La France a t-elle un problème avec la transparence ? Depuis le début du mois d’août, le scandale des œufs contaminés au fipronil secoue l’Europe. Après plusieurs jours, les autorités françaises ont finalement indiqué que plusieurs lots d’œufs contaminés avaient été importés en France et que certains produits transformés étaient concernés. Cette affaire interroge la filière agro-alimentaire dans son ensemble et les contrôles existants : alors que les informations continuent à se faire rares, Foodwatch France, une association de lutte pour les droits des consommateurs, demande « une réponse politique à la hauteur du scandale qui se résume par ces mots : transparence totale, traçabilité, responsabilité des industriels et garantie de la part des autorités. »

L’affaire du fipronil jette une nouvelle fois le discrédit sur la filière alimentaire ainsi que les autorités administratives. Mégane Ghorbani, responsable de campagne pour Foodwatch, constate les errements des responsables « qui savent mais n’informent pas pour le moment les consommateurs en toute transparence sur les aliments contaminés par le fipronil ». Ainsi, jusqu’à présent, seuls les lots dont les œufs ont une teneur en fipronil qui dépasse les normes légales ont été communiqués et retirés du marché français. Par ailleurs, en ce qui concerne les produits transformés vendus en France et contenant des œufs, les premiers résultats ont été relayés au compte goutte, un mois après la première alerte, le 20 juillet dernier.


Un manque criant de transparence

Selon Foodwatch, qui a interpellé le Gouvernement français à plusieurs reprises depuis le début du scandale, la gestion de la crise manque de transparence : « La France a d’abord nié être concernée par le scandale du fipronil, puis elle a minimisé en tentant de rassurer sur l’impact pour la santé d’un produit qui n’aurait jamais dû finir dans nos aliments » analyse ainsi Mégane Ghorbani. Paris a finalement annoncé que près de 250.000 oeufs contaminés au fipronil avaient été mis sur le marché français depuis avril dernier.

Pourtant, Foodwatch estime que le ministère de l’agriculture continue encore à gérer l’affaire de manière opaque, puisque les consommateurs devraient être informés de l’intégralité des produits concernés, y compris ceux qui ne dépassent pas les seuils maximaux en fipronil : « Rappelons que le fipronil est une substance interdite dans les aliments ! Le ministère doit donc communiquer sur l’ensemble des produits contaminés, même faiblement. Les consommateurs doivent disposer des informations sur TOUS les produits : noms, marques, dates et lieux de commercialisation mais aussi taux de contamination. Les consommateurs doivent pouvoir décider en toute connaissance de cause s’ils veulent ou non continuer de manger des aliments contaminés », défend la porte-parole de l’organisme. En Belgique et en France, par exemple, des lots de biscuits « Lotus » ont été (en principe) évacués des rayons des magasins. La teneur en fipronil y dépassait la limite maximale légale de résidus (LMR).

Destruction des œufs contaminés / Source : EPA

Le fipronil, partie émergée de l’iceberg ? 

Le scandale récent éclate alors même que les administrations européennes promettaient de renforcer les contrôles, afin de garantir la protection des consommateurs et empêcher les mauvaises pratiques. « L’affaire du fipronil montre de manière criante que le système de traçabilité européen ne fonctionne pas, quoi qu’on nous ait promis pourtant après le scandale de la viande de cheval », insiste Mégane Ghorbani, qui rappelle qu’une porte-parole de la Direction générale de l’Alimentation a elle même avoué que l’administration était dépassée en indiquant que « c’est une fraude que personne ne pouvait imaginer, de la même façon qu’on ne peut pas imaginer quelle sera la prochaine fraude ».

De surcroît, cet épisode interroge une nouvelle fois la fiabilité des circuits d’approvisionnement alimentaires, depuis les producteurs jusqu’aux distributeurs. Très critique, Foodwatch interpelle : « nous posons la question de la responsabilité des fabricants et distributeurs qui adoptent actuellement la posture de victimes alors qu’ils ont commercialisé des aliments contenant une substance interdite ! Or, il est de leur responsabilité de s’assurer que les produits qu’ils mettent sur le marché n’exposent pas les consommateurs à un risque. » En Belgique, le gouvernement a rapidement proposé de soutenir économiquement les entreprises concernées par la crise des œufs contaminés. Une décision qui ne manquera pas d’étonner…

Rappelons que la contamination des œufs au fipronil n’est pas anodine. En effet, selon l’Agence Fédérale belge pour la sécurité de la chaîne alimentaire (AFSA), le fipronil « est un composant utilisé dans des produits vétérinaires contre les puces, les acariens et les tiques ». Si « l’organisation mondiale de la santé (OMS) classe le fipronil comme étant moyennement toxique pour les humains », sa consommation représente un danger réel pour la santé humaine, puisqu’ « en grandes quantités, il peut causer des dommages hépatiques, au niveau de la thyroïde ou des reins ». Pour cette raison, son utilisation est interdite pour tous les animaux qui entrent dans la chaîne d’alimentation humaine et sa présence dans des œufs est illégale. Les autorités estiment cependant que les doses restent en-deçà des quantités considérées comme nocives, en dépit du fait que le seuil européen de sécurité ait bien été dépassé.

Eggs

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Sources : Propos recueillis par l’équipe de Mr Mondialisation / foodwatch.org

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