Bees Coop, le premier supermarché à but non lucratif, coopératif et participatif de Belgique propose des produits variés, de qualité et à bas prix, dans le respect de l’environnement et de l’humain. Comme quoi, tout est possible. Sa singularité ? Les consommateurs sont coopérateurs, une organisation décisionnelle horizontale et une structure innovante. Un exemple de projet citoyen qui devrait, on l’espère, bousculer le monde de la grande distribution.
L’idée émerge en septembre 2014 parmi de jeunes citoyens, issus principalement du monde associatif. Tirant le constat que la grande distribution et le secteur agroalimentaire industriel ont des effets négatifs importants sur l’environnement (déchets, non respect des normes écologiques) et sur l’humain (pressions sur les fournisseurs, diktat des prix, organisation proche du fordisme), ils se décident à élaborer une alternative qui puisse offrir une large gamme de produits tout en conservant des valeurs fortes et à taille humaine. Impossible ?
Première étape : ils créent un groupe d’achat ouvert aujourd’hui à plus de 180 ménages. Cela permet à la jeune coopérative de tester les produits, d’établir un premier contact avec des producteurs et de se former au métier de distributeur. Mais le plus important est l’initiation au modèle, encore nouveau en Belgique, d’un travail coopératif et participatif à l’échelle du supermarché.
Des consommateurs à la fois propriétaires et travailleurs
Chez Bees Coop, c’est le principe, le consommateur est également travailleur et propriétaire. Pour bénéficier des produits à prix bas à qualité égale, le futur coopérateur doit au moins acquérir une part de la coopérative. Après quoi, il participe directement aux décisions sur l’organisation, la structure et l’orientation du supermarché, mais également sur le choix des producteurs et des produits. En échange, il doit travailler bénévolement au moins trois heures par mois permettant de réduire les coûts de la coopérative et donc les prix. Une forme d’autogestion, car les bénévoles sont également clients et sociétaires. Pour Laurence, membre active à la Bees, « il s’agit d’une véritable opportunité pour les consommateurs de prendre part pleinement au fonctionnement et à l’orientation d’un supermarché. C’est une première en Belgique ».
Toutefois, « l’objectif du supermarché n’est pas d’être plus compétitif que le supermarché Colruyt. On reste très réaliste. Par contre, on trouvera à la Bees des produits de bonne qualité, qui se veulent éthiques, bio et locaux pour la plupart. Le tout à de petits prix ». Et si Bees conserve une gamme large de produits, c’est pour garder tous les avantages d’un supermarché : « aujourd’hui, le consommateur aime trouver la plupart des produits dont il a besoin au même endroit. C’est ce que tente de faire Bees Coop ».
Une des particularités du supermarché est son système d’étiquetage. « Sur l’étiquette du produit, il y aura quatre critères : local/mondial ; circuit court ; équitable ; environnement. Ces critères seront déclinés en trois paliers du meilleur au moins bon ». Néanmoins, la coopérative ne cherche pas à exclure tout ce qui n’est pas bio ou local, car cela reviendrait pour le magasin à se restreindre à une épicerie bio classique. « Le plus important est que les consommateurs aient à disposition toutes les informations nécessaires pour choisir en connaissance de cause. » Tous les outils nécessaires pour devenir un consomm’acteur responsable et moderne.
Une organisation horizontale et innovante
Laurence, qui est issue de la cellule « Gouvernance », nous explique que la Bees est un projet participatif et que tous les membres qui la composent jouent un rôle actif ! « Nous travaillons de manière horizontale. Et tous les coopérateurs possèdent une voix pour la prise de décision lors des assemblées. »
La coopérative est composée d’une assemblée générale qui réunit l’ensemble des coopérateurs, son rôle est de prendre des décisions stratégiques. Ensuite, diverses cellules de travail se répartissent les tâches : approvisionnement, finance, communication, etc., et prennent des décisions opérationnelles. Un comité de coordination se compose des représentants de chaque cellule (les premiers liens) et du conseil d’administration dont les membres sont élus en assemblée générale. Le rôle du comité de coordination est de prendre des décisions tactiques. Enfin, le comité sociétal est un organe de contrôle qui s’assure que la finalité sociale de Bees Coop soit respectée.
Comment devenir coopérateur à Bees Coop ?
Pour être membre de la Bees il est nécessaire d’acquérir au moins quatre parts de la coopérative, chacune coûtant 25€. Toutefois, Laurence explique que l’aspect financier ne doit pas être un problème pour le futur coopérateur : « En principe, pour devenir coopérateur, le membre achète quatre parts de la coopérative. Mais l’aspect financier ne peut empêcher quiconque d’intégrer la Bees ; dès lors il est possible pour une personne de rejoindre le supermarché en achetant une seule part si ses finances ne lui permettent pas d’en acquérir davantage. »
Pour les personnes qui hésitent à rejoindre la coopérative, celles-ci peuvent découvrir le supermarché pendant un mois, sans devoir acquérir des parts dans la coopérative ni participer aux trois heures de travail mensuel. Mais la personne est libre d’acheter les produits proposés par le supermarché et de participer aux réunions.
Bees Coop cherche à être plus qu’un supermarché : un lieu de rencontre et d’échange. Cela se manifeste notamment par la création de cours de cuisine ou encore la mise à disposition d’une salle polyvalente pour, par exemple, l’organisation de ciné-débats.
« Bees coop ? Le supermarché de demain ! »
Le projet de la coopérative s’inscrit dans une économie du changement, en faisant : « le choix de ne pas dégager de dividendes ; c’est un projet à but non lucratif ». Somme toute, l’idée d’un supermarché coopératif et participatif n’est pas neuve. Bees Coop s’inspire de deux projets existants. À New York la Park Slope Food Coop, forte de 18 000 membres de tous horizons sociaux, propose à bas prix des produits locaux de qualité à ses coopérateurs depuis 1973. À Paris, La Louve ouvrira bientôt ses portes. Ce nouveau supermarché enregistre déjà plus de 2000 coopérateurs dans ses rangs. Ces deux coopératives ont en commun de favoriser les produits frais, d’éviter le gaspillage et de proposer du vrac autant que possible. Autant d’aspects qui permettent de diminuer à la fois les frais et l’impact écologique.
De notre côté, on se dit que Bees Coop est un très bon exemple de projet de société, réaliste, éthique et innovant. Les fondations nécessaires à une telle entreprise ? Avoir le goût de l’engagement, de l’enthousiasme, de la créativité et une pointe d’audace. Mais aussi un petit coup de main des internautes. Fin 2015, Bees Coop remportait 22 640 € de dons à travers une campagne de financement participatif. Un premier magasin de 500 m² ouvrira à Schaerbeek prochainement. Un projet convivial qui renforce les liens sociaux, l’autonomie du citoyen et qui élargit le champ des possibles par l’action personnelle et collective. Une action citoyenne qui prend tout son sens dans une société du changement. Et surtout, un moyen concret et non capitaliste de lutter contre l’industrie agroalimentaire et la grande distribution tout en favorisant les producteurs locaux et la transition agricole.
Sources : Bees-Coop.be / Foodcoop/ LaLouve.net