En Allemagne, on la surnomme déjà la « Barbie Stasi » en référence à la police politique de l’ex-RDA. Le dernier cru de Mattel sera muni d’un microphone capable d’enregistrer des informations dans le but déclaré de répondre à l’enfant de manière pédagogique et amusante. Tout le monde n’en pense pas tant.

Hello Big Brother

Hello Barbie, c’est le nom officiel de cette poupée hyper-connectée qui sera dans les étales pour Noël 2015 aux États-Unis. Sa particularité ? Enregistrer du contenu multimédia qui servira à enrichir la communication de la poupée interactive. En effet, à l’image de Siri ou de Google Now, ces applications de reconnaissance vocale qui répondent aux questions des consommateurs, la poupée high-tech sera connectée à un serveur central de ToyTalk via Wifi. Les paroles de l’enfant pourront être écoutées, analysées et traitées afin que la poupée « intelligente » puisse répondre de manière adaptée.

Si le simple fait d’être enregistré soulève déjà beaucoup de questions concernant la vie privée, une problématique supplémentaire se présente. Pour répondre adéquatement à l’enfant, la Barbie, via le système informatique centralisé, va analyser les centres d’intérêts des enfants. Dans une société informatisée où les comportements des consommateurs vallent de l’or en barres, on peut se douter que les informations récoltées ne seront pas utilisées à des fins caritatives.

Barbie

Marchandisation de l’enfance

Si on observe la politique de confidentialité de ToyTalk, la technologie utilisée par Mattel, rien n’indique en effet que l’information ne sera pas utilisée à des fins commerciales. Selon l’unanimité des observateurs, il y a de très fortes probabilités qu’elle le soit. La charte ne diffère pas vraiment de ce que vous signez actuellement chez Twitter, Facebook et compagnie.

« Lorsque les utilisateurs interagissent avec ToyTalk, nous pouvons capturer des photos ou des enregistrements audio ou vidéo de ces interactions, en fonction de l’application particulière utilisée.

Nous pouvons utiliser, transcrire et stocker ces enregistrements pour fournir et maintenir le service, pour développer, tester ou améliorer la technologie de reconnaissance vocale, les algorithmes d’intelligence artificielle, ainsi que pour d’autres recherches de développement, ou à des fins internes. » (politique de confidentialité de ToyTalk)

Tout comme Facebook ou Google enregistrent les moindres de nos comportements pour mieux nous orienter vers de la publicité, ce système d’interactivité aux airs Orwelliens s’attaquerait de front aux enfants, dans leur plus grande intimité. C’est en effet dans l’intimité que nous développons une part de notre imaginaire. L’école, la chambre, les lieux de jeu, les constructions improvisées par l’enfant, sont autant de lieux de « sécurité » où se construisent une partie de notre personnalité. Un parent un tant soit peu conscient des enjeux économiques actuels n’osera pas mettre son enfant en ligne directe avec une multinationale à l’endroit même où il devrait être libre des influences du monde marchand. Combien de temps faudra-t-il avant que la nouvelle Barbie ne réclame la compagnie d’autres poupées, d’une voiture ou d’un manoir de la marque ?

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Bad buzz pour Mattel

Au delà du coté commercial, est-il éthique de photographier et/ou enregistrer un enfant à son insu ? Les Allemands semblent particulièrement inquiets à l’idée d’être sous écoute. Par la force des choses, le peuple Allemand garde un traumatisme de l’époque de la Stasi, service réputé pour avoir mis sur écoute une grande partie de la population durant la Guerre froide. Comment réagissent les francophones à la chose ?

A ce jour, les européens n’ont pas à s’inquiéter de cette Barbie Big Brother. La nouveauté sera lancée sur le marché américain avant tout. Mattel n’a pas réagi à la polémique que suscite son invention. On notera que le groupe réalise de moins en moins de ventes depuis plusieurs années. La marque a, par ailleurs, été frappée par plusieurs polémiques ces derniers temps. Méthodes de fabrication critiquées et sexisme des produits, les consommateurs boudent la blonde en plastique. Même Greenpeace s’est attaqué à Mattel car l’entreprise jouerait un rôle important dans la déforestation. Cette nouvelle polémique fera-elle à nouveau plonger les ventes de la multinationale ?

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Sources : FranceTvInfo / lefigaro.fr / slate.fr

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