ses concitoyens, alors que la Belgique se dresse non loin derrière, 145e sur 164 pays observés. Les États-Unis se situe tant bien que mal au milieu du classement, la faute notamment aux dérèglements climatiques majeurs que connait le pays, comme les mégafeux qui ont sévis sur la côté Ouest cet été.
Mais si l’on découvre au fil des pages du rapport que la quasi-totalité des enfants de la planète sont exposés à au moins un type d’aléa lié au climat et à l’environnement, l’étude démontre que les pays les plus touchés font face à des chocs multiples et concomitants qui mettent en péril leurs progrès en matière de développement et accentuent les privations dont sont souvent déjà victimes les plus jeunes. C’est le cas par exemple de plusieurs pays africains, qui occupent tristement le haut du podium. Les enfants vivant en République centrafricaine, au Tchad, au Nigéria, en Guinée et en Guinée-Bissau sont les plus exposés aux effets des changements climatiques et connaissent de multiples pressions sur leurs droits à la santé, à l’éducation et à la sécurité, selon l’UNICEF.
Entre injustice et inaction politique, des jeunes voix s’élèvent
Mais au-delà de ce classement, l’étude met également en évidence un fossé entre les lieux de production des émissions de gaz à effet de serre et les endroits où les enfants subissent de plein fouet les effets des changements climatiques. Ensemble, les 33 pays « à très haut risque » ne totalisent que 9 % des émissions mondiales de CO2, contre près de 70 % pour les 10 plus gros émetteurs de la planète, dont seul un est classé comme « à très haut risque » dans l’Indice (l’Inde). « Il faut mettre fin à cette injustice. Il est immoral que les pays les moins responsables des changements climatiques en soient les premières et les principales victimes », exhortent les représentants du mouvement Fridays for Climate, dont la jeune suédoise Greta Thunberg, invités à collaborer à la publication.
Ce rapport, intitulé La crise climatique est une crise des droits de l’enfant : Présentation de l’Indice des risques climatiques pour les enfants, constitue la première analyse détaillée de ces risques à travers le prisme de la jeunesse. Après avoir présenté ses conclusions dans un communiqué de presse paru le jeudi 19 août, l’agence onusienne appelle de ses vœux une action politique concrète pour inverser la tendance, et se joint ainsi au mouvement porté par de plus en plus de jeunes à travers le monde qui œuvre pour une société plus durable et surtout plus viable à l’avenir. Leur avenir. « Depuis trois ans, des voix d’enfants s’élèvent à travers le monde pour exiger que soient menées des actions concrètes. L’UNICEF relaie leur appel au changement en le doublant d’un constat irréfutable : la crise climatique est une crise des droits de l’enfant », soutient Henrietta Fore.
L’UNICEF enjoint donc les gouvernements et les entreprises à écouter les enfants, à mettre en place des actions prioritaires pour les protéger, et, parallèlement, à redoubler d’efforts pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre. Selon l’agence onusienne, seules des actions réellement transformatrices permettront de transmettre aux enfants une planète habitable. Et il est plus que temps de s’y mettre.
L.A.
Sources :
- Rapport : https://www.unicef.org/media/105536/file/UNICEF_climate%20crisis_child_rights_crisis-summary-FR.pdf
- Communiqué de presse : https://www.unicef.org/fr/communiqu%C3%A9s-de-presse/un-milliard-denfants-sont-%C2%AB-tr%C3%A8s-fortement-expos%C3%A9s-%C2%BB-aux-impacts-de-la-crise