La question peut paraître dérisoire, voire provocatrice, mais l’empreinte écologique des sapins de Noël mérite clairement notre attention. Destruction des sols, dérèglement climatique, pollution des eaux, biodiversité dévastée, ce secteur touche à tous les enjeux environnementaux de notre siècle. Heureusement, des alternatives existent !
Chaque année, des dizaines de millions de ces arbres sont commercialisés à travers le monde, dont au moins 50 millions en Europe et 5 millions en France. À cela, il faut également ajouter les ventes de sapins artificiels qui ne présentent guère un bilan plus reluisant : en France, il s’en écoule près d’un million par an, la plupart du temps importés directement depuis la Chine.
Le sapin, une monoculture comme une autre
Bien sûr, le temps où les conifères étaient coupés dans des forêts est bien révolu pour l’immense majorité des pays. Aujourd’hui, ils sont cultivés comme du maïs ou du blé. Ils sont plantés en monoculture en rang d’oignon, puis récoltés comme n’importe quel fruit ou légume.
Et comme pour les autres exploitations intensives, les industriels utilisent des agents chimiques très nocifs pour l’environnement. C’est massivement le cas dans le Morvan, première région productrice de sapin de Noël de France.
Déforestation et destruction des sols
« Ces cultures sont traitées chimiquement et jusqu’à neuf fois par an. Donc cela pollue la nature, l’eau, la terre et cela impacte la vie des insectes et des oiseaux qui disposent de moins de réserves pour leurs nids » dénonce auprès de France Bleu, Muriel André, membre d’Adret Morvan, un collectif local contre ce type de production.
Si certains pensent que cette façon de faire évite la déforestation, ils se trompent. Et pour cause, ces monocultures nécessitent des surfaces de plusieurs hectares. Or, de nombreux industriels rachètent des parcelles de feuillus pour les abattre intégralement et les remplacer par des sapins. Bien évidemment, tout le procédé se déroule souvent à l’aide de coupes rases, dévastatrices pour les sols et la biodiversité.
C’est aussi le cas des terres agricoles que de plus en plus de propriétaires cèdent pour la culture d’arbres de Noël. Or, les sapins ne sont pas des légumes et la durée de leur croissance pour cet usage spécifique peut aller de 5 à 10 ans. Autant de temps pendant lequel ces terres fertiles seront monopolisées et inemployables pour nourrir les êtres humains ou abriter les espèces sauvages. À terme, à force de coupes, labours et traitements chimiques, il existe un risque de stérilité définitive pour ces sols.
Au niveau des émissions de gaz à effet de serre, l’impact des sapinières reste très compliqué à évaluer. Leur production ne cause pas beaucoup de dégâts puisqu’elle dégage à peine 3,1 kg de CO² par arbre. Loin des émissions annuelles d’un Français moyen (entre 7000 et 11 000 kg) et même de celles qu’un être humain devrait avoir pour vivre de façon soutenable (autour de 2000 kg). Reste qu’il demeure des facteurs supplémentaires à considérer et qui sont difficilement quantifiables. La provenance du sapin peut par exemple entrer en ligne de compte. Mais on peut également penser aux forêts de feuillus qui sont rasées pour effectuer ces plantations et aux engins mobilisés pour ces actions.
Existe-t-il d’autres possibilités ?
Pour ne pas trop plomber l’ambiance des fêtes de fin d’année, il convient tout de même de se pencher sur les solutions de rechange à cette tradition. Écartons d’emblée les sapins artificiels en plastique. Outre sa matière très mauvaise pour l’environnement, une étude affirme que sa production engendrerait trois fois plus de CO² que son homologue naturel, d’autant plus qu’il est le plus souvent importé de Chine. D’après les mêmes recherches, il faudrait donc garder l’objet pendant vingt ans pour le « rentabiliser » écologiquement. Or, les gens le conservent durant seulement six ans en moyenne.
Bien informés sur la volonté grandissante des Français de protéger la planète, les producteurs ont mis en place une série de labels dont certains font plus figure de greenwashing que d’un véritable effort. Il existe cependant une part de sapins bio qui reste pourtant extrêmement infime (à peine 1 %). Si l’on peut se féliciter de la fin des pesticides dans ce type de culture, elle ne résout néanmoins pas les problèmes d’occupation et de destructions des sols.
Un sapin vivant à la maison ?
Enfin, certains proposent également des sapins en pot qu’il est possible de replanter par la suite. La solution pourrait paraître séduisante, mais elle appauvrit aussi les sols puisque la terre fertile dans laquelle a poussé l’arbre vient avec le pot. À terme, ce sont des tonnes de terre qui pourraient être perdues. Tout le monde n’a par ailleurs pas forcément un terrain pour installer définitivement ces conifères.
La moins mauvaise option sur le plan écologique, pour ceux qui tiennent absolument à avoir un sapin naturel, consiste peut-être à effectuer une location. Certaines entreprises proposent en effet de louer des arbres vivants en pot. Ceux-ci sont ensuite replantés. Cependant, ce processus peut nécessiter un transport par camion qui n’a rien de vertueux. Par ailleurs, ce service coûte souvent beaucoup plus cher puisqu’il peut aller de 20 € à 120 €.
Et si nous fabriquions nous-mêmes notre sapin ?
Pour finir, notons une dernière possibilité intéressante, celle de confectionner soi-même son arbre de Noël. Certes, il ne s’agira pas d’un véritable sapin, mais il est possible d’acheter des objets originaux et durables qui pourront être utilisés tous les ans.
On évitera bien sûr le plastique pour privilégier le bois ou le carton. Pour les bricoleurs, il est même tout à fait envisageable de concevoir son sapin à partir de matériaux de récupération. Force est de constater que certains arrivent à des résultats très esthétiques qui n’ont rien à envier au traditionnel sapin.
Vers un changement d’habitude ?
Pour finir, notons tout de même que le rite du sapin de Noël ne concerne, en fin de compte, qu’une minorité. 75 % des foyers n’en sont d’ailleurs pas équipés. Et avec les temps qui courent, beaucoup de Français seront sans doute tentés de se passer d’une telle dépense.
Ce sont souvent les familles avec des enfants qui perpétuent cette tradition. Et on ne peut pas leur en vouloir d’essayer de faire rêver leurs progénitures avec un peu de magie de Noël. Pour autant, comme nous l’avons vu, plusieurs alternatives existent. En tout état de cause, on peut même se demander si offrir une conscience écologique à nos descendants ne demeure pas le plus beau cadeau que l’on puisse leur faire.
– Simon Verdière
Photo de couverture : Photo de Jonathan Borba sur Unsplash / Photo de Sharad Bhat sur Pexels – Montage Mr Mondialisation