L’édition 2019 du Rapport sur les inégalités en France de L’Observatoire des inégalités sera publié en juin prochain. Document vital pour appréhender les inégalités systémiques à la force des faits, il dissèque les injustices sociales qui fragilisent la société française. Anne Brunner, qui codirige la réalisation de ce tableau détaillé, nous explique pourquoi ce travail est essentiel.

À quelques jours de la fin de la campagne de financement participatif ayant pour objet de permettre la publication du Rapport sur les inégalités 2019 (rapport publié tous les deux ans), le premier palier a déjà été atteint, signe que la problématique rencontre un intérêt important. Anne Brunner, qui codirige la rédaction de ce rapport avec Louis Maurin, l’un des deux fondateurs de l’Observatoire des inégalités, espère que les dernières heures de campagne puissent permettre de renforcer encore un peu plus la communauté. « On est très reconnaissant auprès des particuliers qui nous soutiennent, ça nous donne les moyens de travailler, mais aussi une certaine liberté de parole », nous indique-t-elle.

Le sujet est brûlant, à l’image des contestations sociales et politiques qui traversent la France depuis quelques mois, mettant en exergue le sentiment d’injustice ressenti par une bonne part de la population. Le descriptif de la campagne de l’Observatoire des inégalités de s’y trompe d’ailleurs pas : « Les inégalités sont au cœur des tensions sociales, exacerbées par plusieurs années de stagnation du niveau de vie des plus modestes et de politiques favorables aux plus aisés. La menace de la mise en place d’un régime autoritaire, portée par le sentiment d’abandon des couches populaires et d’une partie des classes moyennes est de plus en plus grande. Si nous voulons l’éviter, nous devons lutter pour davantage de justice sociale. Et pour cela, il nous faut un diagnostic solide ».

« Le rôle de l’Observatoire des inégalités est de rendre accessible ces données dans un style généraliste à un public très large », détaille Anne Brunner. L’association créée en 2003 a pour objet de dresser un état des lieux des inégalités dans tous les domaines, essentiellement en France. Il ne s’agit pas seulement de décrypter les disparités de richesses en lien avec les revenus, les salaires et le patrimoine, mais également celles liées à l’éducation, aux conditions de vie, à la participation à la vie politique ou encore au travail. « On complète ces éléments avec des analyses et par un regard venant des différentes sciences sociales, économie, sociologie, science politique ».

Anne Brunner ne souhaite pas commenter les principales conclusions du rapport avant sa publication en juin, mais fait état d’une situation nuancée, marquée par des inégalités qui s’aggravent, d’autres qui se résorbent. « Depuis notre édition précédente, certains indicateurs semblent indiquer un mieux, bien que la tendance négative sur la dizaine d’années qui précède n’est pas rattrapée ». Selon elle, les chiffres du chômage sont en amélioration, et on observerait une stagnation des inégalités de revenus. Anne Brunner reste néanmoins prudente : « il faudra que cette tendance se confirme ». En effet, défend-elle, la question des inégalités est un déterminant de la stabilité de notre société :« Si les inégalités ne sont pas prises en compte, on va vers une société dans laquelle le consentement à l’impôt ainsi que l’adhésion au système démocratique et au système de protection sociale sont en danger ».

Le regard sur les inégalités change

Selon elle, ce que l’on observe en toile de fond des principaux débats de société, c’est que certaines inégalités, qui ne sont pas nouvelles, « deviennent de plus en plus choquantes et inacceptables« . Autrement dit, le regard collectif sur certaines injustices change. C’est par exemple le cas en ce qui concerne les inégalités de salaire entre les hommes et les femmes ou les inégalités à l’école par exemple.

Néanmoins, d’autres inégalités restent moins visibles, alors même qu’elles structurent la société. « Ce qui traverse pour nous la compréhension des inégalités, c’est la question des catégories sociales. C’est notre rôle de le mettre en lumière, car c’est beaucoup moins visible dans la société et moins souvent porté dans le discours », détaille Anne Brunner. Selon elle, certaines inégalités demeurent largement occultées, comme la part très faible d’ouvrier à l’Assemblée nationale. Et pourtant, elles témoignent d’une violence propre à notre organisation sociale.

Pour soutenir la publication du rapport et éventuellement en recevoir une version papier, rendez-vous est donné sur la campagne de financement participatif de l’Observatoire des inégalités.

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