Alors que le nutri-score (ou logo 5C) entre en vigueur en France, le lobbying acharné des industries de l’agro-alimentaire a une nouvelle fois porté ses fruits : en effet, le tableau destiné à informer rapidement et facilement les consommateurs de la qualité nutritionnelle des aliments qu’ils achètent ne sera que facultatif ! Autant dire pratiquement inutile. Une vraie victoire pour Coca-Cola, Nestlé, Mars, Unilever et co. dont le travail de lobbying auprès des pouvoirs leur a permis de réduire sensiblement l’intérêt du nouveau logo et même de brouiller une nouvelle fois les esprits.

Le Logo 5C était rempli de belles promesses, alors que les consommateurs sont souvent perdus face aux étiquettes des emballages alimentaires et que la mal-nutrition est un problème sanitaire majeur. Grâce au code couleur, l’objectif était de lutter contre la malbouffe, en encourageant les individus à se tourner rapidement vers des produits plus sains et en poussant les producteurs à proposer des aliments de meilleure qualité. Ça, c’était sur le papier.


Cinq couleurs pour informer le consommateurs

L’idée d’un tel code avait été émise pour la première fois en 2014, avant qu’un arrêté ministériel signé le 31 octobre 2017 dernier fasse finalement entrer en vigueur le nutri-score. Cinq lettres allant de A (vert) à E (rouge) indiquent rapidement la qualité nutritionnelle des aliments. Un produit riche en vitamines et en fibres se verra attribuer une bonne note, alors que les aliments trop sucrés, salés ou gras seront pénalisés. Avec ce nouveau barème, la volonté était d’offrir une alternative plus compréhensible au système d’information nutritionnel qui consiste à préciser pour chaque aliment la teneur en lipides, protéines etc… pour 100 grammes.

L’affichage du logo n’étant cependant pas obligatoire, les professionnels du secteur ont réagi de diverses manières. Certaines enseignes et marques se sont rapidement engagées à apposer le nouveau logo à l’ensemble de leurs produits. C’est notamment le cas de Leclec pour sa « Marque Repère », d’Auchan, ou encore de Danone et Fleury-Michon. D’autres, en revanche, notamment Coca-cola, Nestlé, Mars, Mondelez, Pepsico ou Unilever ont annoncé vouloir utiliser un système d’étiquetage alternatif. De là à penser que le nutri-score, dont la compréhension à le mérite d’être simple – mais dont l’efficacité réelle a été discutée, notamment par l’ANSES – entrerait directement en contradiction avec l’intérêt de ces multinationales…

291 | rayon confiture

Un logo facultatif à la portée limitée

Pour cause, comme on ne peut que le constater, la mise en place de nouvelles signalétiques sur les produits alimentaires ne plaît pas aux industriels. Entre 2014 et 2017, ces derniers ont réalisé un travail de lobbying important pour empêcher la mise en place du nutri-score et le vider de son efficacité. « Au niveau européen, note francetvinfo.fr, l’industrie agroalimentaire aurait dépensé un milliard d’euros en lobbying pour qu’un projet de feux tricolores sur les produits agroalimentaires, portés par certaines eurodéputés, ne passe pas. »

On peut d’ores et déjà douter de l’efficacité d’un logo qui ne sera utilisé que sur certains produits au gré de la volonté des industriels, d’autant que les « big-six » proposent désormais un système de notation alternatif, conçu par leurs propres soins, et qui pourrait entrainer une nouvelle confusion dans l’esprit des consommateurs. Élaborée de manière non-indépendante, la nouvelle grille risque d’être favorable aux industriels, quitte à induire les consommateurs en erreur, commente Foodwatch, qui y voit une intention de « brouiller le débat ».

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Sans détour, Karine Jacquemart, présidente de l’ONG en France, commente le nouveau tour de passe-passe : « ces géants de l’industrie agro-alimentaire utilisent une vieille technique habituelle qui consiste à brouiller le débat ; cette fois en proposant leur propre logo dénué de tout fondement scientifique. C’est de la désinformation. Ils n’ont pas vraiment l’intention de favoriser une alimentation saine en produisant des aliments plus équilibrés. Ils cherchent simplement à échapper à toute amélioration de leurs produits ». Bref, la perpétuation du business as usual, selon l’ONG.

La lecture, du « nutri-couleur », logo alternatif proposé par les industriels, s’avère en effet autrement plus délicate. Avec un système de note par catégorie de nutriments (selon les teneurs, chaque nutriment obtient une couleur propre parmi 5), et des chiffres calculés en fonction d’une portion (notion particulièrement vague), le consommateur risque de s’emmêler les pinceaux plus qu’autre chose, d’autant que la manière dont les couleurs sont définies n’a pas été rendue publique. Faut-il vraiment s’en étonner ?

Le « nutri couleur » proposé par les industriels. Une guirlande de couleurs plus esthétique que communicative.

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