Les fêtes sont déjà là et si pour la plupart d’entre nous il s’agit d’une opportunité de se retrouver en famille pour passer un agréable moment, tout le monde n’a pas cette joie. Dans certaines familles – et celles et ceux qui vivent cette situation en savent quelque chose – les repas de fête sont autant de risques de voir ses choix de vie alternatifs être confrontés à une foule de jugements et de critiques. Végétariens et végans, en tant que minorité (5% en France), font partie des cibles favorites, grâce à des attaques faciles et souvent infondées. Comment répondre efficacement et rationnellement aux sophismes anti-végan les plus courants ? Voici 7 contre-arguments sourcés, accompagnés de vidéos explicatives pour les moins belliqueux ou les plus désabusés. 

Avant tout, rappelons quelques définitions. Contrairement au végétarisme (ni viande, ni poisson) ou au végétalisme (aucun aliment provenant des animaux), le véganisme est un choix de mode de vie alliant une alimentation végétale à un refus de consommer tout produit issu des animaux ou de leur exploitation, incluant cosmétiques testés sur les animaux, fourrures, cuir,… En termes simples : il s’agit d’adopter des choix de consommation qui minimisent la souffrance et la violence envers les autres espèces.

Par ailleurs, les végans pensent que l’humain n’est pas seulement animé par des pulsions (alimentaires notamment) mais un être culturel, doté de choix moraux. Celui de ne pas infliger des souffrances aux autres êtres sentients fait partie de ces choix en pleine conscience. Or, contrairement aux idées reçues, cette vision n’est pas le fruit d’un phénomène de mode récent. En effet, pour débattre du cœur d’une philosophie, autant nous entendre sur ce qu’elle est avant tout. Nous l’avons définie, établissons également son histoire ancienne en 14 minutes chrono :

Si la pensée végan est ancestrale, la perspective peut demander à échelle individuelle un effort intellectuel long et important qui prend parfois une vie entière à réaliser. La réaction la plus primaire devant cet univers inconnu est donc la moquerie, le rejet et un nombre important de sophismes cherchant à défendre l’ordre moral, culturel et économique actuel. Il convient donc de déconstruire ces syllogismes pour faire avancer le débat sur des bases sereines et constructive :

 

  • SOPHISME #1 « Et la carotte, elle souffre pas peut-être !»

Le « cri de la carotte », argument fétiche des anti-végans. L’hypothèse de la souffrance des plantes, au sens où on l’entend, reste à ce jour strictement hypothétique. Aucune étude scientifique sérieuse n’a jusque-là permis de le démontrer.

S’engager dans ce débat est déjà un cul-de-sac idéologique tant il ne repose sur rien de tangible. Structurellement et biologiquement, le règne végétal est complètement différent du règne animal. Dans une logique d’évolution, la plupart des plantes, des fruits et des fleurs sont même programmées pour être mangées et leur appareil génétique répandu dans l’environnement.

À ce titre, il n’a jamais été trouvé de traces de nocicepteurs – qui conduisent à la douleur – dans aucune plante terrestre. Si les plantes peuvent transmettre certaines informations très basiques, dont des micro-flux électriques, on est infiniment loin du modèle organique complexe des mammifères dont l’existence d’un cerveau peut transformer les signaux en douleur ressentie.

L’animal possède un système nerveux complexe et manifeste physiquement de la douleur. Ce sont des êtres profondément sensibles et conscients. Non, il n’y a définitivement pas de petit humain hurlant enfermé dans votre feuille de salade. Le croire, c’est faire preuve d’anthropomorphisme pour se donner bonne conscience et continuer de faire souffrir des créatures qui se débattent et agonisent dans leur sang de manière explicite.

Mais, allons bon, imaginons que la carotte souffre quand on la coupe ou déterre ! La cause végétar(l)ienne repose sur un concept crucial souvent oublié : c’est que nous pouvons biologiquement nous passer de viande, car nous sommes des omnivores. Autrement dit, nous pouvons chercher et digérer nos nutriments depuis d’autres sources que l’animal. Or, nous ne pourrions pas vivre sans nourriture du tout. De fait, notre survie en dépendrait : il nous faudrait manger des carottes ou mourir. Il ne serait plus question de caprice, plaisir ou gourmandise, mais de véritable enjeu vital bien plus légitime. Ceci-dit, il pourrait ainsi être question de mettre en place un maraîchage le moins douloureux possible (rires).

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D’autre part, toujours en présupposant que les plantes souffriraient de la même manière que les animaux (souvenez-vous bien du cri agonisant de la dernière pomme que vous avez si sauvagement croquée…), il faut savoir que 2/3 des terres agricoles dans le monde sont consacrées à l’élevage ou à la production d’aliments pour le bétail. Mathématiquement, manger de la viande, c’est sacrifier et torturer indirectement bien plus de végétaux que les végétariens/vegans eux-mêmes ! Tout en privant une grande partie de l’humanité de l’abondance alimentaire dans un contexte de crash écologique prochain. Car si on libérait ces deux tiers de terres disponibles, nous pourrions régler le problème de la faim dans le monde instantanément.

Un résumé vidéo de 3min27 qu’on peut diffuser à table, en toute pédagogie, pour s’épargner l’effort ou introduire les contre-arguments :

 

  • SOPHISME #2 « Et votre soja OGM, il ne pollue pas peut-être ? »

Qu’en est-il de la déforestation massive que la production de soja engendre au Brésil ? La faute des végans, vraiment ? En réalité, seul un très faible pourcentage de ce soja finit dans la consommation humaine directe. En France par exemple, 90 % de la consommation du soja est destinée à nourrir le bétail. Et oui, la déforestation au Brésil dans le but de planter du soja à tout va est quasi-entièrement imputable à la production massive de la viande dont se nourrissent les occidentaux.

En Europe, la plupart des aliments à base de soja, destinés directement à la consommation humaine, sont fabriqués avec du soja produit localement. Puis, qu’on soit bien clairs, les végétariens/vegans ne mangent pas que du soja. C’est même une toute petite part de leur alimentation. La viande et les autres produits animaux peuvent aisément être remplacés par des céréales et des légumineuses. La plupart du temps, les personnes consommant de la viande mangent à travers les produits industriels tout autant de soja. Vous savez, l’huile « végétale » utilisée dans les gâteaux ultra-transformés ?

A ce propos, l’industrie de la viande a distillé la rumeur que le tourteau de soja – sous-produit des cultures de soja donné au bétail – ne serait qu’un rejet de l’industrie du soja pour humains (huiles, graisses, dérivés…). En d’autres termes, il s’agit de laisser penser que les agriculteurs ne sauraient pas quoi faire de ce « déchet » qu’est le tourteau, réutilisé pour nourrir le bétail à contre cœur…

C’est évidemment un mensonge éhonté colporté notamment chez les jeunes par des influenceurs réactionnaires, comme Le Raptor Dissident. En réalité, c’est exactement l’inverse : l’étude du marché démontre que la rentabilité pour les agriculteurs repose sur la production du tourteau avant tout. Les sous produits de ce tourteau, comme l’huile de soja, inondent déjà le marché avec peu de débouchés.

Par ailleurs, le soja destiné à l’alimentation humaine en France, pour faire du tofu par exemple, est majoritairement produit en Europe, sans OGM, en  très petite quantité. Le soja pour nos bovins vient quant à lui du Brésil avec une empreinte écologique conséquente. Synthèse en vidéo :

 

      • SOPHISME #3 « Et ta santé alors ? Tu dois être complètement carencé ! De toute façon, pour être un homme, il faut manger de la viande ! »

Ah, la carte de la virilité… Lorsqu’on parle de régime végétarien/végétalien, la question des carences revient assez régulièrement. Pour ce qui est du fer, il n’y a pas plus de risque pour les végétariens que pour les non-végétariens si l’alimentation est équilibrée[1],[2],[3] (incluant légumineuses, fruits secs, céréales, légumes verts…).

Concernant le débat fer héminique (viandes et poissons)/non-héminique (végétaux et produits laitiers), il n’a pas lieu d’être car on sait aujourd’hui que l’absorption du fer par l’organisme dépend de nombreuses variables incluant la composition du repas. Par exemple, les aliments contenant des phytates et des polyphénols tels que le café, le thé, les graines ou les noix inhibent l’assimilation du fer non héminique par l’organisme. À l’inverse, les aliments riches en vitamine C améliorent cette assimilation et réduisent la quantité d’inhibiteurs dans l’organisme. Il est assez amusant de voir à quel point certains s’inquiètent soudainement de la santé des végans quand une crise sanitaire majeure traverse la population occidentale, notamment en raison de la consommation excessive de viande et de sucre…

Un végétar(l)ien aura d’autant plus de chances d’être en bonne santé qu’il est, de fait, attentif à son équilibre alimentaire et aux compensations par rapport à un consommateur lambda, dont les repas ne font pas spécialement l’objet d’observations et de régulations.

Pour la vitamine B12, c’est le seul risque (éventuel) de carence. Il est conseillé pour un régime 100% végan d’ingérer des compléments, plus particulièrement en cas de régime végétalien. Cependant, la B12 présente dans votre viande ne tombe pas du ciel non plus. Il faut bien comprendre que les animaux des élevages sont très souvent eux-mêmes supplémentés en B12 (et en antibiotiques…). Vaut-il donc mieux se supplémenter soi-même ou manger un animal supplémenté ?

Par ailleurs, la prise de B12 n’est pas forcément chimique. On parle d’une simple vitamine synthétisée par un certain type de bactéries, présentes notamment dans les sols (de plus en plus pollués, précisons-le). Par le passé, on pouvait la trouver naturellement sur certains végétaux mais les mesures d’hygiène modernes (pesticides, nettoyage, désinfection etc.) font que l’alimentation végétale ne contient plus ce type de bactérie (que l’on retrouve toutefois naturellement dans notre flore intestinale).

On pourrait éventuellement supposer que l’alimentation industrielle, ultra-transformée et les antibiotiques à foison perturbent gravement notre microbiote et plus globalement, l’équilibre naturel de notre corps. Quoi qu’il en soit, qu’on soit omnivore, végétarien ou végétalien, de nos jours, il existe de nombreux aliments enrichis en vitamine B12. Il n’est donc pas nécessairement question de se supplémenter en cachets !

Et les protéines ? Ah ces fameuses protéines ! Et bien il faut savoir que le mythe des protéines animales mille fois supérieures aux protéines végétales reste… un mythe. Dans les faits, la différence est négligeable. Les besoins en protéines des végétariens/végétaliens peuvent facilement être satisfaits en ayant un repas varié et équilibré (en associant par exemple les légumineuses aux céréales). La digestibilité quant à elle, est quasi-similaire pour les deux types de protéines (bien que légèrement supérieure pour les produits animaux). Qui plus est, une consommation excessive de protéines animales présente un risque sanitaire bien réel et peut être la cause de maladies chroniques variées (ex : pathologies cardiovasculaires). À ce titre, de nombreux bodybuildeurs prennent aujourd’hui des protéines de soja et ne souffrent d’aucun retard sur leur entraînement.

Plus globalement, en comparaison des non-végétariens, les végétariens ont des taux de cholestérol, une pression sanguine et un IMC plus bas. Les omnivores, quant à eux, ont un plus fort risque de mortalité liée aux maladies cardiovasculaires. De même, l’alimentation végétarienne réduit le risque de pathologies telles que l’hypertension, le diabète ainsi que certains cancers. Le régime végétalien, quant à lui, en dépit des plus faibles apports en vitamine B12 et en oméga-3, réduirait encore plus le risque d’obésité, d’hypertension, de diabète de type 2 et de mortalité liée aux pathologies cardiovasculaires. Malgré ces nombreuses études, le mythe du « végan malade et faible » continue d’être colporté par des faiseurs d’opinion.

 

Précisons-le, personne ne dit ici que l’être humain n’est pas fait du tout pour manger de la viande et qu’il faut arrêter du tout au tout. Cependant, les mensonges à ce sujet sont devenus intolérables. Par ailleurs, il est urgent de réduire drastiquement cette consommation massive qui met gravement en péril notre santé et celle de tous les êtres vivants de cette planète, contribuant grandement à la destruction de cette dernière (déforestation, changement climatique,..).

Pour aller plus loin, il faudrait également aborder le fléau pour notre santé que représente de manière générale la nourriture industrielle. C’est plutôt là que réside le véritable risque d’être malade ou faible, et les végans/végétaliens/végétariens sont également concernés par la récupération de leur cause via des produits ultra-transformés. Le reconnaître peut faire avancer le débat de manière positive. A savoir que les consommer n’est parfois qu’une étape transitoire vers une consommation végétale plus locale et respectueuse de l’environnement de manière générale.

Enfin, simpliste mais efficace durant un diner, nous pouvons parler de ces sportifs végans en très bonne santé. Et histoire de mettre de l’eau dans son vin, admettre que certains organismes minoritaires peuvent être plus vulnérables que d’autres face à n’importe quel changement ; et qu’en aucun cas le véganisme ne conseillerait à ces cas de s’imposer une autre alimentation. Ces exceptions marginales, valables dans un sens comme un autre, ne font donc que confirmer la règle étant que l’observation scientifique établit la viabilité du véganisme pour les humains de manière générale.

David Haye, multiple champion de boxe végan et ambassadeur de Peta Asia (VS Monte Barratt) @Peter Wyspianski/Flickr

 

  • Sophisme #4 « De toute façon, un bon steak, c’est trop bon ! »

Surprise : les végans sont, aussi, le plus souvent d’accord… Les végans ne sont pas un groupe de personnes réunies parce qu’ils n’aiment pas le goût de la viande. Ils reconnaissent volontiers quels étaient leurs plats préférés auparavant, et peuvent discuter avec intérêt de leur nouveau rapport à ces plats. Ce qui peut être un sujet de discussion tellement plus rassembleur, stimulant et bienveillant !

Parfois, ils se souviennent d’un goût agréable, mais l’idée même d’en remanger paraît écœurante, car ils conscientisent l’animal derrière. Parfois le souvenir de la viande leur rappelle tout ce qu’ils n’aimaient déjà pas tellement : les nerfs, le sang, les os, … Mais une chose est sûre : ce n’est pas parce que la viande a bon goût qu’en manger est juste sur le plan moral ou écologique. Sinon, que penser du cannibalisme ? La viande humaine serait réputée tendre, est-ce un signe qu’elle est faite pour être mangée…?

Le véganisme ou végétar(l)isme ne se bat pas contre une saveur, mais contre ce que vouloir en jouir produit de souffrance et d’insensibilité. Le plaisir gustatif est-il un dessein qui puisse justifier d’exploiter, maltraiter, mépriser ou tuer massivement des individus sensibles ? C’est le cœur du choix de vie végan, végétarien ou végétalien.

 

  • Sophisme #5 « Mais que vont devenir toutes les vaches si on ne les mange plus ? »

«Le projet animaliste n’est pas de relâcher [les animaux de ferme] dans la nature. Ces animaux n’ont d’existence que dans le cadre de la domestication. Leur projet, c’est de gérer les animaux actuellement vivants en les laissant mourir dignement, petit à petit, avec compassion, et cesser d’en faire naître » résume parfaitement la sociologue à Montpellier, Marianne Celka.

D’abord, la cessation soudaine et immédiate de la consommation de viande est un fantasme. La diminution de la consommation est lente et personne ne va devenir végan du jour au lendemain. C’est du même acabit que « si je te laisse aller faire pipi, alors je devrais laisser toute la classe y aller, et ce serait le chaos, donc c’est interdit ». C’est une crainte sans fondement et complètement déconnectée des probabilités : tous les élèves n’iront jamais aux toilettes en même temps, tout le monde n’arrêtera pas de manger de la viande en même temps et ces potentialités ne justifient pas de se dresser contre.

De fait, la sensibilisation peut permettre une douce mais cruciale baisse de la consommation de viande qui obligera les productions à revoir petit à petit leur rythme de reproduction d’animaux et les quotas qu’ils infligent actuellement à ces troupeaux. 

Ensuite, ne parlons pas des « vaches » comme s’il s’agissait soudainement de vies qui valaient la peine de nous en préoccuper alors que nous les élevons initialement pour les manger, donc les tuer. Est-ce de bonne foi que de se soucier de l’avenir d’une espèce qui ne vit actuellement que pour être exploitée, puis tuée à l’infinie ? Doit-on forcer et entretenir la vie pour qu’elle puisse nous servir dans les pires conditions ?

Ces animaux ont fait l’objet d’expérimentations dramatiques qui ont complètement modifié leur existence : ils sont pour la plupart devenus de la chair à canon en mauvaise santé dès la naissance (os ou membres fragilisés par les transformations génétiques destinées à les grossir, immunité détruite par la prise d’antibiotiques,…) du bétail en souffrance maintenu en (sur)vie pour nous nourrir, voire pour être directement jeté à la poubelle faute d’achat (30% de la nourriture que nous produisons finit dans les bennes, inutile, symbole de la mise à mort gratuite d’animaux sensibles).

Les causes animalistes prônent donc de laisser ces animaux mourir en paix, le peu qu’on puisse offrir à leur retraite, dans des sanctuaires aménagés qui serviront de lieux pédagogiques. Domestiqués, ils pourraient ainsi, finir leurs jours sans qu’on permette la reproduction massive de leur espèce, pour ne plus avoir à vivre dans un but anthropique dénaturant. A l’heure où les espèces sauvages disparaissent à cause de l’activité humaine, la diminution drastique des surpopulations d’animaux d’élevages industrialisés incapables de refaire partie d’un écosystème sain n’est pas un argument valable.

«Je ne vois pas l’importance de conserver des races si ce n’est par orgueil humain, comme une collection de timbres» conclue Aurore Lenoir, militante antispéciste.

Petit point en fin de vidéo au sujet de l’avenir des animaux d’élevage. Mais faire visionner les 4 minutes depuis le début vaut bien la peine (à noter que la disparition des abeilles d’élevage citées n’est pas celle des abeilles sauvages, quant à elles indispensables à nos écosystèmes) ! Si tout le monde devenait végan, que se passerait-il ? Aperçu documenté : 

 

  • Sophisme #6 « On ne peut pas mettre nos pauvres bouchers et éleveurs au chômage ! « 

Partons, en amont et patiemment, d’un autre problème, pour revenir plus loin à la question de l’avenir des exploitants du secteur animal.

« On avance souvent un argument anti-abolitionnisme [de l’élevage], c’est l’entretien des paysages » explique Jean-Marc Charrière, ancien éleveur suisse devenu végan. En effet, beaucoup soupçonnent que si l’élevage disparaît, la nature que l’on connaît – pâturages verdoyants, champs fertiles, étendues fleuries,… – va disparaître pour laisser place à des terres mortes. Les animaux d’élevage permettant leur renouvellement et leur vivacité.

D’abord, il est important de ne pas idéaliser cette forme de nature. Ce sont des écosystèmes appauvris, du fait même de la déforestation dont ils sont souvent le résultat. La Terre ne possède pas naturellement autant d’hectares nus, uniquement recouverts d’herbes et de fleurs : « Dans le monde, la déforestation est le premier facteur de perte d’habitats : 290 millions d’hectares de couverture forestière ont disparu entre 1990 et 2015. En France, la principale cause de perte, fragmentation et dysfonctionnement des habitats naturels est liée aux changements d’occupation des sols, du fait de l’augmentation de l’urbanisation et des cultures agricoles et sylvicoles intensives » explique Nature France.

D’autre part, rappelons combien les élevages industriels détruisent par nature les terres sur le long-terme. Les constructions d’usines, d’entrepôts géants aux sols bétonnés, les rejets chimiques, les déversements d’excréments à très grande échelle, à même les cours d’eau, contaminent la nature. Comme c’est le cas en Bretagne, par exemple, où l’élevage porcin industriel a provoqué la formation d’algues vertes toxiques sur le littoral, à l’origine de la mort d’animaux et habitants.

Enfin, ces terres ne seraient pas vidées d’animaux, mais d’animaux d’élevage. La réparation des écosystèmes par une réhabilitation pertinente d’espèces locales sur des territoires autrefois substitués par l’élevage est une étape comprise dans la philosophie végan. Il ne s’agit jamais d’un idéal, d’un rêve instantané et radical, mais d’un processus, long et laborieux, qui consiste à remplacer avec pragmatisme et intelligence le modèle actuel : rien ne sera facile ou parfait, mais une transition est possible.

En ce sens et en connaissance de cause, Jean-Marc Charrière poursuit et croise cette problématique avec celle de l’avenir potentiel du métier d’éleveur : « Il pourrait subsister une partie d’élevages où finalement on exploite plus l’animal pour un produit mais pour des services. Imaginons une parcelle d’intérêt patrimonial ou écologique où on pourrait introduire des animaux pour entretenir certains endroits ».

L’éleveur ajoute qu’il faudrait prendre des précautions pour ne pas rentrer de nouveau dans un rapport marchand à l’animal, simples tondeuses à la chaîne. La relation envisagée est plutôt mutualiste : les intérêts des animaux à pâturer paisiblement seraient croisés avec ceux des humains de maintenir les pâturages. L’idée, un moindre mal à ce stade, serait de permettre aux éleveurs une transition durant la période où ces troupeaux existeraient encore, c’est-à-dire le temps que les générations d’éleveurs déjà formées soient soutenues et que les nouvelles générations rêvent d’autres métiers, parfois très proches.

En effet, il est aussi possible d’imaginer des perspectives non-utilitaristes où l’on offrirait des sanctuaires gérés par les anciens éleveurs ou bouchers et financés par les subventions actuellement dédiées au développement délétère de l’élevage industriel et intensif. Le but sociétal, si on en cherche un malgré tout ? La pérennité de nos sols, de nos paysages, de la nature dont nous sommes dépendants et la création d’emplois et de lieux pédagogiques pour les enfants, de bien-être pour les personnes handicapées, d’activité pour les personnes âgées,… Autant de services pour lesquels nous investissons déjà volontiers des budgets.

Rencontre enrichissante :

 

 

  • Sophisme #7 « L’Homme est un prédateur naturel, il a toujours mangé de la viande »

« Nous sommes, à la base, des omnivores opportunistes ».

« Les premiers hommes préhistoriques ne savaient pas chasser au tout début et avaient une alimentation incroyablement diversifiée » rappelle sur France Inter le sociologue Eric Birlouez. Car, s’il est difficile de définir avec certitude ce que nous étions à l’origine des origines – sans compter que nous venons du primate dont la majorité des espèces sont végétariennes ou omnivores à prédominance végétarienne -, les scientifiques ont en tout cas pu établir grâce, notamment, à l’étude des outils anciens que nous vivions principalement de la cueillette, voire plus tard du charronnage. Une chose est sûre, donc : ce qui nous définit, ce n’est pas précisément la consommation de viande, mais un régime opportuniste. C’est-à-dire qui sait s’adapter au contexte. 

Or, aujourd’hui, nous avons évolué de telle manière que notre conscience du monde et des autres nous alarme sur la souffrance des animaux. N’est-ce donc pas naturel d’être à l’écoute de cette évolution intime, de cet instinct de protection ? Et d’y conformer notre alimentation malléable par nature ?

Entendons-nous, l’argument du « naturel » est pernicieux car, fourre-tout, il peut permettre de défendre tout et son contraire. D’aucuns font de l’instinct de prédation un fait intemporel, inhérent, immuable, figé et essentialisé, mais il est surtout important de rappeler que la Nature est profondément changeante et évolutive sur le long terme. L’exemple du Grand Panda est éminent à ce propos : issu d’ancêtres carnivores, il est peu à peu devenu herbivore. 

En outre, et c’est une conclusion expérimentable, quand ce n’est pas nécessaire à notre survie, nous perdons « naturellement » ce fameux instinct. Voici un petit court-métrage dans lequel devrait pouvoir se reconnaître n’importe quel cousin :

 

Pour une introduction plus globale aux problématiques de l’exploitation animale, à nouveau quelques chiffres qui remettent les opinions à leur juste place :

Vue d’ensemble sur l’industrie de la viande.

Version poissons.

Version produits laitiers, tout autant source de souffrance que les viandes et poissons et pas loin de nous rendre en réalité plus malade qu’autre chose :

Version œufs industriels ou à échelle intensive, avec une vidéo plus choquante via L214.

Sur la fourrure : petit clip humoristique mais pas moins instructif de MagiCJacK. Mais aussi : Fuites d’images sur l’industrie du cuir. Et une campagne de sensibilisation originale en animation contre les cosmétiques testés sur les animaux.

On vous sort d’autres arguments improbables et vous êtes épuisés ? How I Met Your Tofu a sorti un calendrier expéditif mais super efficace d’autres sophismes utilisés contre les végans. Suite et fin avec ce petit guide clefs en main bien utile.

Mais si, par miracle, les convives sont convaincus, proposez leur un réveillon sans viande, grâce à ces 30 idées de recettes festives végétariennes et végans.

Image de couverture @Nicole Michalou/Pexels


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