L’huile de coco est devenue en quelques années la star en cuisine et des produits de beauté alternatifs. Mais ce produit dont les conditions de production sont sujettes à caution serait même l’un de pires aliments que l’on puisse manger… Décryptage

L’huile de coco est particulièrement populaire parmi les défenseurs d’une alimentation saine et équilibrée. Avec les scandales à répétitions de l’huile de palme, le produit a envahi l’espace des produits alternatifs souvent même industriels.

Son image « cool », « tendance » et « écolo » lui a rapidement permis de se faire une place rapidement dans les trousses de toilette et les cuisines. Une évolution rapide qui s’est faite sans prendre suffisamment du recul sur les conditions de production et de distribution de cette huile « miracle », ni sur ses conséquences à long terme sur la santé.

État scientifique des lieux

Désormais, des voix s’élèvent pour freiner l’engouement. Karin Michels, directrice de l’Institut de prévention et d’épidémiologie des tumeurs de l’Université de Fribourg-en-Brisgau (Allemagne) et professeure à l’Université de Santé publique à Harvard s’est faite connaître pour ses mises en garde. Elle accuse le « super-aliment » d’être « un des pires aliments que l’on puisse manger ».

La scientifique s’inquiète non seulement de l’absence de preuves scientifiques solides quant aux supposés bienfaits de l’huile de coco, mais aussi de la composition du produit qui contient presque exclusivement des acides gras saturés et qui ont la réputation de boucher progressivement les artères coronaires. À titre de comparaison, l’huile de coco contient 89 % d’acides gras saturés, alors que le beurre en contiendrait 62 % et le lard 43 %. En 2017, l’Association américaine du Cœur mettait elle aussi en garde dans une publication officielle contre l’ingestion d’aliments contenant une proportion importante d’acides gras saturés, dont l’huile de coco.

Huile de coco : fin du mythe d’un produit à la mode ? Flickr.

Les résultats d’une recherche datant de 2018 et publiée dans l’American Journal of Clinical Nutrition montrent que les personnes consommant quotidiennement des produits laitiers riches en acides gras saturés n’avaient pas de risque significativement plus élevé de décès par attaque cardiaque ou AVC en comparaison avec les personnes n’en consommant pas. Mais l’étude ne cible pas spécifiquement l’huile de coco. Une seconde étude de 2017, menée sur 135 000 participants dans 18 pays et publiée dans la revue Lancet, établit pour sa part un lien entre une plus grande consommation d’acides gras et une réduction du risque de décès par maladies cardiaques.


Gratuit, sans subvention et indépendant depuis 10 ans, nous avons besoin de vous pour continuer ce travail en 2024. Sens-toi libre d’activer un abonnement volontaire sur ce lien en offrant un thé à l’équipe. Merci infiniment.


Pour expliquer ces résultats, les chercheurs avancent que l’huile de coco serait capable d’augmenter l’activité des cellules pour assimiler les aliments, et donc élèverait la dépense d’énergie. Ce phénomène, la thermogenèse, est aussi provoqué par les protéines, mais l’huile de coco serait l’aliment qui ferait brûler le plus de calories. Mais là encore, les études et les preuves scientifiques manquent. Jusqu’à présent, l’Organisation mondiale de la Santé conseille de consommer modérément l’huile de coco et tous les autres produits riches en acides gras saturés. Les médecins nutritionnistes proposent le plus souvent comme alternative les huiles d’olive ou de colza.

Ni éthique, ni végane, ni écolo ?

Les interrogations à propos des bienfaits de l’huile de coco rappellent les autres polémiques autour de ce produit. En effet, l’huile de coco illustre parfaitement les problématiques éthiques et écologiques liées aux produits d’importation. Ainsi 40 à 60 % des 3,5 millions de producteurs de noix de coco aux Philippines – pays dont provient l’essentiel de la production – vivent dans l’extrême pauvreté.

- Pour une information libre ! -Soutenir Mr Japanization sur Tipeee
Photographie : Boisvieux / Corbis

Par ailleurs, pour suivre la demande croissante du monde occidental, certaines plantations d’Asie du Sud-Est se sont mises à exploiter des singes pour récolter les précieux fruits. Les bébés singes sont arrachés à leur mère puis enchaînés, battus, pour les rendre obéissants et améliorer leur productivité pour la récolte des noix de coco. Enfin, la forte demande d’huile de coco pousse à la monoculture, la déforestation et l’utilisation de fertilisants et de pesticides polluants. Des éléments qui incitent, une nouvelle fois, à la prudence et à la modération.

– Mr Mondialisation


Photo de couverture : Michal Bocek / Flickr

- Cet article gratuit et indépendant existe grâce à vous -
Donation