Une jeune maman adepte de la méthode Béa Jhonson, la capacité à vivre sans produire de déchet, va recevoir une douche froide en faisant ses courses au supermarché… Elle partage avec nous l’histoire d’une stigmatisation ordinaire des acteurs de la transition qui osent aller au bout de leurs choix.

Monica, 30 ans, ancienne globe trotteuse, vit paisiblement dans la Drôme avec Bastian, un ex-baroudeur, lui aussi, arrivé là par hasard. Alors qu’elle était enceinte de leur fille Tessa, la maman va rapidement développer l’envie d’offrir un monde meilleur pour sa fille. Elle découvre alors les travaux de Bea Johnson qui préconisent un mode de vie plus équitable pour la nature, sans production de déchet ou presque. À travers un blog à cœur ouvert et son projet « Zéro déchet: 1 défi par semaine » Monica raconte ses expériences et les étapes de son évolution vers plus d’éthique dans son existence.

Mais voilà, changer de mode de vie dans un monde fait d’hypermarchés mais surtout de personnages intolérants n’est pas la chose la plus facile à faire. Monica va pleinement le réaliser quand de simples courses dans un grand magasin vont virer au drame. « Aujourd’hui j’ai pleuré chez Leclerc car j’ai été humiliée » c’est le titre d’une histoire de la stigmatisation ordinaire qu’on vous invite à découvrir…

11165244_1647986978764681_1275123168257917901_nImage proposée à la discrétion de chermininous.com

« La journée avait pourtant bien commencé. De retour de vacances, MiniNous chez la nounou et en pleine forme, le frigo vide, je décide donc de partir faire mes courses. Je commence par le marché où j’achète mes fruits et légumes et je tombe même sur ma jolie coupine rouquine Olivia alias Twinny Mummy. Les cabas remplis, je pars pour Leclerc pour acheter le reste de courses.

J’avais bien évidemment préparé mes tupperwares vu que je suis dans la démarche Zéro déchet toussa toussa. Je me dis que je vais les présenter avec assurance et un joli sourire et que si on me les refuse je n’insisterai pas. Premier tup au rayon fromagerie: la gentille dame me coupe mon gruyère et me le met dans le tup, un peu intriguée et étonnée mais très sympathique. Je suis mon chemin vers le rayon charcuterie et le gentil charcutier me découpe mes 6 tranches de jambon d’Ardèche et me les met directement dans le tup, également un peu étonné mais toujours agréable. J’arrive au rayon boucherie assez sure de moi vu qu’on m’avait déjà accepté le tup la dernière fois et forte de mes deux précédentes victoires. Et là c’est le drame!

– Boucher grincheux: « Ah non j’fais pas ça moi » (yeux fermés et nez ponté en l’air)

– Monica Zéro déchet: « Ah mais c’est étonnant car votre collègue l’a fait la dernière fois et je viens d’être servie dans les autres rayons » (grand sourire)

– Boucher grincheux: « Non non non, je ne fais pas ça, j’ai pas le droit par mesure d’hygiène ». (de plus en plus énervé et déjà en train de m’emballer mon poulet dans 2 couches de papier et 3 sacs plastiques)

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– Monica Zéro Déchet: « Je me permets d’insister monsieur, est-ce que vous pourriez appeler votre responsable et vérifier svp? » (moins souriante mais sûre de moi)

– Boucher grincheux: « J’ai pas que ça à faire! » (toujours me sur-emballant mon pauvre poulet fermier et me criant presque dessus)

– Monica Zéro déchet: « C’est quand même votre travail non? » (je monte le ton et commence à m’énerver)

– Boucher grincheux:  » pfff, et de toute façon qu’est ce que ça peut vous faire d’avoir les emballages? » (limite moqueur, des clients arrivent derrière moi et écoutent l’échange)

– Monica Zéro Déchet: « Je n’ai pas de poubelle chez moi, j’aimerai éviter les déchets » (Je sors l’excuse rapide conseillée par Béa Johnson dans son livre « Zéro déchet », excuse qui évite d’avoir à expliquer le concept dans son intégralité)

– Boucher grincheux: « Vous avez pas de poubelle? haha! Mais vous habitez où pour pas avoir de poubelles? c’est ridicule, arrêtez de dire n’importe quoi » (moqueur et méchant, les clients toujours écoutant l’échange)

– Monica Zéro déchet: « Je ne vous permets pas de critiquer ma façon de vivre monsieur, vous allez trop loin, appelez votre responsable svp » (là je suis très vexée, touchée, peinée de me faire humilier ainsi devant tout le monde, je monte donc le ton très fortement)

– Boucher grincheux: « Et puis là dans votre caddie, c’est pas des déchets non? Vous allez les mettre où les conserves et les cartons d’emballages? » (On s’engueule clairement à ce moment là)

– Monica Zéro déchet: « Justement je les met au tri monsieur, vous connaissez non? Et le concept de zéro déchet ça vous parle? Non plus hein? Donc quand on ne sait pas de quoi on parle on en parle pas! Vous n’êtes même pas au courant que votre enseigne Leclerc a déjà mis en place plusieurs choses vers la diminution des déchets et puis vous vous en foutez! Donnez moi mon poulet, merci, aurevoir » (hyper énervée, je montre presque les dents)

Sur ce, je tourne les talons, révoltée mais gênée en même temps et je me dirige vers l’accueil. Je l’entends parler de moi au clients suivants « non mais n’importe quoi, elle dit qu’elle a pas de poubelle pfff haha ». Je n’entends pas la réponse des clients et je m’en fou car je suis déjà au bord des larmes. Je me calme, me présente à l’accueil et explique ce qui vient de se dérouler à la dame qui appelle de suite sa responsable tout en me disant « nan mais il a raison il a pas le droit niveau hygiène hein », je lui réponds « Pas de soucis mais il n’a pas à m’humilier comme cela ni à juger ma façon de vivre devant les autres clients ». La responsable arrive et m’écoute de nouveau expliquer la situation et je finis par lâcher mes larmes de honte et d’énervement. Elle est très sympathique et compréhensive, me dit qu’en effet c’est inadmissible qu’il m’ai dit ces choses mais que concernant le tupperwares elle n’est pas bien sûre de la réglementation et elle appelle donc le responsable de la boucherie. Une nouvelle fois je m’explique devant ce monsieur qui est lui aussi très agréable et à l’écoute et qui me confirme qu’il n’est pas du tout interdit de mettre la viande dans le tup. Aucune loi ni règle ne l’interdit. Ils ont en effet une procédure: papier, sac plastique, étiquette mais que ce n’est pas une obligation législative. Je lui demande donc de m’accompagner au rayon boucherie pour mettre les choses au clair avec le boucher grincheux et surtout parce que je n’avais pas pu prendre mon steack haché.

Le boucher grincheux nous voit arriver et commence tout de suite à dire « non non non je ne mettrai pas la viande dedans! ». Le responsable le prend à part, dans l’arrière boucherie et de là s’en suit une discussion houleuse que je n’entends pas mais que je devine. En attendant, le deuxième boucher vient et me dit « je vous comprends, moi je vais à la pêche et je chasse, je déteste trouver des saloperies par terre. Malheureusement, vous savez, nous on est pas au courant si on a le droit ou pas, même moi je vous l’aurait sûrement refusé ». Je lui répond que je comprends tout à fait cette possibilité de refus et l’accepte mais que je demandais simplement à ce qu’on ne m’humilie pas ainsi devant d’autres personnes et qu’il aurait simplement dû appeler son responsable quand je le lui ai demandé. Ce deuxième gentil boucher pêcheur a été d’accord sur ce dernier point.

10 bonnes minutes plus tard, le responsable est revenu lui-même me servir et le boucher grincheux s’en allait. Chez lui? je ne pense pas qu’il ai été renvoyé ou qu’il ai démissionné pour si peu et de toute façon je ne lui souhaite pas. Bien que j’estime que pour travailler face à des clients on ne devrait pas se permettre de tels propos et réactions mais c’est un monsieur qui doit sûrement être en fin de carrière et qui est certainement un bon boucher. Tout en me servant mon haché dans mon tup, le responsable m’explique tout de même que là il me le fait mais que c’est un peu exceptionnel car « vous comprenez, certains clients nous demandent d’emballer 10 steack séparément, si on disait oui à tout le monde on ne s’en sortirai pas surtout un samedi. En plus, si vous ne voulez pas que je pèse votre viande sur une feuille de papier je vais donc devoir tarer ma balance alors qu’elle est déjà pré enregistrée ». Je comprends alors que le responsable ne sait pas trop sur quel pied danser. D’un côté il sait qu’il n’a pas le droit de me le refuser mais d’un autre il ne veut pas que tous les clients lui fassent des demandes « spéciales » sinon ça n’irait pas assez vite surtout quand il y a du monde le samedi. je lui réponds donc que je comprends ses inquiétudes mais que je fais exprès de venir un lundi matin car je sais qu’il n’y a personne et qu’en plus, s’il y réfléchit bien je lui enlève du travail d’emballage donc ça accélère les choses. En plus, je ne lui ai pas dit mais j’ai pensé très fort: Je ne suis tout de même pas servi par des robots non? Vous pouvez donc changer la tare de votre balance, ça prends 3 secondes top chrono. Si je voulais être servie par un robot je n’irai pas au rayon boucherie et me servirai directement au libre service. J’ai récupéré mon tup, je l’ai remercié pour son aide et je suis partie en caisse ou la caissière paraissait étonnée mais agréablement surprise de voir que cela se faisait enfin.

En conclusion, j’ai vécu un moment très humiliant et frustrant mais je ne me suis pas laissée faire et j’ai eu gain de cause. Je savais que j’étais dans mon bon droit dès le début mais très honnêtement, si le boucher grincheux avait refusé poliment mes tup, je n’aurait pas plus insisté que cela. Je n’étais pas là pour lui chercher des poux ou pour créer « un précédent », je voulais simplement essayer de suivre mes préceptes de vie. Je ne lui souhaite d’ailleurs pas de mal dans son travail à ce pauvre monsieur mais la semaine prochaine j’y retournerai et que ce soit lui ou un autre, je ferai la même demande. Je ne peux pas avoir vécu un moment si douloureux pour revenir en arrière. »

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Cette histoire, c’est avant tout celle de rapports humains. Un ancien monde s’efface lentement mais surement et les esprits les plus réactionnaires ou conservateurs (sans forcément en avoir conscience) moquent cette évolution. Certains diront qu’il faut boycotter les centres commerciaux au profit des circuits-courts. C’est une approche écologique évidente mais ce n’est pas toujours possible en fonction de l’endroit où on se trouve et l’indisponibilité locale de certains produits. Cependant, éviter le gaspillage semble plus facile en fréquentant les producteurs locaux et, de toute évidence, les magasins spécialisés sans emballage. On souhaite à Monica, tout comme les millions d’anonymes en transition, de ne pas se laisser abattre par ces rencontres indésirables. Elles sont au contraire les signes que votre changement n’est pas une façade.


Source : chermininous.com

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