Remis le 30 juin dernier, le rapport annuel du Haut Conseil pour le Climat constate une nouvelle fois que « les efforts actuels de la France sont insuffisants » pour permettre d’atténuer le changement climatique et garantir l’atteinte des objectifs de 2030. Pourtant, l’urgence climatique ne cesse de se manifester et des « efforts d’adaptation doivent être rapidement déployés et intégrés » aux politiques régionales et territoriales dans leur ensemble, explique le HCC. Si de son côté l’Union Européenne entend renforcer son ambition en fixant la neutralité carbone du continent à 2050 et une réduction de ses émissions nettes de gaz à effet de serre de 55 % en 2030, la France risque bien d’être à la traine. Et ce n’est pas la nouvelle loi Climat et Résilience qui sauvera la mise.

Le Haut Conseil pour le climat (HCC) se montre une nouvelle fois critique envers l’action politique et climatique du gouvernement français. Dans son troisième rapport annuel paru le 30 juin dernier, l’organisme indépendant mis sur place en 2018 suite à la volonté du Président Emmanuel Macron a déploré l’action insuffisante de la France au vu des trajectoires dessinées lors des Accords de Paris et des objectifs de réduction d’émissions de gaz à effets de serre.

Des « efforts  insuffisants » de l’Etat français

Si les treize experts du HCC – qui comprend des climatologues, des économistes, ou encore des spécialistes de l’agronomie et de la transition énergétique – ont constaté une baisse des émissions de 1,9% en 2019 et de 9,2% en 2020 du fait de la mise à l’arrêt de l’économie par la pandémie de Covid-19 (et non grâce à des changements structurels durables de la société), ils regrettent tout de même le manque d’ambition du gouvernement. « Alors que les conditions climatiques sortent des plages de variabilité climatique naturelle, avec des impacts croissants, les efforts d’adaptation doivent être rapidement déployés et intégrés aux politiques climatiques dans leur ensemble », prévient le HCC.

Et pour cause, plusieurs secteurs doivent encore entamer une vraie transition afin de répondre aux attentes climatiques européennes. Alors que l’UE se montre de plus en plus ambitieuse et entend atteindre la neutralité carbone d’ici à 2050 et une réduction de ses émissions nettes de gaz à effet de serre de 55 % en 2030, la France risque bien de devoir ajuster rapidement ses calendriers et ses efforts au vu de ces nouveaux objectifs, en particulier dans les secteurs des transports et de l’agriculture, peu appuyés par les politiques européennes de décarbonation actuelles.

Les transports, premier secteur émetteur de gaz à effet de serre

Les transports restent ainsi la première source d’émissions de gaz à effet de serre en France mais aussi partout en Europe, et le secteur est par la même occasion le seul en hausse entre 1990 et 2019. C’est notamment la croissance de la demande de transport et l’absence de report modal au bénéfice du rail qui sont les deux principaux facteurs entravant la réduction des émissions des moyens de déplacements actuels.

En ce qui concerne l’agriculture, les réductions d’émissions sont faibles par rapport aux autres secteurs émetteurs et atteignent seulement les  9 % depuis 1990. En outre, les émissions de méthane représentent à eux seuls les deux-tiers des émissions nationales de ce gaz, même s’ils diminuent à la suite de la réduction de la taille du cheptel et de l’utilisation des effluents d’élevage dans des fermenteurs. Le Haut Conseil pour le Climat évalue ainsi le rythme de réduction comme insuffisant à l’aune des objectifs de la Stratégie Nationale Bas Carbone et cela s’explique notamment par la diminution de l’absorption de CO2 des forêts française et des prairies et la poursuite de l’artificialisation des sols.

Et dans cette matière, l’Union européenne ne semble pas tirer ses états membres vers le haut. Le HCC déplore particulièrement la réforme de la Politique agricole commune (PAC),  peu ambitieuse voire carrément rétrograde en matière de lutte contre le changement climatique. L’organisme explique ainsi qu’« en complément des politiques nationales, l’action européenne doit contribuer à pratiquer un stockage de carbone aussi élevé que possible dans les sols agricoles, la biomasse et les forêts, à éviter la déforestation importée, à accélérer la baisse des émissions de méthane résultant de l’élevage et de protoxyde d’azote liées à l’usage des engrais ».

Le secteur agricole n’évolue pas assez vite selon le HCC. – Pixabay

Un plan de relance autour de la transition bas carbone

De façon plus générale, les experts indépendants exhortent le gouvernement français à orienter son futur plan de relance post-crise sanitaire autour de la transition bas carbone, qu’il s’agisse de la rénovation énergétique des bâtiments, de la décarbonation des transports ou de l’évolution de l’agriculture et de l’alimentation« Cette transition écologique est possible, utile et inéluctable », assurent-ils dans les colonnes du Monde. Et pourtant, des quatre principaux secteurs émetteurs − le transport, l’agriculture, le bâtiment et l’industrie − « aucun ne marque de baisse substantielle qui illustrerait une rupture structurelle », conclut finalement le rapport.

Mais le Haut Conseil pour le Climat n’est pas le seul, loin de là, à exhorter la France a agir en faveur de l’environnement. L’édition 2021 du rapport parait ainsi dans un contexte de tensions juridiques et politiques en matière climatique sans précédent. A l’heure de la condamnation de l’Etat français pour « carences fautives » dans la lutte contre le réchauffement climatique avec l‘Affaire du Siècle et de la mobilisation de milliers de personnes pour une loi Climat et Résilience plus ambitieuse, le gouvernement semble plus que jamais acculé de toute part pour agir concrètement et rapidement afin d’initier une transition écologique durable de la société française. Il ne reste plus qu’à voir quand celui-ci décidera de véritablement passer à l’action.

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L.A.

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