Dans son dernier documentaire, Romuald Vuillemin transmet les témoignages personnels des femmes et des hommes habituellement uniformément désignés sous l’appellation « réfugiés ». En rapportant leurs paroles, le réalisateur nous rappelle dans « De quelles couleurs sommes-nous faits ? » à la fois le destin unique de chacun d’entre eux, mais aussi leur singularité en tant qu’être humain à l’heure où les jugements et les généralités vont bon train.
Des paysages de banlieue qui défilent et une voix qui récite les témoignages de Sidi, Naby, Abou, Efe, rescapés d’un long périple qui les a mené jusqu’en France. Certains s’expriment de manière anonyme, d’autres racontent face à la caméra. Sous une forme expérimentale, Romuald Vuillemin nous plonge au milieu d’histoires oubliées, parfois même volontairement rejetées, alors que l’Union européenne a décidé ces derniers mois de durcir les contrôles à ses frontières, au mépris des vies humaines et des multiples noyés de la Méditerranée. Dans le même temps, les poursuites judiciaires à l’encontre des bénévoles et des associations qui tentent de leur venir en aide se sont durcies et multipliées. À contre-courant, le réalisateur veut « faire exister » ces personnes à travers leurs mots et leurs visages.
Le documentariste, ex-journaliste, s’intéresse dans son travail « aux populations en marge auxquelles on ne prête que peu d’attention. » Celles qu’on instrumentalisent volontiers pour quelques desseins politiques ou économiques. Pour réaliser « De quelles couleurs sommes-nous fait ? », il traverse actuellement la France des squats et des centres d’accueil entre Paris et Toulouse. Il entend ainsi proposer « un travail de recueil de témoignages sur ce que vivent au quotidien les personnes en demande d’asile en France », mais aussi des clés pour comprendre leur quotidien et ce qui les a menés jusqu’à l’Hexagone.
À travers ces histoires uniques, le réalisateur tente d’apporter des réponses à des questions souvent oubliées des débats publics :« Que reste-t-il du voyage entrepris jusqu’à nos rives occidentales ? Que reste-t-il des espoirs du départ ? Qui sont ces gens, invisibles quand ils n’ont pas de papiers, qui rêvent d’un autre possible ? ». Romuald Vuillemin, donne une voix aux invisibles, ils racontent leurs peines, les espoirs, mais aussi leur passé : ce qu’ils et elles sont.
« On empêchera jamais quelqu’un de partir de chez lui »
« On donne souvent la parole aux associations et aux professionnelles qui représentent les demandeurs d’asile, mais rarement à eux directement », observe le réalisateur. Afin de rétablir un peu la balance, « il me semblait important de porter un regard différent sur ces personnes, alors l’Europe et la France tentent de criminaliser les réfugiés », nous explique-t-il. Auprès des personnes rencontrées, Romuald Vuillemin nous confie avoir observé « l’énorme entraide, un désir d’ouverture et un désir d’intégration ». À l’opposé des idées reçues et des clichés, il défend que « l’essentiel de ces personnes ne voulaient pas partir, mais qu’elles y ont été contraintes en raison de la situation dans leur pays.
L’écoute de ces témoignages, à la fois émouvants et percutants, met en lumière les trajectoires très diverses des personnes qui ont tout quitté, pour fuir la guerre et les persécutions ou dans l’espoir de poursuivre une vie meilleure. Ce travail de longue haleine se terminera fin 2020. Pour soutenir la réalisation du documentaire, rendez-vous sur la campagne de financement participatif : proarti.fr.
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