Falling Fruits est une carte interactive et collaborative mondiale qui répertorie les lieux où il est possible de cueillir gratuitement des espèces comestibles. Ce faisant, la carte rend visible ce qui reste caché à bon nombre d’entre nous et invite les individus à cueillir et à manger ces fruits oubliés. Ne se satisfaisant pas d’offrir un outil utile, Ethan Welty, un des fondateurs, espère que Falling Fruits puisse changer notre rapport à la ville et insuffler l’envie de penser le futur des espaces urbains en intégrant de manière accrue la nature.
Avant de devenir un outil collaboratif, Falling Fruits est l’histoire d’une passion pour le glanage et la cueillette sauvage. Ethan Welty, qui a fait partie de l’aventure depuis ses débuts en 2013, a été initié très jeune au glanage et s’est vite passionné pour les plantes comestibles. Élevé en France, il a continué à exercer sa passion une fois arrivé aux États-Unis. En 2012, ses récoltes dans la ville où il réside, Boulders (Colorado), sont tellement importantes qu’en saison il n’a pas besoin d’acheter de fruits…
« – Ça se mange, vraiment ? … – Ben oui, c’est une pomme… »
Fort de son expérience qu’il décrit comme exaltante, le jeune chercheur et photographe a souhaité inspirer d’autres personnes à faire la même chose. Pour cause, « quand on commence à ouvrir les yeux en ville, on s’aperçoit rapidement à quel point les fruits sont abondants« ; pourtant, cueillir des fruits en milieu urbain ne relève pas de l’évidence culturelle. Et pendant ses escapades, Ethan Welty recueille souvent les remarques de passants intrigués, surpris « qu’il y a de la nourriture gratuite au dessus de leur tête et qu’ils ne l’ont jamais remarquée ! »
Falling Fruits voit le jour en 2013, sous l’impulsion d’Ethan Welty et de Caleb Philips, fondateur de l’association Border Fruits Rescue, qui récupère les invendus des marchés. Ils sont vite rejoints par Jeff Wanner, un ingénieur spécialisé dans l’efficacité énergétique des bâtiments. Depuis, tous trois travaillent au développement de la carte mondiale ainsi qu’à la mise en place d’une application mobile. Afin de rendre l’initiative plus attrayante, les trois jeunes se procurent les bases de données déjà existantes auprès des villes, ce qui leur permet de remplir une première carte. Dans une logique collaborative, chacun est invité à apporter sa propre contribution. Vite médiatisé aux États-Unis, le nouvel outil se propulse désormais en Europe, témoignant de l’intérêt accru des citoyen.ne.s pour les questions liées à la nourriture et à l’environnement.
« La mission de falling fruits, c’est de populariser le glanage et de créer une demande pour imaginer nos villes autrement »
Falling Fruits ne s’inscrit pas uniquement dans une démarche de court terme. C’est aussi l’occasion de « parler du futur de nos villes » . Si le côté pratique de la carte est une invitation à réduire le gâchis de comestibles qui seraient sinon promis à pourrir, Ethan Welty veut penser plus loin et envisager les défis auxquels l’humanité fait face : dès aujourd’hui, « 50% des habitants de la planètes vivent en ville » souligne t-il, rappelant que l’aménagement urbain est devenu une question politique cruciale. C’est pour cette raison que notre interlocuteur espère que la nature puisse être intégrée un peu plus dans les questions d’aménagement. Après tout, « les villes sont des écosystèmes entièrement construits par les êtres humains » . Et Falling fruits participe à mettre en lumière leur potentiel nourricier.
Ethan Welty a bon espoir : « Si on le veut, si on supprime les obstacles législatifs et sociaux pour se focaliser sur la production et la récupération de nourriture en ville, on pourrait produire beaucoup. » Mais il sait aussi que les barrières sont encore nombreuses légalement comme culturellement : souvent, les administrations sont réticentes à planter de nouveaux arbres fruitiers en ville, de peur que les rues soient salies, que cela devienne grossièrement le « bazar » . Pour autant, Ethan Welty et son équipe en sont convaincus : la carte peut devenir le point d’appui pour des groupes organisés localement, comme cela se fait déjà aux États-Unis. La cueillette dépassera alors les enjeux individuels pour se transformer en question communautaire. Pour convaincre peut être les villes qu’il existe une dynamique et un potentiel à la création de vergers urbains ?
Propos recueillis par l’équipe de Mr Mondialisation. Vous aimez nos découvertes et interviews ? Permettez-nous de continuer avec un simple café.
Pour aller plus loin : fallingfruits.org / facebook.com