MagiCJacK Origins : une fiction sur le vrai visage de l’espèce humaine

Cela fait déjà plus de 10 ans que le réalisateur Maxime Ginolin nous conte les aventures de MagiCJacK, l’extraterrestre polymorphe qu’il a inventé et incarne. Une créature touche-à-tout dont les origines commencent à nous être dévoilées dans une nouvelle fiction : « MagiCJacK Origins ». Le prélude de la série accompagné d’un crowdfunding nécessaire à sa production a été lancé le 16 avril dernier. À cette occasion cruciale pour l’avenir du personnage, nous avons pu échanger avec son créateur.

Un extraterrestre fasciné par les humains

Cuisinier, créateur de mode, inspecteur de police protecteur des animaux, suppléant du Père Noël, les casquettes de MagiCJacK sont aussi multiples que les sujets qu’il aborde, nous inspirant tour à tour rire, pleurs, colère. Ce qui n’est finalement pas surprenant de la part d’un personnage dont le nom signifie dans sa langue « coquin aux multiples visages ».

Entre deux recettes végétaliennes pour recharger ses batteries, l’extraterrestre enquête sur les souffrances subies par les animaux, étudie l’esprit critique dans la Minute Sapiens, prend le recyclage très au sérieux, travaille au cirque, rend justice… Tant d’activités qui le conduisent à aller s’épancher auprès d’un psy.

Mais le rôle essentiel de MagiCJacK qui réunit tous les autres, c’est d’empêcher l’espèce humaine de s’annihiler avec ses comportements autodestructeurs. Le réalisateur Maxime Ginolin le décrit avec ces mots :

« Après avoir parcouru l’univers à la recherche de formes de vie avancées, MagicJack, un extraterrestre polymorphe aux pouvoirs surnaturels, découvre l’espèce humaine qui le fascine et auquel il s’attache. Très inquiet par l’immense capacité d’autodestruction de cette espèce, il va tout faire pour éviter son extinction. »

Maxime Ginolin nous parle de MagiCJacK

À l’image de son personnage phare, Maxime Ginolin multiplie les casquettes complémentaires, étant tour à tour musicien, chanteur, compositeur, acteur, scénariste et réalisateur. Il intègre ses propres musiques à ses courts-métrages qu’il écrit, met en scène, filme tout en étant aussi devant la caméra. Tant dans sa musique (avec son groupe MAX RAGE) que dans ses productions vidéo, Maxime met en avant son engagement pour le droit animal. Il a ainsi réalisé des documentaires sur le trafic d’espèces protégés en Afrique et on lui doit en 2013 la première fiction française sur le massacre animal, Le Jugement, sous-titré en plusieurs langues et même doublée en anglais. Plus récemment, en 2019, il a réalisé le film Grosse inspiré d’histoires vraies pour dénoncer la grossophobie.

Outre ses projets personnels, il a aussi prêté sa voix au documentaire Earthlings (Terriens) de Shaun Monson, et fait des apparitions dans des courts-métrages comme Phone Addict. Maxime Ginolin s’investit ainsi toujours dans des projets engagés.

Photographie : @Elie Lahoud-Pinot

Né en 1988 d’un père français et d’une mère italienne, Maxime Ginolin a passé son enfance en Afrique. Une période qui a été déterminante pour son orientation artistique et militante, comme il nous le raconte.

« Le fait d’avoir grandi en Afrique jusqu’à mes 19 ans m’a fait très tôt prendre conscience de pas mal de sujets, en lien avec la pauvreté, la corruption, la souffrance animale… Tout cela a nourri ma volonté d’allier la réalisation de films avec celle de dénoncer des sujets qui me tiennent à cœur. En l’occurrence, il y a eu des moments qui m’ont fait prendre conscience : j’étais très jeune, vers 7 ans quand j’ai vu l’égorgement d’un animal, ce qui m’a fait remettre en cause pas mal de choses sur la question animale et le système. En fait, j’ai assisté à tellement de violences au sein de notre société, que j’ai compris à quel point il y encore du travail pour faire respecter les droits humains. Tout cela fait que très tôt, j’ai voulu incorporer un propos engagé, de sensibilisation à mes œuvres

Et concernant son choix de devenir réalisateur, il confie : « Dès que j’étais enfant, j’ai su que je voulais faire des films. J’ai baigné dans les films toute ma vie et c’est ce que j’ai toujours voulu faire. Dans mes fictions, j’essaie de faire en sorte de pouvoir parler de sujets qui me sont chers, comme la plupart des réalisateurs d’ailleurs. Tous les réalisateurs essaient d’implémenter leurs valeurs dans leurs films mais c’est vrai que sur la question du droit animal, j’étais un des pionniers en France. « Le Jugement » fut la première fiction française à parler du massacre des animaux et de la sixième extinction de masse. »

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Parmi ses inspirations cinématographiques on retrouve beaucoup de réalisateurs américains comme Paul Verhoeven (Starship Troopers, RocoCop) ; Tim Burton dont le Batman Returns l’a particulièrement marqué ; Stanley Kubrick et son Orange Mécanique ; David Finsher (Seven) ; John Carpenter (The Thing) ; David Cronenberg (Vidéodrome) ; l’oeuvre de Spielberg. Et pour le cinéma européen de citer le français Jean-Marie Poiré et le belge Jaco Van Dormael (Le Huitième Jour). Des influences dont on perçoit les traces dans ses propres réalisations.

Quand nous l’interrogeons sur la naissance de MagiCJacK, Maxime Ginolin explique qu’il « voulai[t] créer un anti-héros qui [lui] convenait. À la fois déjanté, drôle, sombre, dangereux, qui puisse représenter toutes les personnalités humaines possibles. Il y a autant de MagiCJacK qu’il y a de personnalités humaines.» En le définissant comme extra-terrestre polymorphe, il permet à tout le monde de s’y identifier : « Je voulais aussi créer une espèce autre que la nôtre et travailler sur la question de l’anthropocentrisme. L’espèce humaine serait alors jugée par un spectateur extérieur. »

« MagiCJack est un miroir grossissant des aspects les plus beaux mais aussi les plus sombres de l’espèce humaine.» Maxime Ginolin

Raconter les origines de MagiCJacK

Au fil des apparitions de l’extraterrestre, le genre des courts-métrages s’oriente soit vers le comique, le fantastique, l’horrifique, le dramatique, selon le propos développé. Une diversité d’approches qui permet au réalisateur de se diversifier, et au public, de trouver un ton qui lui plait. La série MagiCJacK Origins offre une synthèse de genres, mêlant humour, thriller, fantastique et mystère.

MagiCJacK dans Origins, un air de ‘The Crow’ et un soupçon de ‘The Mask’. Screen du prélude de MagiCJacK Origins

MagiCJacK Origins utilise la fiction pour sensibiliser les spectateurs aux injustices bien réelles de notre société. Le prélude a choisi de mettre en scène un sujet particulièrement grave et encore trop tabou dans les médias : la pédocriminalité qui touche des millions d’enfants dans le monde.

MagiCJacK vient à la rescousse de Danny, un jeune garçon enlevé par un réseau pédocriminel. Aussi dérangeant que puisse être la vision d’un enfant violenté, la brutalité est retranscrite à l’image tout en évitant de tomber dans le voyeurisme et d’en faire l’apologie. MagiCJacK n’est pas le dernier à y recourir copieusement pour délivrer Danny et mettre les pédocriminels hors d’état de nuire. « C’est un réseau fictif évidemment, qui s’inspire de témoignages que j’ai vus dans des documentaires concernant ce type de cérémonies. Je ne désigne personne, c’est une secte inventée car cela reste avant tout une série de fiction avec son univers propre qui aborde de vrais sujets, et pas un documentaire mêlé de fiction.» souligne Maxime Ginolin

Screen du prélude de MagiCJacK Origins

Concernant la multiplicité de son personnage, Maxime Ginolin détaille : « Bien avant le concept de Multiverse de Marvel, j’ai crée un MagiC-Verse où plein de réalités se déroulent au même moment. Dans chacune d’entre elles, un MagiCJacK différent existe, c’est toujours lui, mais dans d’autres réalités. ‘Origins’ est le point d’accroche central de tous les MagiC-Verse. Ce MagiCJacK peut devenir n’importe lequel des MagiCJacK existants. D’où le nom « Origins », parce qu’elle raconte les origines du personnage et parce qu’elle est à l’origine de l’existence de tous les autres. »

Toute l’histoire de MagiCJacK est déjà écrite dans sa tête de son créateur. Reste à la retranscrire à l’écran. Selon les formats, la réalisation d’un court-métrage varie fortement avec au moins deux semaines de travail en équipe. Si un épisode de la Minute Sapiens peut se tourner assez rapidement avec quatre personnes, des réalisations plus complexes (décor, costumes, figurants…) engloutissent bien plus de temps et de moyens. Et ces problématiques sont encore plus accentuées dans MagiCJacK Origins : « Cela a un coût de plusieurs milliers d’euros à chaque fois et représente des mois de travail. On a pu monter à une cinquantaine de personnes pour travailler sur un projet. Pour « Origins », en comptant toute la secte, l’équipe technique, on était bien 25 personnes dessus.»

MagiCJacK déploie ses pouvoirs pour la bonne cause. Screen du prélude de MagiCJacK Origins.

Série ambitieuse, MagiCJacK Origins nécessite d’importants moyens financiers, d’où l’ouverture d’une campagne de crowdfunding. « Sur « Origins », pour l’instant, on a à peine levé 1 250€, on ne sait même pas si on va pouvoir tourner l’épisode suivant. On va faire encore quelques « MagiCJacK » mais ce n’est pas impossible que MagiCJacK s’arrête à la fin de l’année. » Un financement qui peine à décoller malgré une chaîne comptant quasiment 85 000 abonnés : « Les algorithmes ont tout détruit. On fait seulement 5 000 vues sur « Origins » c’est inimaginable pour une chaîne à 85 000 abonnés, sans compter les 68 000 de notre page Facebook. Aujourd’hui Youtube nous bride à mort, on en est quasi sûr. La quasi totalité de notre audience ne sait même plus qu’on fait des vidéos. En conséquence, il y a de très fortes probabilités que cela finisse par s’arrêter. On fait de la fiction et ce genre n’est pas mis en avant par les plateformes de vidéos. Elles veulent du contenu qui se consomme vite et se produise de façon régulière.»

D’où toutes ces chaînes de créateurs de contenus qui doivent sortir plusieurs vidéos par semaine pour plaire à l’algorithme et continuer à exister. « Mais ce ne sont pas des réalisateurs de films et c’est ce qui m’a pénalisé. J’ai essayé de développer du cinéma sur une plateforme qui n’en fait pas. Une vidéo comme « Inspecteur MagiCJacK », c’est cinq mois de travail avec des milliers d’euros d’engagés, évidemment qu’on ne peut pas en sortir trois par semaine. C’est un système qui ne nous est pas adapté, tant mieux pour les vidéastes qui peuvent en vivre. Peut-être que les algos changeront dans quelques années, mais à l’heure actuelle la fiction sur Youtube, c’est devenu très difficile, quasi impossible.»

Si le présent est sombre, Maxime Ginolin envisage un futur plus positif : « On aimerait que nos productions soient diffusées sur une plateforme type Netflix, ce serait l’idéal. La plateforme de court-métrages français CoMÉT diffuse déjà « Grosse » & « Origins ». »

Screen du prélude de MagiCJacK Origins.

Pour que MagiCJacK reste encore quelques temps sur Terre nous réjouir de ses aventures, vous pouvez vous rendre sur la page du financement participatif y soutenir la réalisation du prochain épisode de MagiCJacK Origins.

– S. Barret


Photo de couverture : Screen du prélude de MagiCJacK Origins.

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