Ce 19 janvier 2015, Oxfam publie son dernier rapport sur la répartition des richesses dans le monde. Sans surprise, les 1% s’accaparent une part toujours plus grande des richesses par rapport aux années précédentes. Les chiffres qui donnent le tournis font voler en éclat quelques certitudes. Voici notre sélection de 6 chiffres clés de l’étude dont on peut tirer un enseignement.
Le rapport consultable gratuitement en ligne révèle une fois encore l’ampleur des inégalités dans le monde. Sur la base des données fournies par le Crédit Suisse, l’ONG tire quelques chiffres et conclusions qui font froid dans le dos.
1. La « moitié de la terre » appartiendra sous peu au 1%
Comme si la crise avait profité aux plus fortunés, on constate dans l’étude d’Oxfam que 2008 fut une année charnière. Alors que la part des richesses semblait augmenter au profit des 99%, tout bascule après 2008 en faveur des 1%. Très précisément, ce sont 48% des richesses qui sont détenues par les 1%, laissant 52% aux moins riches. La courbe semble indiquer que la tendance pourrait aller en s’accentuant. D’ici deux ans, les 1% les plus riches vont cumuler à eux seuls plus de richesses que 99% de la population.
2. Les 52% restants bénéficient aux 99%, mais pas vraiment…
On pourrait croire que les 99% se partagent le pactole des 52% des richesses restantes. C’est loin d’être aussi évident. En réalité, seulement 20% du monde restant (les plus riches de la planète exceptés les 1%) se partagent les 52% de la richesse, celle n’appartenant pas aux 1%… Donc, si on oublie un instant les 1% milliardaires, 20% du monde profite de la quasi totalité des richesses disponibles. Si vous faites partie de la classe moyenne occidentale, vous êtes probablement dans cette catégorie des 20%. Ce qui signifie que les 80% de la population, soit la majorité, doit aujourd’hui vivre sur les restes d’autres restes…
3. 80 % de la population mondiale se partage 5,5 % des richesses
Si on enlève les 1% des plus riches et les 20% « moins riches » , il ne reste que 5,5% des richesses à partager entre 80% de la population. En d’autres termes, la majorité actuelle du monde doit se contenter des miettes. Derrière des chiffres impressionnants, ceci peut se caractériser dans les faits soit par un manque d’accès à des ressources, soit par la misère, la maladie, la famine ou la mort.
Les critiques diront qu’il suffit que ces 80% se développent à leur tour sans nécessairement s’accaparer les richesses des plus riches. Cependant, le partage des ressources dans un espace limité qu’est la terre ne donne pas vraiment raison à cette hypothèse. Si le développement doit effectivement se dérouler dans une mesure juste, ceci ne suffira pas pour justifier un équilibre de la répartition des richesses, donc de l’accès aux ressources.
Notons que seulement 80 personnes se partagent 1 900 milliards de dollars en 2014, soit 600 milliards de plus en 4 ans, alors que 3,5 milliards de personnes les moins riches doivent se partager les mêmes richesses que ces 80 personnes extrêmement fortunées.
4. Les riches encore plus riches, les pauvres toujours plus pauvres
On vous a probablement répété l’idée que l’augmentation des richesses est profitable à tous ? C’est peut-être vrai dans une certaine mesure, localement, avec un système de partage efficace. Mais à l’échelle mondiale, où la finance et un capitalisme de connivences règnent, rien ne semble plus faux depuis la crise. Ainsi, l’étude constate que dans la période où le patrimoine des plus riches explose de manière démesurée, celui des moins riches a fortement diminué, jusqu’à un croisement de courbes. Fin de la « théorie du ruissellement ».
5. 30% des milliardaires sont américains. 90% sont des hommes.
La caricature serait-elle proche de la réalité ? L’étude révèle également que la richesse est très injustement répartie surtout de manière géographique et sexuelle. La richesse a une forte tendance à se concentrer dans les pays occidentaux et dans les mains de la gente masculine. L’argent étant directement lié au pouvoir, on vous laisse tirer les conclusions que vous voudrez quant à l’égalité des sexes toute relative, chez les petits comme chez « les grands » de ce monde.
6. Ces milliardaires investissent dans le lobbying pour manipuler les règles.
Face à ces chiffres impressionnants, la tolérance voudrait qu’on puisse au pire se réjouir de la réussite d’une poignée d’individu, au mieux détourner le regard. Mais ces richesses ne sont pas simplement des chiffres stockés dans des ordinateurs. Ils ont le pouvoir de modeler le monde à travers le lobbying.
Qu’est-ce que ceci indique ? Que les intérêts particuliers d’une poignée d’individus font obstacle à un monde plus juste. En effet, pour préserver leur pouvoir, ces 1% ont tout intérêt à investir dans des outils légaux comme des lobbies dont la puissance n’est plus à démontrer. Rien qu’à Bruxelles, c’est près de 5 kilomètres carrés de bâtiments qui sont consacrés au lobbying. Ceci apparait comme étant un obstacle majeur au développement d’une société sereine et tout aussi grave encore, à la préservation de l’environnement et donc de notre capacité à survivre ensemble sur terre. Rappelons enfin que ceci se déroule alors que 4 des 9 limites planétaires sont déjà franchies si on en croit les dernières études publiées dans Science ce début 2015.
Voici la (petite) bonne nouvelle !
La « bonne nouvelle » si on en croit Oxfam, c’est que l’Humanité baigne dans la richesse. Il y a largement assez pour tous. Concrètement, Oxfam indique 9 solutions pour endiguer cet accaparement de la richesse mondiale produite par tous et chacun. Parmi ces solutions : des services publics 100% gratuits et un revenu de base universel ! Notons également qu’en 20 ans, le nombre d’affamés est passé de 24% à 14% de la population mondiale. L’extrême pauvreté recule, mais beaucoup trop lentement alors qu’une pauvreté « normale » semble se maintenir… Mobilisons-nous !
Source : rapport Oxfam 2015