Le photographe Won Kim nous plonge dans un lieu discret de Tokyo où de jeunes gens habitent dans des « boites » de quelques mètres carrés.
À Tokyo, un touriste occidental doit oublier ses notions traditionnelles des espaces. Avec un coût du logement pratiquement le plus élevé au monde, les Tokyoïtes vont tenter d’exploiter les moindres espaces libres. Cette réalité va notamment donner naissance à une curiosité touristique : les hôtels à capsules, ces tubes-lits qui servent le plus souvent à offrir un abri aux travailleurs trop fatigués pour rentrer chez eux après une lourde journée de labeur. Malgré son étroitesse, une nuit dans ce type de « chambre » coute tout de même entre 15 et 30 euros.
Mais, récemment, une alternative de plus longue durée va voir le jour dans le Nord-Est de Tokyo. Pratiquement caché dans un immeuble à bureaux, un « étage » entier propose de loger des personnes dans des boites rudimentaires, sans pratiquement aucune finition ni confort. Si l’image peut-être plus courantes dans certaines grandes villes de Chine comme Shanghai ou Hong Kong, c’est une vision beaucoup moins habituelle au Japon.
Won Kim, un photographe américain, va prendre résidence dans un de ces « hôtels » à capsule peu ordinaire. Alors qu’un simple rideau et une fine parois de contreplaqué séparent les chambres, il y est impossible de s’y mettre debout. Le photographe va alors sympathiser avec ses habitants entassés les uns sur les autres, dont certains sont des touristes de passage alors que d’autres y vivent à l’année. Avec l’accord des résidents, il va capturer ces espaces de vie étonnants et nous les restituer sous le projet photographique « Enclosed : Living Small ».
Le spectacle de ces personnes vivant dans leurs minuscules chambres est autant interpellant que symbolique de la problématique du logement à Tokyo. « […] Aucun de ces espaces ne permet de se tenir debout. Séparé seulement par des plaques de contreplaqué, sans porte ni fenêtre, avec un rideau pour porte d’entrée. […] ». Car il faut bien noter que la plupart des personnes sur ces photos ne sont pas la simplement « de passage ». Ils résident ici sur une longue période et ont un travail, une vie sociale et des activités comme tout Tokyoïte.
Si le résultat du travail photographique de Won Kim est poignant, le regard porté par l’œil étranger peut être culturellement biaisé. En effet, si ces images peuvent nous inspirer l’aliénation et la misère, ce n’est pas nécessairement le cas pour ceux qui y vivent. Si on imagine que tous aspirent à de plus grands espaces, ce choix est pour certains le moyen de conserver leurs revenus pour une utilisation alternative, future ou pour subvenir aux besoins de leur famille vivant parfois loin d’un centre urbain. Beaucoup de jeunes japonais quittent leur campagne ou petite ville pour venir chercher du travail à Tokyo au profit de leur foyer. Un sacrifice qu’on leur souhaite cependant temporaire, car vivre dans un si petit espace doit avoir un impact à long terme sur la santé mentale et physique des personnes. En ce qui concerne les étrangers de passage, c’est également un moyen « pas cher » de séjourner à Tokyo sans les complications d’une location.
Collectionnant différent prix lors d’expositions de ses travaux, Won Kim a vu son travail de nombreuses fois publié dans des magazines prestigieux tel que « iGNANT » en Allemagne ou encore « DesignTaxi » aux Etats-Unis. De l’abstrait de la ville en passant par la déconstruction des stéréotypes, Won Kim dénonce et met en lumière des sujets souvent auréolés d’une certaine obscurité. Ses travaux sont à découvrir sur son site.
Sources : mymodernmet.com / boredpanda.com / wonkimphotography.com