Créer une marque de mode éthique, basée sur les savoir-faire ancestraux des femmes du Cambodge : c’est le défi que s’est lancé le village de Cheung-Kok sous l’impulsion d’un belge vivant sur place. Découverte.

Les grandes marques de mode sont de plus en plus décriées pour leur manque d’éthique, autant sur le plan social que environnemental. Conditions de travail précaires, exploitation des Ouïghours, et plus particulièrement des femmes, industrie très polluante (10% des émissions de CO2 mondiales) … autant de raisons de vouloir trouver et développer des alternatives à la fast fashion. Ce phénomène lié à la mondialisation du secteur consiste, pour les marques, à produire toujours plus rapidement, fréquemment et à bas prix de nouvelles collections basées sur les tendances aperçues dans les défilés, pour les rendre accessibles au grand public. Autrement dit : créer des besoins inutiles et pousser à la consommation sans se soucier des conditions de production.

Le projet de marque de mode éthique lancé par le village Cheung-Kok, au Cambodge, s’inscrit à l’extrême opposé de cette logique. Ce projet, parmi d’autres, démontre que produire durablement, en valorisant les savoir-faire ancestraux, est bel et bien possible. Explications.

Aux origines de Cambo

Cambo est né de la rencontre entre Corentin et l’éco-village Cheung-Kok au Cambodge. Il y a un an, le jeune dinantais s’est rendu au Cambodge afin d’acheter une auberge de jeunesse et d’y appliquer différents principes écologiques, en travaillant en harmonie avec les locaux. Bien que le projet soit une réussite, il n’était pas satisfait :

« plus le temps passait, plus je me rendais compte des problématiques auxquelles étaient confrontées les populations locales : pollution, accès à l’eau & l’électricité, accès à l’éducation …»

Il décide de faire créer sur son terrain une école, avec la participation des professeurs de l’école du village voisin. Alors qu’il tisse de plus en plus de liens avec la population locale, et notamment le village Cheung-Kok, Corentin réalise qu’il peut faire encore plus. Le Cambodge est considéré comme l’un des pays les plus pauvres en Asie, et l’épidémie de coronavirus rend la situation encore plus difficile. La crise sanitaire endigue le tourisme, une importante source de revenus pour les habitants ce village. Ils vivent en effet de l’élevage, de leurs cultures, mais aussi de la vente de leur artisanat. Ils réfléchissent alors à une manière éthique et alternative de valoriser leurs savoir-faire : c’est ainsi que, ensemble, ils décident de créer le projet Cambo.

Corentin (à gauche), ainsi qu’une des femmes du village Cheung-Kok (à droite) / Crédits photo : Cambo

Soutenus par l’ONG Amica, qui reconnaît l’utilité du projet pour le développement durable du village Cheung-Kok, Corentin et les femmes du village travaillent sans relâche. En ce mois d’octobre, c’est l’aboutissement de plusieurs mois de réflexion : ils mettent en place un financement participatif , afin de faire naître Cambo.

Une marque éthique

Les 155 familles du village sont toutes associées au projet Cambo. Mais les articles sont confectionnés par les femmes, détentrices des savoir-faire ancestraux, et notamment concernant la soie. La production et le tissage de la soie est une tradition millénaire au Cambodge. D’autant plus que Cambo confectionne de la soie d’or, réputée pour être la plus fine et précieuse soie au monde. La marque propose également des produits en coton organique biologique, faits main également. Ces deux matières, coton et soie, sont produites sans aucun produit chimique ou pesticide.

La production de la soie d’or, un savoir-faire ancestral cambodgien réputé / Crédits photo : Cambo

Au-delà des préoccupations environnementales du projet, Cambo s’inscrit dans une démarche profondément sociale, à travers le commerce équitable : 25% des coûts sont liés au travail des femmes (contre moins d’1% dans la grande distribution). Si les articles sont créés exclusivement par des femmes, c’est justement dans l’objectif de leur permettre d’accéder à un salaire décent (au Cambodge, le revenu mensuel moyen est de 180 dollars), et donc de soutenir leur famille et la communauté. C’est également un moyen de préserver les savoir-faire ancestraux du Cambodge et, plus largement, la tradition. Or le but ultime du projet, partagé par l’ensemble du village Cheung-Kok, consiste à ce que tous les enfants du village puissent accéder à l’éducation et aux études. C’est pourquoi Cambo reverse, en plus, 5% de ses bénéfices à cette fin.

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« Avec cette marque, j’arrive avec une source de revenus et une possibilité pour les femmes de contribuer au développement du village comme la construction de nouvelles routes ou permettre aux enfants d’avoir accès à l’éducation. »

Pour Corentin, Cambo c’est avant tout des matières nobles et 100% naturelles, une revalorisation des savoir-faire du Cambodge, et un moyen pour les femmes de vivre décemment. On leur souhait un bel avenir sur cette voie.

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