Une nouvelle étude révèle la présence de dizaines de micro et nanoplastiques dans les bouteilles de Coca-Cola. Publiée par Agir pour l’environnement le 22 août dernier, le rapport relève un véritable « problème de transparence dans la composition des produits », alors que plus de 120 milliards de bouteilles sont commercialisées chaque année dans le monde par la multinationale.

Une boisson « au goût inimitable », voici la promesse marketing familière de l’enseigne de soda le plus vendu au monde. Chaque seconde à travers le globe, ce sont environ 17 360 bouteilles de Coca-Cola qui sont écoulées, soit 1,5 milliard de bouteilles par jour et 547,5 milliards par an !

Les 120 milliards de bouteilles commercialisées chaque année par Coca-Cola font de cette entreprise l’un des tous premiers acteurs responsables de la pollution plastique au monde

La face cachée de Coca-Cola

Derrière le succès de la boisson pétillante aux reflets ambrés se cachent pourtant bien des dérives. Entre une pollution plastique faramineuse, effets sanitaires désastreux et évasion fiscale record, les pratiques de la compagnie américaine ont été dénoncées par différents organismes de santé publique et des associations environnementales à de multiples reprises.

Le 22 août dernier, c’est Agir pour l’environnement, une organisation française de mobilisation citoyenne, qui publie une enquête révélant une contamination plastique alarmante du breuvage. Collaborant avec deux laboratoires spécialisés pour mener ces analyses, l’association a souhaité « s’approcher au plus près des conditions réelles d’utilisation en procédant à des analyses de micro et nanoparticules à la suite de l’ouverture de deux sodas à une, dix et vingt reprises ».

En effet, une bouteille d’un litre à un litre et demi est rarement consommée en une seule ouverture. « À domicile, 1 litre de soda peut être bu en 4 à 5 fois s’il est consommé pur, plus s’il est mélangé avec beaucoup de glaçons ou à une autre boisson », explique l’organisation.  « À l’extérieur du domicile, la consommation d’un litre de soda peut se faire en plus petits volumes, parfois une gorgée à la fois directement au goulot, et donc implique un grand nombre d’ouvertures et fermetures du bouchon ».

Des composants cachés aux consommateurs

Afin de tenir compte de ces éléments, les bouteilles analysées ont été ouvertes à de nombreuses reprises : 1, 10 et 20 fois avant l’analyse des microparticules présentes dans le soda qu’elles contiennent.

Première surprise : au total, six sortes de plastiques différents ont été identifiés dont du polyéthylène (PE), du polyéthylène téréphtalate (PET) et du polychlorure de vinyle (PVC), alors que seuls le PE et le PET figurent sur l’emballage.

« Rien n’indique que ces bouteilles contiennent du polychlorure de vinyle, et à raison, puisque les fabricants de cette boisson ont signé en 2019 le pacte national sur les emballages plastiques, qui entend réduire au maximum le recours à ce polychlorure… Ce PVC n’a rien à faire dans nos résultats »commente pour Libération Stephen Kerckhove, le directeur de l’association.

« En termes de transparence de la composition des produits, on n’y est clairement pas, estime quant à lui Jean-François Ghiglione, directeur de recherche au CNRS et membre actif des négociations sur le traité international contre la pollution plastique, qui n’a pas participé à l’étude. La communication de l’entreprise a toujours été de dire qu’il n’y avait que du PE et du PET ».

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Une contamination alarmante

« le nombre de micro et nano-particules présentes dans le liquide augmente à mesure des ouvertures »

Deuxième surprise pour l’organisation : le nombre de micro et nano-particules présentes dans le liquide augmente à mesure des ouvertures. Finalement, « on dénombre 46 et 93 microparticules de plastique respectivement dans une bouteille d’un litre de Coca et d’un litre et demi de Schweppes après une vingtaine d’ouvertures », alors que seulement 4 molécules sont retrouvées en moyenne après une unique ouverture et 28 après 10 manipulations.

Ces résultats suggèrent une instabilité moléculaire de la bouteille en plastique qui semble se fragmenter rapidement sous l’effet d’une ouverture/fermeture du bouchon.

Pour Magali Leroy, chargée des enquêtes et analyses au sein de l’association Agir pour l’Environnement, « la présence de micro et nanoplastiques et la variété des plastiques identifiés interrogent la compagnie Coca-Cola ainsi que les autorités sanitaires hexagonales qui doivent garantir aux consommateurs un contenant inerte ne les exposant pas à des molécules dont l’impact sanitaire ne peut être écarté ». L’association n’a d’ailleurs pas manqué d’alerter la Direction générale de la santé et l’Anses, l’agence nationale de sécurité sanitaire.

Des risques sanitaires à craindre…

Au-delà du manque de conformité aux réglementations en vigueur, les risques pour la santé des consommateurs sont bien réels selon l’association, même si à ce jour il n’existe pas encore de consensus scientifique sur les effets néfastes de l’ingestion de microplastiques pour l’être humain.

Pour autant, il est aujourd’hui démontré qu’une fois ingérées, les micro et nanoparticules franchissent la muqueuse intestinale où elles peuvent être internalisées par les cellules ou entrer dans le système circulatoire sanguin et lymphatique avant d’être déposées dans d’autres organes.

« L’internalisation et l’accumulation de microparticules dans le corps humain posent donc des risques significatifs pour la santé qui sont encore mal connus. Cependant, un certain nombre d’études scientifiques montrent un impact négatif des microparticules de plastiques chez des animaux marins, chez des mammifères et dans des lignées cellulaires humaines », rapportent les auteurs du rapport.

Si le groupe Coca-Cola se défend en faisant planer le doute sur les impacts sanitaires des microplastiques, la marque Schweppes, estime quant à elle que la totalité des emballages qu’elle met sur le marché, dont les matériaux plastiques en PET, « répond aux exigences strictes de qualité de grade alimentaire fixées par les autorités sanitaires françaises et européennes ».

Concernant les microplastiques, « s’ils s’avéraient présents dans nos produits, ils ne sont pas intentionnellement incorporés dans nos emballages », assure l’entreprise au Parisien.

…Et une pollution majeure des environnements

Des excuses bien insuffisantes au regard de la pollution plastique majeure répandue dans le monde par les marques de boissons sucrées. Rien qu’en France, « ce sont 950 millions de bouteilles de la marque qui sont vendues chaque année, dont à peine 44% sont recyclées », estime Agir pour l’environnement. Chaque minute, plus de 1 000 bouteilles sont ainsi incinérées ou abandonnées dans la nature, finissant souvent leur course dans un sous-bois, le long des routes ou au fond des océans.

A mesure qu’elles se décomposent, la persistance et la bioaccumulation des microparticules de plastique accroit leur présence dans les écosystèmes et les chaines alimentaires marines et terrestres, « et sont particulièrement inquiétants de par leur potentiel toxique et leur capacité à être vecteur de pathogènes et de polluants », regrette l’association.

– L.A.


Image d’entête @Mayara Klingner/Pexels

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