Réduire le recours aux sacs plastiques en encourageant l’usage (et même en encadrant sa fabrication) de sacs de tissu durables et issus du recyclage : voilà l’ambition des fondatrices de la branche belge du mouvement Zero Waste. Dans un pays déjà très actif en matière de recyclage, cette initiative ingénieuse et conviviale a retenu notre attention. Interview.
En 2015, Alisson Duprez lance un appel pour donner vie et forme à son idée : recycler de vieux tissus pour confectionner des sacs utilisables au quotidien afin de se dispenser des sachets plastiques. Une manière citoyenne et concrète de répondre à l’inertie des pouvoirs publics en matière d’interdiction des sacs plastiques. Très vite, une équipe est formée, et l’association sans but lucratif (ASBL) Zero Waste Belgium est créée, rejoignant ainsi le mouvement international Zero Waste, qui a de nombreuses branches en Europe.
En Belgique, la conscience environnementale est relativement développée : l’Agence européenne pour l’environnement révélait en 2013 que, pour l’année 2010, l’Autriche, l’Allemagne et la Belgique étaient les pays du continent ayant recyclé la plus grande proportion de leurs déchets. Pour l’année 2013, la Belgique figurait en quatrième position européenne des pays ayant le plus recyclé et composté, derrière l’Allemagne, la Slovénie et l’Autriche, d’après Eurostat. De fait, l’association a cherché à réunir les diverses démarches déjà existantes et à les répertorier, afin de former « une communauté où se partagent le savoir et le savoir-faire ».
L’association se concentre ainsi sur « deux types de déchets récurrents : le déchet des textiles usagés qui sont rarement réutilisés et le déchet des sacs en plastique ». Elle organise des ateliers de couture où quiconque peut réaliser ses sacs personnalisés, encadré par les membres de l’association, qui mettent à disposition un stock de tissus, machines et professionnels. Par ailleurs, elle compte fabriquer des sacs destinés à être commercialisés pour encourager la démarche en dehors de ses lignes. Dans les deux cas, l’objectif est l’usage quotidien de sacs destinés à se substituer à ceux en plastique des grandes surfaces.
Nous avons interrogé des membres de l’association pour en savoir plus.
Pouvez-vous nous décrire le projet Zero Waste Belgium, son origine et ses ambitions ?
Zero Waste Belgium est une association belge en devenir, qui a pour but de rassembler toutes les initiatives qui promeuvent la réduction des déchets. Son origine vient de la rencontre, il y a quelques mois, de plusieurs personnes concernées par cette problématique. C’est parti d’une petite annonce Facebook lancée par une personne qui cherchait à former une équipe motivée par ce projet. Le petit noyau de départ ainsi formé a très vite été rejoint par, comme on les appelle entre nous, les « Zero Waste Heroes », ou en d’autres mots, ceux qui n’ont plus besoin de poubelle chez eux. Nos ambitions sont, d’une part, de proposer des solutions concrètes aux personnes déjà sensibilisées à la réduction des déchets et, d’autre part, de sensibiliser le grand public à cette problématique.
Vous défendez visiblement des valeurs fortes, quelles sont-elles ?
Évidemment, la protection et le respect de l’environnement, de notre planète est une valeur forte pour nous, car nous sommes tout simplement en train d’épuiser les ressources de la terre. Une autre valeur qui nous rassemble est la simplification de nos modes de vies, qui ont été complexifiés par la société de surconsommation.
Vous répondez aux problématiques des citoyens en matière d’écologie. Avez-vous un exemple concret à nous témoigner ?
Nous proposons en effet des « Waste Free Tour » aux Bruxellois pour leur faire découvrir des endroits qui proposent des solutions pour réduire leurs déchets. Ces solutions sont, par exemple, la vente en vrac (qui d’ailleurs se répand à notre plus grand bonheur en Belgique), mais également des endroits qui proposent des objets réutilisables pour éviter le jetable (bocaux, sacs/cabas en tissus, couches lavables, disques démaquillants lavables…) ou des endroits où les objets peuvent être réparés. Enfin, nous abordons également la vente de seconde main, les systèmes de location et les différentes manières de composter.
Vous allez donc encore plus loin en parlant d’actions concrètes, quelles sont-elles ?
Une de nos actions concrètes est « The Taste of No Waste », dont le principe est de donner une seconde vie à des tissus qui seraient voués à être jetés ou qui dorment dans nos placards. Nous transformons ces tissus en « sac à vrac » afin d’éviter les petits sacs en papier et plastique qui sont encore malheureusement disponibles dans la plupart des magasins proposant du vrac. Ces sacs sont créés soit par des bénévoles soit via des ateliers de couture accessibles à toute personne qui souhaite confectionner et personnaliser ses propres sacs à vrac.
Nous aussi chez Mr Mondialisation nous avons le goût du « zéro déchet ». Avez-vous un conseil à donner en la matière ?
Alors, le zéro déchet, c’est d’abord : REFUSER. On reçoit beaucoup trop d’objets de type publicitaire ou des gadgets qui encombrent nos appartements et qui souvent finissent dans la poubelle lors du grand nettoyage de printemps. Vivre sans déchet, c’est refuser ce dont on n’a pas vraiment besoin. Ce qui nous mène à un deuxième conseil : RÉDUIRE. Moins on possède d’objets, plus la vie est simple et on se rend vite compte qu’on n’a pas besoin d’autant de choses que la publicité essaie de nous faire croire. Le troisième conseil, c’est RÉUTILISER, privilégier les objets réutilisables ou lavables par rapport aux objets jetables (gourde, lunch box, serviette de table en tissu…). Ensuite, si les trois premiers conseils n’ont pas suffi à prévenir un déchet, le RECYCLER. Ce doit être le dernier recours, car bien que le recyclage soit une meilleure solution que la décharge ou l’incinération, ça reste un énorme coût écologique, le meilleur déchet est celui qui n’existe pas ! Dans la même idée, notre dernier conseil est de COMPOSTER les déchets organiques qui représentent en moyenne 30% des déchets des poubelles ménagères et permettent, bien entendu, de créer un puissant fertilisant.
Globalement, comment les lecteurs et curieux peuvent vous aider aujourd’hui ?
Ils peuvent bien sûr nous aider en réduisant leurs déchets et en partageant leur démarche autour d’eux. Il faut montrer que diminuer ses déchets est possible et accessible à tous ! Pour nous aider de manière plus concrète, ils peuvent aussi se joindre à la super équipe de Zero Waste Belgium (ou équivalant français). Nous sommes un petit groupe très motivé, nous avons beaucoup d’idées mais nous manquons de personnes pour mettre en place tous nos projets. Nos activités étant larges et variées, chacun peut trouver sa place et le rôle qui lui convient pour se rendre utile. Évidemment, nous sommes très ouverts et l’aide peut aller dans les deux sens. Nous sommes toujours très contents d’accueillir et de soutenir des personnes nous rejoignant avec de nouvelles idées plein la tête.
Auriez-vous un message libre à faire passer aux militants du monde entier ?
« Sois le changement que tu veux voir dans le monde », Gandhi.
Clair, concis et juste, on ne pourra certainement pas les contredire !
Sources : Facebook Zero Waste Belgium / GreenPaper.be / Zero Waste / Zero Waste Europe / Agence européenne de l’Environnement / Eurostat