Le Collectif « A Notre Tour » a réuni dans un livre éponyme les portraits de jeunes engagés de la région Nouvelle-Aquitaine. Lycéens, dans leur vingtaine ou tout justes trentenaires, il n’est jamais trop tôt (ou trop tard) pour contribuer à créer un monde plus égalitaire, écologique et solidaire. Des préoccupations qui parlent à la jeune génération d’autant plus qu’elle est celle qui doit faire face aux défis représentés par le dérèglement climatique, le creusement toujours plus grand des inégalités sociales et mondiales ainsi que la montée de discours extrêmes.

A Notre Tour

Formée de sept hommes et femmes entre 18 et 38 ans, l’association A Notre Tour s’est donné comme objectif de promouvoir et de soutenir les actions entreprises par des jeunes dans les domaines de l’écologie, des luttes sociales, de la solidarité… Via leur page facebook et leur compte instagram, ces engagements ainsi que les propres actions du collectif sont ainsi mis en valeur, avec l’espoir d’inspirer de nouvelles personnes à se lancer à leur tour. Pour diffuser son message porteur d’espoir le plus largement et toucher autant de jeunes que possible, le collectif a choisi d’écrire un livre réunissant 43 portraits variés de jeunes néo-aquitains engagés.

Emmeline Vaginay, fondatrice d’A Notre Tour, a accepté de nous le présenter plus en détails ainsi que la naissance, le fonctionnement et les futurs projets de son collectif.

MR M : Quand et comment est né le collectif « A Notre Tour » ?

Le collectif A Notre Tour est né en 2020. Je suis à l’initiative de la création du collectif qui est basé à Dax, dans les Landes (ma ville d’origine). J’avais plusieurs amis engagés et je me suis dis : « Pourquoi pas se réunir pour faire des projets de groupes ? ». L’idée du projet a émergé en septembre 2020 à la suite de notre premier projet en tant que collectif : un livret “Jeunes et engagés” qui donnait des petits tips pour être engagés dans les Landes. Après 500 tirages et le succès de celui-ci, de la situation sanitaire actuelle et la volonté de continuer des projets nous avons décidé de réaliser un livre plus conséquent : un livre sur les jeunes engagés en Nouvelle Aquitaine.

MR M : Les parcours des membres de l’équipe sont variés tout comme leur âge. Comment chacun a-t-il trouvé le chemin du collectif ?

Les membres du collectif étaient majoritairement dans mon entourage, Célia je l’ai par exemple rencontrée dans un camping il y a 10 ans, Nicolas c’était au ping-pong et au service jeunesse de Dax, Noélie je l’ai rencontrée pendant une intervention pour le livret, Marie au lycée quand je passais mon bac….
Je leur ai proposé qu’on se réunisse et ils étaient heureux de s’impliquer dans des projets collectif car ensemble on peut faire de plus grand projets.
Le collectif compte un noyau de 6/7 personnes. Cependant une quinzaine de personnes nous aident sur des actions ponctuelles.

MR M : Comment le collectif est-il organisé autour de ces membres ? Quelle est la répartition du travail entre eux ?
On répartit le travail selon les projets, le but du collectif est que ce ne soit pas « enfermant », chacun rentre ou s’éloigne comme il veut, selon son temps disponible et ses envies.
Pour le livre par exemple comme j’étais à l’initiative de celui-ci, j’ai coordonné le collectif, je motivais les troupes…

Nous faisions des visioconférences chaque mois pour connaître l’avancée du projet. A la première visioconférence liée à notre projet, nous avons décidé de nous répartir les rôles. Premièrement nous nous sommes répartis les départements de la Nouvelle Aquitaine, un ou deux par personne pour chercher et interviewer les jeunes engagés. Deuxièmement, nous nous sommes répartis en diverses commissions :

– Faire la trame d’interview (temporaire)
– Répondre aux demandes personnes extérieures (permanente)
– Subventions (permanente)
– Les illustrations (permanente)
– Communication (permanente)

MR M : Quelles sont les actions et démarches que vous avez menés dont vous êtes le plus fier ?

Pour le moment c’est le livre, c’était notre premier livre pour la plupart ! C’était un bonheur de pouvoir, après plus d’un an de travail, toucher le livre. C’est un aboutissement. 

MR M : Votre démarche se veut porteuse d’espoir. Cependant, n’êtes-vous pas parfois découragés face à la situation politique et sociétale ?

En fait on pense que c’est important de créer des projets locaux, proches de la population et du terrain. Certains membres du collectif sont découragés car « rien ne change » mais pas totalement, car des alternatives voient le jour (hors du domaine politique).

MR M : Comment la crise du covid a-t-elle impacté votre collectif ? Quels nouveaux défis avez-vous du relever ?

Pour la partie écriture du livre, la crise covid nous a empêché de nous voir en présentiel, donc nous étions souvent en visio. La plupart des membres du groupe travaillant sur le livre ne s’est donc jamais rencontré, c’était assez drôle. Cela ne nous a pas impacté pour le projet nous avons bien réussi à suivre les rétroplannings.

Pour les évènements autour du livre, ils ont été impacté oui, donc le projet livre dure plus longtemps !

MR M : Comment envisagez-vous le futur du collectif ? Avez-vous déjà en tête de futurs projets et actions (distribution alimentaire, ramassage de déchets) ?

Le futur du collectif, c’est pourquoi pas un agrandissement avec un peu plus de jeunes pour plus de rencontres pour plus d’actions. Travailler sur d’autres projets touchant différent domaines, plus motivées ensemble et accueillir de nouveaux membres. Aller plus loin en découvrant d’autres engagements. Essayer de plus se rassembler. Nous aimerions réaliser des podcasts ou petites vidéos sur des jeunes engagés.
Oui nous allons refaire des ramassages de déchets. Pour le moment nous nous concentrons sur la communication du livre pour le diffuser au mieux ! Pour citer une jeune du groupe : « Fière de faire partir du collectif et du potentiel qu’il représente » ; « le collectif me donne de la confiance et la légitimité à entamer de nouveaux projets personnels ».

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La jeunesse engagée

Ils ont entre 14 et 36 ans et sont tous d’une manière ou d’une autre engagés pour des causes qui leur tiennent à cœur. Des engagements pluriels que l’ouvrage classe en quatre grandes thématiques : « Vers un avenir plus vert » ; « Solidarité et Générosité » ; « L’art de s’exprimer » ; « Citoyen.ne.s du monde ». Chacune de ces parties se clôt par une de ressources bibliographiques (livres & films) recommandées par les jeunes eux-mêmes pour que le lecteur intéressé puisse aller plus loin. Entraide, écologie, message de tolérance et d’ouverture sur le monde, lutte contre les inégalités, le racisme, le sexisme sont les combats qu’ont choisis de mener les 43 jeunes dont les portraits sont au cœur de « A Notre Tour ».

Certains ont été inspirés par leur famille, leur entourage. Pour d’autres, le service civique ou des figures comme la jeune Suédoise Greta Thunberg ont servi d’élément déclencheur à leur engagement. L’urgence climatique, la pollution, les inégalités et injustices auxquelles chacun a pu être confronté ont également catalysé leur motivation. Mais si les luttes choisies diffèrent, tous ont en commun l’envie de mobiliser autour d’eux.

L’association The Sea Cleaners

La plupart sont évidemment membres bénévoles voire fondateurs d’associations diverses : ils mènent des actions de ramassage de déchets comme Marine, qui va régulièrement nettoyer les plages des Landes avec l’association « The Sea Cleaners » dont elle est membre et qui est spécialisée dans la pollution plastique. D’autres comme Tom à Bordeaux, s’intéressent à la gestion et au recyclage des déchets. Grâce à Ninon et Noémie, militantes féministes, le Planning Familial fermé durant trente ans a pu ré-ouvrir dans la Creuse. La permaculture permet à Benjamin via son association « Les Compagnons du végétal » de diffuser ses connaissances sur la nature. Autre fondateur d’association, Florian, 19 ans qui a crée seul et sans expérience « Pet’s Rescue » pour lutter contre la maltraitance animale. Une décision qui s’est imposée à lui après qu’il a constaté l’absence d’association près de chez lui. La sensibilisation au racisme, à l’homophobie, à la discrimination envers les personnes en situation de handicap sont également des causes défendues. Bref, de l’action, du concret.

Pet’s Rescue, l’association de Florian.

Certains ont aussi mené des études en rapport direct avec les causes auxquelles ils se dédient et pratiquent – ou compte pratiquer – un métier en relation directe avec elles. Ainsi Maud et Laura, deux sœurs jumelles, ont suivi des études dans un institut de cinéma et d’audiovisuel pour travailler dans le cinéma d’action en stop-motion. D’autres ont choisi le chemin de la politique à l’échelon local et même européen.

Il n’en reste pas moins que ce genre d’engagement n’est pas sans conséquence sur la vie privée de ces jeunes. Ils reconnaissent que leur investissement est très énergivore et chronophage, débordant souvent dans leur sphère privée : Laura, pompière volontaire, doit assurer régulièrement des gardes le soir en semaine et durant le week-end. Les maraudes et la collecte/distribution d’aide alimentaire aux plus démunis impliquent aussi une certaine disponibilité.

Pour faire connaître leurs actions, divers moyens d’expression sont employés : certains ont choisi via la presse écrite à l’exemple de Zoé, journaliste bénévole et féministe. Lucas, passionné par le patrimoine de sa ville, Limoges, a écrit un livre dédié à ses rues. Avec son association, Léna a tourné le documentaire « Les yeux des femmes » sur le combat des femmes indiennes contre les inégalités qu’elles subissent à cause de leur sexe, leur caste, leur milieu social. D’autres communiquent via l’art, la photographie, la musique, des podcasts, des vidéos, en intervenant dans des établissements scolaires…

De ces parcours hétéroclites ressort un certain nombre de points communs. Tous et toutes sont animés de convictions fortes et malgré les moments de doute, de frustration et de découragement traversés, leur détermination finit par reprendre le dessus. L’espoir leur succède comme un moteur pour les pousser à avancer. Sans être pour autant de doux rêveurs utopiques, ils sont convaincus que leur action a le pouvoir de faire bouger les lignes si chacun y met un peu du sien.

Si l’on devait résumer le message porté par « A Notre Tour » ce serait que chaque jeune (et moins jeune) peut trouver sa cause (le choix ne manque pas !) et se battre pour elle. Ne pas se décourager par les problèmes rencontrés en cours de route ni par des tiers critiques souvent virulents envers ceux qui prennent le risque d’agir. On sait à quel point la moindre un minimum sociale aujourd’hui nous vaudra d’être catalogué de « SWJ » ou encore de « Woke » par ceux qui tiennent à protéger le monde d’avant et ses injustices économiques.

Par ailleurs, le manque d’expérience ne doit pas être un frein pour se lancer, car ce sera l’occasion de développer « sur le tas » ses compétences de communication, d’organisation, d’administration, de créativité, d’acquérir des savoirs techniques, de l’assurance et de la confiance en soi pour mieux appréhender la vie et les défis qui nous y attendent.

Le livre « A Notre Tour » est disponible à l’achat pour financer leurs actions (8€ en vente directe, 12€ si envoi) via un message sur la page Facebook du collectif ou par mail : anotretour.na@gmail.com.

S. Barret

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