L214 porte plainte contre un élevage affilié au groupe LDC, un leader européen de la volaille notamment connu pour ses marques Le Gaulois et Maître CoQ. Situé dans le Montauban-de-Bretagne (35), il sélectionne génétiquement ses poulets pour une croissance ultrarapide, au péril de la santé de ceux-ci. La plainte vise également le groupe LDC, responsable de l’utilisation de cette souche génétique.
Pour la cinquième fois depuis 2020, l’association de défense des animaux met en lumière l’horreur dans laquelle baignent les élevages de poulets affiliés au groupe LDC. Une vaste opération de réétiquetage des poulets de la marque Le Gaulois a été lancée par L214 dans les supermarchés de Paris le jeudi 16 novembre et va s’étendre dans d’autres régions de France à partir de samedi. Nous partageons leur communiqué de presse datant du du 16 novembre 2023.
Des images accablantes, des données scientifiques sans appel
Les poulets Le Gaulois sont issus d’une sélection génétique poussée qui a pour objectif de les faire grossir anormalement vite1. Leur croissance est 4 fois plus rapide qu’en 1950, ce qui engendre chez eux malformations des membres, maladies cardiaques et respiratoires, ou encore développements musculaires disproportionnés. Leur souche génétique porte un nom de code digne d’une créature de Frankenstein : Ross 3082.
Les images de cet élevage d’Ille-et-Vilaine s’étendent du début de la mise en place des poussins jusqu’à quelques jours avant leur envoi à l’abattoir. Les 34 000 poussins passent de 50 g à 3 kg en l’espace de 6 semaines, soit une multiplication de leur poids par 60.
Ces images tournées par L214 montrent des poussins sélectionnés génétiquement dans un élevage intensif de poulet qui approvisionne LDC, le leader européen de la volaille, qui détient notamment le Gaulois.
Ces poussins sont passés de 50 grammes à 3 kilos en 40 jours et développent… pic.twitter.com/5hSlg9AJyF— Vakita (@vakitamedia) November 16, 2023
Ils passent leur courte vie dans le même bâtiment fermé, sans accès à l’extérieur, nourris par un circuit automatique distribuant un mélange de céréales et de soja OGM (importé puisque interdit à la culture en France) pour les faire grossir très vite. Même la luminosité est optimisée pour stimuler leur activité et leur prise de poids. Ils vivent à même le sol sur une litière de paille, vite gorgée de déjections et d’urine et jamais changée.
Des centaines d’animaux ne survivent pas à ces conditions et meurent avant même d’être envoyés à l’abattoir, notamment en raison de leurs caractéristiques génétiques.
Opération de stickage pour pirater une communication fallacieuse
Les images de ces poulets mal en point sont révoltantes. Mais le consommateur ne fait pas forcément le lien au moment de son acte d’achat. C’est pourquoi L214 passe à l’action dans les supermarchés : le jeudi 16 novembre à Paris et à partir du samedi 18 novembre dans plusieurs régions de France, L214 va réétiqueter les barquettes de poulet Le Gaulois dans les rayons avec un sticker explicite sur cette sélection génétique.
Des actions de sensibilisation auront également lieu en marge de ces actions de stickage pour informer les consommateurs des pratiques de la marque. Les bénévoles distribueront aux passants des tracts revêtant la forme d’une barquette de poulet Le Gaulois.
Des centaines de millions de poulets Ross 308
Pour Léo Le Ster, responsable de la campagne nationale : « Les images montrent que la vitesse de croissance des poulets Ross 308 est impressionnante : ces poussins passent de 50 g à 3 kg en 6 semaines, leur poids est multiplié par 60 ! Leurs problèmes de santé dus à cette vitesse de croissance extrême sont impressionnants également. Le Gaulois sait le calvaire enduré par ces animaux sélectionnés génétiquement. Il est bien renseigné sur les boiteries sévères, les problèmes respiratoires ou cardiaques… contrairement à sa clientèle. »
La sélection génétique extrême implique une croissance fortement accélérée, responsable d’une plus grande fragilité cardiaque et respiratoire chez les poulets. Cette fragilité est causée par le relatif sous-développement du cœur et des poumons par rapport à la corpulence des animaux.
Le syndrome de la mort subite, qui touche surtout les mâles de souches à croissance rapide, est la principale cause de mortalité en élevages de poulets de chair. L’ascite (accumulation de liquide dans l’abdomen générée par une insuffisance cardiaque) est également une cause de décès importante3.
L’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) a indiqué en 2010 qu’environ 30 % des poulets de chair élevés de manière standard présentaient des anomalies aux pattes. Selon une étude plus ancienne réalisée en 2004, ce sont 75 à 90 % des poulets issus de souches à croissance rapide qui souffriraient de troubles de locomotion4. Certains meurent donc parce qu’ils ne peuvent même plus se déplacer jusqu’aux abreuvoirs.
Pour les scientifiques, ces problèmes sont une conséquence directe des changements morphologiques induits par la croissance accélérée. Ils sont principalement liés au surdéveloppement des muscles de la poitrine, et au fait que les pattes sont trop courtes par rapport au poids des oiseaux.
Une demande contre le pire de l’élevage intensif : l’ECC
« Les pires pratiques doivent reculer : la marque Le Gaulois et sa maison-mère, le groupe LDC, doivent à minima s’engager sur les critères portés par le European Chicken Commitment, comme l’ont déjà fait plus de 120 entreprises en France. » Léo Le Ster, responsable de la campagne nationale.
L214 et une trentaine d’associations de défense des animaux en Europe demandent depuis deux ans au groupe LDC (et à sa marque Le Gaulois) de s’engager à respecter les critères du European Chicken Commitment (ECC) contre le pire de l’élevage intensif des poulets. Parmi les critères de cette demande, on retrouve notamment :
- l’interdiction des souches de poulets à croissance ultrarapide engendrant de sévères problèmes de santé pour les animaux ;
- la diminution de la densité d’animaux dans les élevages (avec un maximum de 15 à 17 poulets par mètre carré au lieu de 22).
Aujourd’hui, près de 120 entreprises de l’agroalimentaire et toutes les enseignes de supermarchés (Fleury Michon, Bonduelle, Carrefour, E. Leclerc…) se sont engagées à bannir le pire de l’élevage intensif de leurs approvisionnements en viande de poulets en France en appliquant les mesures du European Chicken Commitment. À échéance et en l’état, la viande de poulets premier prix de marque Carrefour, Intermarché, Lidl ou encore Aldi sera donc mieux-disante que celle de marque Le Gaulois (hors label plein air).
– L214
Photo de couverture : © L214
Sources :
1. Ces poulets sont sélectionnés pour grossir 4 fois plus vite qu’en 1950.
2. La souche (ou race) de poulet Ross 308 est la plus commune chez les 800 millions de poulets élevés et abattus chaque année en France pour leur chair. Elle a été sélectionnée par l’entreprise Aviagen pour un rendement optimal entre consommation d’aliment et croissance des parties du corps les plus rentables.
3. INRA, « Les pertes alimentaires dans la filière poulet de chair » (p. 172).