Dans la région de Barroso, au Portugal, l’entreprise Savannah Resources projette de construire une mine de lithium à ciel ouvert, étendue sur 593 hectares. Alors que la population locale se mobilise contre ce projet, une équipe de militants et de professionnels a publié un rapport détaillant tous les dangers liés à cette construction, qui met en péril le mode de vie de la population locale.

Au nord du Portugal, dans la région de Barroso, les habitants se mobilisent contre un projet qui pourrait mettre en péril leur mode de vie. En effet, l’entreprise Savannah Resources prévoit de créer une gigantesque mine de lithium à ciel ouvert. Étendue sur 593 hectares, elle deviendrait la plus grande mine de lithium d’Europe.

Les habitants de la région de Barroso vivent grâce à l’agriculture. Crédit : Idalia Rie

Pour lutter contre ce projet et se faire entendre, la population locale a créé un campement au Portugal, où des journalistes du monde entier ont été conviés. Venus de l’Espagne, du Mexique, de la Suisse et de la France, ces intervenants étrangers ont pu recueillir des informations sur le projet, et comprendre les motivations de la population. C’est le cas d’une équipe de documentalistes, photographes, militants et journalistes qui se sont rendus sur le terrain.

Dans un rapport rédigé par Francisco Norega, ils ont expliqué les raisons pour lesquelles les habitants s’opposent à la construction de la mine de lithium, l’impact dévastateur qu’elle aurait sur leur mode de vie, sur l’agriculture et la faune locale. Dans ce rapport, Francisco Norega déconstruit le discours apporté par l’entreprise Savannah Resources, qui se dit durable et responsable, mais qui ne prend pas en compte les conséquences de son projet sur la population de la région de Barroso.

La population locale a monté un campement pour faire entendre ses revendications. Crédit : Idalia Rie

Dans Diário de Notícias, un grand journal national du Portugal, un entretien a été publié avec David Archer, le PDG de la Savannah Resources. Le rapport publié par Francisco Norega est une vive réponse au PDG, qu’il accuse de désinformation en déconstruisant tous les points cités par l’entreprise.

Barroso, une région qui vit grâce à l’agriculture

La région de Barroso, qualifiée de « moribonde » par le PDG de la Savannah Resources, a été classée en 2018 parmi le Patrimoine Agricole Mondial, par l’Organisation pour l’alimentation et l’agriculture des Nations Unies.

En Europe, seulement sept régions ont reçu cette distinction. En effet, la région de Barroso se distingue pour son travail dans l’agriculture, car les habitants vivent tout en prenant soin des animaux et œuvre collectivement. Une véritable entraide s’est formée entre les habitants, et ces derniers ont une gestion collective de l’eau et des ressources naturelles. De plus, bien que la population soit vieillissante et en déclin, une vraie vie associative et culturelle est présente au sein des villages.

Unis, les habitants de Barroso manifestent contre la création de la mine de lithium. Crédit : Idalia Rie

La population de Barroso vit avant tout grâce à l’activité agricole et l’élevage. Les habitants élèvent la race bovine Barrosa, qui était auparavant menacée d’extinction, notamment à cause des activités minières. Cette viande est considérée comme étant l’une des meilleures du pays. La région a donc impérativement besoin de l’agriculture pour vivre.

L’extraction de lithium : un danger pour la population locale

Les dangers de la création d’une mine de lithium à ciel ouvert dans cette région sont multiples : explosions, poussière, déviation des cours d’eau, contamination des rivières… Tous ces risques sont un véritable danger pour la population locale, aussi bien pour sa santé que pour son mode de vie.

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L’extraction du lithium se ferait à seulement 40 mètres de certaines maisons, ce qui prouve que l’entreprise ne prend pas du tout en compte la population environnante. De plus, de nombreuses personnes pourraient perdre leur emploi à cause de la construction de la mine de lithium. C’est notamment le cas de centaines d’agriculteurs, de bergers, d’éleveurs et d’apiculteurs. Bien que David Archer, le PDG de Savannah Resources, affirme que la mine de lithium sera à l’origine de la création de centaines d’emplois, ces derniers seront au détriment de ceux déjà existants dans la région, et qui sont vitaux pour la vie de la population locale.

Les habitants de Barroso manifestent contre la mine de lithium, une vraie menace pour leur mode de vie. Crédit : Idalia Rie

Le PDG affirme également que la création d’emplois entraînerait la venue de nombreuses personnes qui souhaiteraient habiter dans la région, ce qui pourrait redynamiser le territoire. Cependant, les journalistes et la population locale pointent du doigt tous les désavantages liés à la création de la mine et qui auront des conséquences dévastatrices sur la vie locale. En effet, personne ne voudra vivre à côté de la mine, manger de la viande et boire de l’eau contaminées par la poussière et l’exploitation minière.

Enfin, cette contamination de l’eau va mettre en danger la santé de la population locale, ainsi que celle de nombreuses espèces animales protégées de la région. Selon un article publié par le site Reporterre, la mine de lithium présente sur le site d’Atacama, au Chili, cause un vrai problème pour la gestion de l’eau. En effet, du chlore et des solvants se dispersent dans l’eau, ce qui engendre un danger pour la santé humaine, et détruit des micro-organismes nécessaires à la biodiversité. De plus, l’extraction minière pompe beaucoup d’eau, ce qui peut causer de grandes sécheresses dans les régions impactées.

« Cette double perte d’eau abaisse le niveau de la nappe phréatique, assèche le sol et la végétation, au détriment des animaux, des cultures et des gens », ont déclaré les Qollas, les autochtones vivant dans la région chilienne, cités par le média Reporterre.

L’existence des alternatives au lithium

Côté écologie, l’entreprise Savannah Resources dit agir en faveur de l’environnement, puisqu’elle met en valeur les voitures électriques. Si ces dernières ne polluent pas, elles ont tout de même besoin d’être alimentées et de posséder des batteries de lithium.

Cependant, selon Francisco Norega, les batteries de lithium ont une durée de vie trop courte (entre 4 et 10 ans), rencontrent de nombreux obstacles pour être recyclées, et le prix des voitures est trop élevé. De plus, la voiture électrique est toujours un déplacement individuel alors qu’il existe des transports collectifs, comme le tramway, qui ne fonctionnent pas grâce au lithium, et qui mériteraient d’être davantage utilisés.

De plus, il existerait un autre moyen d’alimenter ces batteries, autrement qu’avec du lithium. En Chine, des batteries au sodium sont en cours de développement. Ce projet, qui pourrait voir le jour en 2023, a de nombreux avantages car les batteries seraient plus autonomes et elles ne craindraient ni le froid, ni la chaleur. Enfin, des batteries écologiques et non toxiques sont également en préparation, et sont fabriquées avec des matériaux recyclables et réutilisables.

Avec ce rapport détaillé et constructif, cette équipe de professionnel souhaite se joindre à la mobilisation de la population locale de Barroso. Grâce à la mobilisation des habitants et à la médiatisation de cette affaire, le mouvement contre la construction de la mine de lithium prend de plus en plus d’ampleur.

Lisa Guinot

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