Ce 15 août, plusieurs ONG ont dénoncé l’assassinat de Jorginho, un des dirigeants la tribu Guajajara au Brésil. Reconnu pour son travail en tant que « Gardien de l’Amazonie », il était impliqué depuis plusieurs années dans la lutte contre la déforestation et pour la protection de son territoire. Dans la région, les persécutions à l’encontre des défenseurs de l’environnement se sont multipliées ces dernières années.

Au Brésil, c’est un nom de plus qui vient de s’inscrire sur la longue liste des défenseurs de l’environnement décédés dans des circonstances troublantes. Les dessous exactes de la mort de Jorginho, retrouvé à proximité d’un fleuve, n’ont pas été levés jusqu’à présent. En effet, les autorités chargées de l’enquête ont très rapidement privilégié la piste de la noyade, qui aurait été provoquée par une alcoolisation importante. Mais ces conclusions peinent à convaincre les communautés locales qui déplorent 80 assassinats parmi les leurs depuis le début des années 2000. Selon elles, Jorginho aurait plusieurs fois fait l’objet de menaces de mort. Pour l’ONG Survival International, tout indique que le militant a bien été tué.


Un ardent défenseur de la forêt

Les ONG et autochtones n’ont d’ailleurs pas tardé à mettre en doute les conclusions de la police locale jugées « hâtives » et sans véritable enquête. Selon Sara Shenker, de l’ONG Survival International auprès de RFI : « On ne sait pas qui l’a tué, mais Jorginho est malheureusement la dernière victime d’une longue série de dirigeants guajajara assassinés à cause du conflit lié à la terre. Il y a dans cette région du Brésil une mafia très puissante qui sévit dans l’exploitation forestière et qui essaye de réduire autant que possible le territoire indigène pour en tirer profit. Et ils ciblent, ils assassinent les dirigeants guajajara, en particulier ceux qui luttent pour protéger leurs terres. Et c’est ce que Jorginho faisait. » L’affaire Jorginho est donc loin d’être un cas isolé.

Jorginho était en effet membre des « Gardiens de l’Amazonie », un groupe composé de population autochtones locales qui essayent de défendre la forêt tropicale contre les coupes sauvages et tentent de pallier l’inaction de leur gouvernement face à cet accaparement violent des terres autochtones. Il vivait dans l’État du Maranhao, dans une région du pays dans laquelle le trafic du bois est important et où la forêt est des plus menacées. À la place, on se voit multiplier les monocultures agricoles : huile de palme, cacao, soja (à destination des élevages),… ainsi que des prairies pour l’élevage industriel. Alors qu’au Brésil la déforestation avait diminué entre 2004 et 2012, le phénomène progresse à nouveau depuis 2012. En 2016, la forêt amazonienne a perdu 8000 km2 selon l’institut brésilien de la recherche spatiale.

Oil palm in BrazilLes convoitises pour l’Amazonie menacent les peuples autochtones

Depuis plusieurs années, les populations locales de l’État de Maranhao, sont acculées par les industriels et des groupes mafieux désireux d’exploiter les richesses de la forêt amazonienne, empiétant toujours plus sur leurs territoires et entraînant de nombreux conflits. Menaces, violences, assassinats et expulsions forcées font partie de leur quotidien.

L’année passée, le président Michel Temer, empêtré dans des affaires judiciaires et inquiet quant à ses chances de réélection, avait voulu faire un geste envers les industriels en autorisant l’exploitation minière de 4 millions d’hectares de forêt amazonienne au Brésil. La décision, qui a été immédiatement dénoncée fermement par associations et citoyens accusant le Président de céder face aux lobbies miniers, a finalement été suspendue par la justice. Mais elle rappelle la proximité du pouvoir avec les grandes entreprises nationales et transnationales. Ici aussi, la course à la croissance du PIB semble aveugler quelques figures politiques.

Comme le révèlent les rapports successifs de Global Witness, les risques pris par les défenseurs de l’environnement augmentent d’année en année avec un nombre d’assassinats en hausse constante. Ce sont les régions dans lesquelles les structures mafieuses sont les plus développées, comme les pays Amérique du sud ainsi que les Philippines, qui sont les principales victimes. En 2017, le Brésil détenait le triste record du pays dans le monde où ces assassinats avaient été les plus nombreux, avec 57 homicides, selon le dernier rapport de Global Witness. Autant de figures du militantisme, connues ou moins connues, dont de nombreux agriculteurs, sacrifiées sur l’autel du développement économique.

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